À cause de la taille de leurs instruments, des musiciens mis à l'amende par la SNCF
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Contrebasses, clavier, violoncelles, autrefois tolérés, ne sont plus acceptés dans les trains. Ce qui complique la vie des artistes en déplacement pour leurs concerts.
«Je ne peux pas me permettre de prendre des amendes à chaque fois que je voyage.» Depuis début 2021, des musiciens dénoncent une multiplication des contraventions à leur égard - entre 50 et 150 euros - lors de leurs déplacements ferroviaires. La taille de leurs instruments est mise en cause par la SNCF, laquelle considère que certains de ces objets ne respectent pas les normes de sécurité en vigueur. Ainsi, le 12 juin, pour un de ses premiers concerts depuis la reprise de la vie culturelle, Aurélie se rend à Niort avec sa contrebasse. Alors qu’elle effectue sa correspondance, elle est repérée par trois contrôleurs, lesquels la sanctionnent.
«Ils m’ont dit que c’était 50 euros et qu’ils me faisaient un prix car c’était 150 en temps normal, témoigne la jeune femme. Je trouve ça bizarre de faire ça à la tête des clients. Surtout, ils m’ont expliqué que c’était pour des règles de sécurité, alors que l’instrument dépassait de quelques centimètres dans l’allée.» Tant qu’une solution n’est pas trouvée, la musicienne évite d’utiliser le rail. «Pour l’instant j’adapte mes trajets», se résigne-t-elle.
Les musiciens classiques sont les principaux concernés par ce changement d’attitude des contrôleurs, alors qu’une tolérance - et non pas une autorisation - était auparavant en vigueur. Harpes, contrebasses, violoncelles et claviers sont les seuls instruments à dépasser les dimensions réglementaires, précisées sur le site de la SNCF, à savoir un mètre 20 de hauteur sur 90 centimètres de largeur. En France, 2400 musiciens vivent de ces instruments, selon les chiffres du Syndicat national des producteurs, festivals, ensembles, diffuseurs indépendants de musique (Profedim). Aurélie Foucher, déléguée générale de la structure, concède que «c’est peu». «Mais c’est l’outil de travail de ces personnes qui est attaqué. Les logiques de tournées sont totalement bousculées», témoigne-t-elle au Figaro.
Multiplication des amendes
Les premiers signes de ce durcissement remontent à début 2021, alors que la France alternait encore les couvre-feux et les confinements. «C’est à ce moment-là que l’on s’est rendu compte de l’ampleur du phénomène. La vie culturelle était stoppée publiquement mais les musiciens continuaient à circuler, et les amendes sont devenues systématiques», explique la syndicaliste qui reconnaît qu’«il y a toujours des contrôleurs compréhensifs qui laissent passer». «Mais c’est un équilibre trop fragile pour compter sur la gentillesse d’un agent», alerte-t-elle.
Le contrebassiste Sébastien Boisseau, également à l’origine d’une tribune publiée dans Le Monde en juillet, estime à 100.000 le nombre de kilomètres qu’il parcourt à travers l’Europe chaque année. S’il n’a pas été personnellement sanctionné depuis le début de l’année, «seulement deux fois en vingt-cinq ans», il a, lui aussi, remarqué un changement d’attitude vis-à-vis des musiciens: «Depuis février, je reçois témoignages sur témoignages de collègues verbalisés, ou même interdits d’accès au quai.» Une situation kafkaïenne, dans laquelle «une entreprise gère ses meilleurs clients en les verbalisant. On ne peut pas d’un côté nous offrir des avantages, nous faire des prix, et en même temps nous verbaliser et nous faire la morale», s’indigne le musicien.
L’usage du fret jugé «inenvisageable»
Une alternative a pourtant été proposée aux musiciens par la SNCF : l’expédition par fret de leurs instruments. Mais, outre le problème logistique qu’imposent les délais de transport, les artistes ne peuvent se résoudre à se séparer de leurs instruments. «Transporter, ce n’est pas expédier, explique Sébastien Boisseau. C’est impossible d’envisager l’expédition d’instruments aussi précieux, qui date parfois du XVIIIe siècle.»
Le dossier s’est invité à l’Assemblée nationale, où plusieurs députés s’en sont emparés, comme l’élue du Var Cécile Muschotti (LREM) qui a interpellé le gouvernement dans une question soumise au ministre délégué aux transports, Jean-Baptiste Djebbari. Bruno Studer, député LREM du Bas-Rhin et président de la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation, a lui écrit à la direction de la SNCF. «J’ai été saisi localement par des musiciens il y a quelques semaines, notamment par le directeur du Festival Musica de Strasbourg», raconte le député, qui assure «suivre le dossier de très près». Au Figaro, il déclare l’usage du fret «inenvisageable». «La relation entre un musicien et son instrument est particulière, il faut qu’ils puissent voyager à proximité l’un de l’autre», argue-t-il, pointant également les frais supplémentaires dont devraient s’acquitter les musiciens.
Le dossier est difficile car, du côté des musiciens, il s’agit d’ “ objets ” très fragiles et précieux, et de notre côté nous avons des restrictions de sécurité très importantes.
Ghislaine Collinet, secrétaire générale en charge des relations avec les médias chez SNCF Voyages
Prenant l’exemple des skis et vélos, admis à bord des trains, l’élu «espère qu’on pourra revenir à la solution qui avait cours auparavant, c’est-à-dire voyager avec son instrument», d’autant que «le train est amené à être le transport intérieur français privilégié».
La SNCF affirme de son côté être en discussion avec les musiciens mobilisés, afin de proposer des solutions adaptées. «Nous avons un point avec un collectif le 8 octobre», expose Ghislaine Collinet, secrétaire générale en charge des relations avec les médias chez SNCF Voyages. «Le dossier est difficile car, du côté des musiciens, il s’agit d’“objets” très fragiles et précieux, et de notre côté nous avons des restrictions de sécurité très importantes», détaille-t-elle. Mais les mises à l’amende relèvent de l’épiphénomène selon elle : «Il faut déjà partir du nombre de contrebassistes en France, de ceux qui souhaitent se déplacer en TGV puis de ceux qui auraient des contacts avec les contrôleurs. Ça fait très peu de personnes en réalité.»
Très peu de personnes mais un problème réel, Ghislaine Collinet le concède. «Nous sommes sensibles aux difficultés exprimées et c’est pourquoi nous travaillons en interne mais aussi évidemment avec les représentants des musiciens», explique la secrétaire générale, qui «ne doute pas qu’une solution sera trouvée».
Source : lefigaro.fr
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En gros mon projet, je laisse tomber!
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@michmich lol²
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@michmich
Une amende aussi pour Rocco Siffredi…
Discrimination quand tu nous tiens…
OK, je sors… -
C’est pas aux joueurs de pipeau à qui ça arriverait !
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La France championne pour toujours taxer un peu plus de pognon