Mesurer les distances des galaxies dans l’Univers lointain
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En scrutant l’Univers lointain avec l’observatoire NOEMA, les chercheurs peuvent remonter le temps et mieux comprendre les phénomènes cosmiques qui ont fait de notre Univers ce qu’il est aujourd’hui.
À l’aide de l’observatoire NOEMA, les chercheurs du projet « z-GAL » ont voyagé à travers le temps en scrutant l’Univers lointain. Ils ont mesuré les distances précises de 135 galaxies situées à plus de 10 milliards d’années-lumière. En résultent des observations d’objets célestes exceptionnels et une meilleure compréhension de phénomènes physiques et cosmiques qui animent les âges de notre Univers.
Détecter les premières galaxies de l’Univers et comprendre leur physique, leur diversité, leur évolution et plus largement notre histoire cosmique. C’est là l’un des grands enjeux de l’astrophysique moderne. Pour s’assurer que les galaxies observées sont parmi les premières, il faut mesurer précisément leur distance à la Terre. Plus elles sont éloignées de nous, plus elles flirtent avec la survenue du Big Bang, il y a 13,8 milliards d’années.
L’observatoire NOEMA(link is external) de l’IRAM, localisé à 2 550 mètres d’altitude sur le plateau de Bure dans les Alpes françaises, est un réseau de 12 antennes qui étudie, entre autres, les origines et l’évolution de l’Univers. Une première étude sur une douzaine de galaxies a démontré que ses nouvelles capacités instrumentales acquises ces dernières années sont particulièrement adaptées à la mesure de distances de galaxies lointaines. Encouragés par ce résultat, plusieurs chercheurs ont élargi ce quota grâce au projet ANR z-GAL(link is external) en mesurant, en tout, les distances de 135 galaxies préalablement détectées par le télescope Herschel(link is external). « C’est le plus grand nombre jamais mesuré en un seul projet ! s’enthousiasme Pierre Cox, astronome à l’Institut d’astrophysique de Paris1 et coordinateur de z-GAL. Seules deux galaxies nous ont échappé. Nous allons ainsi fournir 99 % de l’information initialement visée par notre programme, un taux de succès jamais atteint jusqu’à présent. » Le projet s’est appuyé sur 250 heures d’observations et a réuni près d’une quarantaine de collaborateurs internationaux.
L’observatoire NOEMA de l’IRAM est localisé à 2 550 mètres d’altitude sur le plateau de Bure dans les Alpes françaises. Jérémie BOISSIER/IRAM/CNRS Images
Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine…
Avec z-GAL, les astronomes étudient des objets situés à plus de 10 milliards d’années-lumière de nous. Ces galaxies, particulièrement lumineuses, sont entourées d’une énorme quantité de gaz et de poussière : la matière première nécessaire à la naissance des étoiles. Toutefois, les nuages de matière stellaire absorbent toute la lumière émise par ces galaxies, les rendant invisibles à notre œil. Dans le spectre du visible, ces zones qui fourmillent d’étoiles nous apparaissent donc comme des masses sombres dans le ciel où rien ne semble se passer. Une des manières de les détecter est d’observer leur émission infrarouge provenant des poussières chauffées par les étoiles. Toutefois, du fait de l’expansion de l’Univers, les astronomes observent un décalage de cette émission à des longueurs d’onde encore plus élevées : les ondes submillimétriques.
Mais que regardent-ils exactement ? « Lorsque nous décomposons la lumière émise par un objet, nous obtenons ses raies d’émission. Une fois identifiées, celles-ci nous permettent de mesurer de manière précise les distances avec les sources à partir du décalage spectral vers le rouge dû à l’expansion de l’Univers. Nous nous appuyons en particulier sur les raies d’émission du monoxyde de carbone qui est un gaz très abondant à travers l’espace, et ce, dès la formation des premières galaxies », explique Pierre Cox. En pratique, les antennes de NOEMA tournées vers le ciel travaillent de concert pour capter ces signaux très faibles au milieu du bruit cosmique.
Galaxies lointaines du projet z-GAL observées par NOEMA illustrant leurs diversités. IRAM/CNRS
NOEMA : un instrument aux capacités remarquables
Le succès de z-GAL tient notamment aux capacités de l’instrument au cœur de ses observations. Ses récepteurs de dernière génération et son corrélateur permettent à NOEMA de mesurer et d’explorer les spectres2 des galaxies lointaines sur de larges bandes de fréquence. Mais comment ça marche ?
Les antennes de NOEMA mesurent la courbure d’ondes électromagnétiques émises par des sources cosmiques. Roberto Neri, astronome à l’IRAM et chef de projet de NOEMA, explique : « lorsque vous jetez un caillou ou un bâton dans une flaque, ces objets émettent des ondes différentes lorsqu’ils entrent en contact avec l’eau. L’onde émise arrive également à des temps différents d’un bord de la flaque à l’autre. En fait, l’objet définit la forme et le moment d’arrivée des ondes. En interférométrie, l’idée est quelque peu similaire. Nous regardons arriver une onde et sa courbure, ce qui nous permet de reconstruire l’image de l’objet que nous observons ».
L’interféromètre NOEMA a ainsi mis en avant de nombreux détails sur les sources regardées par le projet z-GAL. Par exemple : le taux de formation stellaire est de plusieurs centaines de masses solaires dans les galaxies lointaines contre deux ou trois pour la Voie Lactée. « Nous savons que le taux de formation stellaire change à travers le temps. Avec NOEMA, nous avons observé des moments dans l’univers où les ressources en gaz et en poussière sont très conséquentes et nous retrouvons le pic de formation identifié à environ 2 ou 3 milliards d’années après le Big Bang », témoigne Roberto Neri. Mais les résultats ne s’arrêtent pas là.
NOEMA (Northern Extended Millimeter Array) est le radiotélescope le plus puissant de l’hémisphère Nord et l’une des plus grandes installations d’Europe pour la recherche astronomique. Jérémie BOISSIER/IRAM/CNRS Images
Une analyse statistique des galaxies lointaines
Une des forces du projet z-GAL est le nombre important de galaxies observées qui lui permet d’apporter une analyse statistique autrement impossible sur quelques sources isolées. Les astronomes ont notamment observé des gaz virevoltant autour d’un noyau à des vitesses allant jusqu’à 1 000 kilomètres par seconde dans l’univers lointain, contre 300 kilomètres par seconde dans notre environnement spatial proche. L’analyse statistique montre alors que ces premières vitesses ahurissantes sont loin d’être rares.
Les chercheurs ont également identifié une trentaine de cas atypiques à creuser lors de futures observations. « Certaines sources sont en train d’entrer en collision. Des amas de galaxies se forment en simultané. C’est très riche ! Une source me fascine en particulier, car il n’y a aucune trace de cas similaires dans la littérature. Il s’agit de deux galaxies lointaines, en interaction et liées par un pont de matière étendu. Il va falloir regarder cela de plus près ! », décrit Pierre Cox avec entrain.
NOEMA a également détecté de nombreuses galaxies amplifiées gravitationnellement. Dans l’espace, des galaxies massives proches de nous et se trouvant le long de la ligne de visée d’un instrument peuvent agir comme une lentille, amplifiant la lumière provenant d’objets plus lointains. Les chercheurs ont ainsi discerné dans quelques galaxies des structures annulaires (dites anneaux d’Einstein) associées à ce phénomène. Celles-ci permettront d’obtenir des informations détaillées en discernant des régions de la taille d’un nuage moléculaire galactique situé à 11 milliards d’années-lumière.
Un grand pas pour la science de demain
Une fois les résultats publiés dans la revue Astronomy & Astrophysics, l’ensemble des données récoltées seront mises à la disposition de tous dans l’espoir de voir émerger de nouvelles découvertes lumineuses. Les chercheurs ont déjà amorcé des comparaisons entre leurs observations et celles réalisées par d’autres instruments pour mieux cerner la nature des objets détectés. Cette mise en commun de données apportera une vision plus précise de l’évolution de certaines propriétés physiques de ces objets célestes. À Roberto Neri de conclure : « regarder les galaxies à travers les différents âges de l’Univers et, en particulier, durant le pic de formation de galaxies et d’étoiles comme ici, nous permettra de reconstruire un peu mieux l’histoire cosmique de l’Univers ».
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Ces recherches ont été financées en tout ou partie, par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) au titre du projet ANR-Z-GAL-AAPG2019. Cette communication est réalisée et financée dans le cadre de l’appel à projet Sciences Avec et Pour la Société - Culture Scientifique Technique et Industrielle pour les projets JCJC et PPRC des appels à projets génériques 2018-2019 (SAPS-CSTI-JCJ et PRC AAPG 18/19).Source : lejournal.cnrs.fr
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Pour appréhender un peu mieux la taille du système solaire, je vous conseille l’excellent site web “If the moon were 1 pixel”.
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@Raccoon c’est effectivement très parlant, t’as le bonjour de la molette de ma souris qui n’en peut plus.
Edit: je viens d’arriver à Mercure!
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patricelg PW Addict DDL Rebelle Windowsien Ciné-Séries Cluba répondu à michmich le dernière édition par
@michmich T’as l’avance rapide aussi
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@patricelg oui, j’ai triché aussi pour arriver sur Mars