La folle évolution d’Ethernet, de 2,94 Mb/s à 1,6 Tb/s
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Si la solidité de la languette avait pu suivre la même courbe…
Robert (aka Bob) Metcalfe vient de recevoir le prix Turing – souvent présenté comme prix Nobel de l’informatique – pour ses travaux sur l’Ethernet, un protocole de communication qui va fêter ses 50 ans, excusez du peu ! On est passé de 2,94 Mb/s à plusieurs centaines de Gb/s, et jusqu’à 1,6 Tb/s se prépare en coulisse. On vous propose une petite rétrospective.
Au début, plusieurs protocoles de réseau local étaient en concurrence. Aux côtés de l’Ethernet, on retrouvait par exemple le Token Ring, qui fonctionnait sur le principe d’un anneau et d’un jeton permettant d’éviter des collisions. Il y avait également l’ATM ou Asynchronous Transfer Mode, pensé pour intégrer à la fois des données, de la voix, de l’audio et de la vidéo. Ce n’était pas forcément un concurrent direct d’Ethernet, mais il pouvait le devenir suivant les topologies du réseau. Cela rappelle très certainement de bons/mauvais (au choix) souvenirs aux moins jeunes d’entre nous.
Revenons à nos moutons. avec un rappel historique de ce protocole, qui débute le 22 mai 1973, lorsque Metcalfe présente une première ébauche de ce protocole de communication alors qu’il est ingénieur au Xerox Palo Alto Research Center (PARC). Bien évidemment, il avait déjà passé du temps à préparer son document auparavant. Son projet était inspiré d’ALOHAnet, un système de réseau informatique développé à l’Université d’Hawaï.
Un brevet est ensuite déposé par Xerox en 1975. Dans la foulée, Bob Metcalfe publie avec son collègue et assistant David Boggs un article baptisé « Ethernet : Distributed Packet-Switching for Local Computer Networks ». En 1979, Bob Metcalfe quitte Xerox et crée (avec d’autres) la société 3Com afin de développer et promouvoir Ethernet, notamment en proposant des produits commerciaux.
V1 , V2 et norme IEEE 802.3 au début des années 80
En 1980, la v1 d’Ethernet est publiée dans un document baptisé « The Ethernet, A Local Area Network. Data Link Layer and Physical Layer Specifications ». Il est signé par trois entreprises : DEC (Digital Equipment Corporation), Intel et Xerox ; regroupé sous les initiales DIX. La v2 est arrivée deux ans plus tard, en 1982. Ces documents sont parfois présentés comme le « blue book », simplement car leur couverture était bleue.
Ces travaux ont servi de base au développement d’un standard par l’Institute of Electrical and Electronics Engineers (IEEE), qui s’en occupe toujours : 802.3. La première version arrive au début des années 80 et il suffit d’un passage sur la page Wikipédia pour se rendre compte des dizaines d’évolutions qui ont eu lieu depuis, et des nombreuses en préparation.
2,94 Mb/s pour « l’Ethernet original de Metcalfe »
« La vitesse de l’Ethernet original de Metcalfe s’est avérée être de 2,94 Mb/s. Elle est rapidement passée à 10 Mb/s. Les générations successives continuent d’augmenter la vitesse d’un facteur de 10 à chaque fois, conduisant à la règle empirique “10 fois la vitesse à 3 fois le coût” », expliquait Intel dans un document d’une dizaine d’années.
Les premières évolutions se faisaient en effet en ajoutant un 0 aux débits : 10 Mb/s, 100 Mb/s, 1 Gb/s, 10 Gb/s, mais ensuite le protocole Ethernet est passé par différentes phases avec pêle-mêle du 25, 50, 100, 200, 400 Gb/s… . La « règle » de Metcalfe n’a donc plus cours aujourd’hui. Notez que Metcalfe est également célèbre pour avoir inventé un théorème sur l’importance croissante des réseaux, connu sous le nom de « loi de Metcalfe », explique Intel : « L’utilité d’un réseau est proportionnelle au carré du nombre de ses utilisateurs ».
Ace of Base : on vous explique les « bases »
Profitons d’être quelques années en arrière pour revenir sur des standards de l’époque : les « Base ». Les premières versions d’Ethernet fonctionnaient sur du câble coaxial (non, pas de la fibre, n’en déplaise à Patrick Drahi). Dans les années 80 sont apparus les 10Base2 et 10Base5. Petite clé de lecture utile pour la suite : 10 comme 10Mb/s, Base comme Bande de Base (baseband) et 2 ou 5 pour 200 ou 500 mètres.
La distance en mètres indique la longueur maximum du réseau supportée par le protocole. Cela donne respectivement 185 (10Base2 arrondi à 200 mètres, ça nous évite de parler de 10Base1.85) et 500 mètres pour 10Base5. Dans les deux cas, le protocole définit un nombre maximum de connexions et des longueurs à respecter pour les câbles coaxiaux reliant les machines.
Ethernet passe du coaxial aux paires torsadées et à la fibre
Les deux protocoles utilisent un réseau en bus, c’est-à-dire une « architecture de communication où la connexion des clients est assurée par un bus partagé par tous les utilisateurs au moyen d’arrêt de bus », explique Wikipédia. On peut comparer cela à une résidence ou chaque maison serait desservi par un arrêt d’une même ligne de bus ; pour une fois cette technologie porte très bien son nom.
Parlons maintenant du 10Base-T arrivé en 1990, où « T » n’est pas une distance, mais signifie Twisted pair, ou pair torsadée. Si vous avez déjà décortiqué un câble réseau et/ou un connecteur RJ45 cela doit forcément vous rappeler quelque chose… En effet, aujourd’hui encore, on retrouve ces paires de fils de cuivre dans nos câbles réseaux. On est toujours sur un modèle Bande de Base, avec 10 Mb/s de débit maximum. Autre changement important : le bus reste au dépôt et la topologie du réseau passe en étoile, avec des machines reliées à un élément central tel qu’un switch ou un routeur (pendant un temps, on a aussi eu les hubs).
Deux ans plus tard, la fibre optique débarque avec le 10Base-FL.
Les débits s’envolent : 100, 1 000 et 10 000 Mb/s…
Les câbles coaxiaux sont rapidement abandonnés pour rester sur la fibre et les paires torsadées, avec une hausse des débits à 100 Mb/s (Fast Ethernet) et 1 Gb/s (Gigabit Ethernet) juste avant les années 2000. Cela donc fait plus de 20 ans que le Gigabit Ethernet existe et, encore aujourd’hui, il est très largement répandu sur les ordinateurs et les NAS (surtout chez Synology).
En 2002, arrive le 10Gbase-F avec du 10 Gb/s sur de la fibre alors que le 10GBase-T sur des paires de cuivre torsadées arrive quelques années plus tard, en 2006. Au cours des dernières années, la fibre optique est passée par plusieurs paliers : 25, 40, 50, 100, 200, 400 et même 800 Gb/s (nous y reviendrons). Les paires de cuivres n’ont pas dit leur dernier mot avec le 25GBase-T et le 40GBase-T (respectivement 25 et 40 Gb/s, vous suivez ?) via un câble de catégorie 8.
2.5GBase-T et 5GBase-T débarquent en 2016 \o/
C’est en 2016 qu’une petite révolution pour le grand public débarque avec les 2.5GBase-T et 5GBase-T (aussi appelés Multi-GIG). Ces normes permettent, en théorie, à un plus grand nombre de profiter de débits multiplié respectivement par 2,5 et 5x, pour un coût bien plus raisonnable qu’un passage en 10 Gb/s, d’autant que l’on peut se contenter de câble 5e pour les 2.5GBase-T et 5GBase-T.
Pour rappel, le GbE permet des débits théoriques jusqu’à 128 Mo/s, ce que les disques durs et surtout SSD grand public sont capables de dépasser allègrement. En 2,5 Gb/s, on dépasse les 300 Mo/s et 600 Mo/s en 5 Gb/s. Les dernières box des opérateurs télécoms pour le grand public sont également passées au multi-GIG.
800 GbE est plus ou moins là, le 1,6 Tb/s dans les cartons
Lors de son annonce début 2020, le 800 GbE n’était pas une grosse révolution puisqu’il s’agissait surtout d’agréger deux lignes 400 GbE (IEEE 802.3bs) et de réutiliser au maximum cette norme, « avec quelques modifications afin de diffuser les données sur huit lignes de 106,25 Gb/s », au lieu de quatre lignes auparavant. Notez bien qu’il s’agit d’une annonce de l’Ethernet Technology Consortium (ETC, anciennement 25 Gigabit Ethernet), mais pas de l’IEEE, qui n’a toujours rien ratifié en 800 Gb/s.
Le 800 GbE « peut être considéré comme une version plus large de l’Ethernet 400G, et introduit de nouveaux MAC et PCS. Toujours basée sur les voies 106,25G existantes, qui ont été introduites avec Ethernet 400G, cette spécification 800GBase-R vise à doubler le nombre total de voies de 4 à 8 en PCS. Bien que cela semble être un simple changement de concept, il faudra beaucoup de travail et de compétences techniques pour relier de cette manière les voies supplémentaires », expliquait en 2021 le fournisseur FS.com.
De son côté, l’IEEE travaille aussi sur du 800 GbE et même du 1,6 TbE, avec visiblement un débit par ligne doublé pour atteindre 200 Gb/s. Il faudra néanmoins encore attendre plusieurs années (aux alentours de 2025) pour voir comment ces projets vont se concrétiser.
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@Raccoon a dit dans La folle évolution d’Ethernet, de 2,94 Mb/s à 1,6 Tb/s :
Si la solidité de la languette avait pu suivre la même courbe…
Je me suis demandé de quoi cette phrase pouvait bien être la traduction.
Il m’a fallut au moins deux minutes avant de comprendre que tu parlais des languettes de RJ-45 dont plusieurs sont effectivement cassées chez moi -
Raccoon Admin Seeder I.T Guy Windowsien Apple User Gamer GNU-Linux User Teama répondu à duJambon le dernière édition par
@duJambon c’est un peu leur maladie à ces connecteurs, la languette pète de trouille à peine effleurée.
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@Raccoon a dit dans La folle évolution d’Ethernet, de 2,94 Mb/s à 1,6 Tb/s :
1,6 Tb/s
le jour où on aura ça a la maison
les films 4k et jeux pc en quelques secondes, bon faudra un bon nwme gen 4 pour suivre derrière
edit : j’ai trouvé ca qui complète bien le resumé https://www.accton.com/Technology-Brief/towards-800g-and-1600g-ethernet/
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Depuis quelques temps, les câbles eth ont des moulures plastiques pour protéger ses languettes notamment pour ne pas les tirer dans l’autre sens. Maintenant faut quand même y aller pour casser ce genre de câbles.
Par contre si ils sont à poils c’est la loose, rien qu’en les rangeant, tu les défonce
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Ce putain de caoutchouc peut même être une plaie quand il faut les débrancher d’un endroit un peu étroit.
Comme quoi, on n’est jamais content.
Quant au 1.6 Tb/s, c’est pas pour les particuliers, cela serait ridicule. Avec 1000 fois moins, soit 1 Gb/s, on fait 2.5 GB en une minute de téléchargement, c’est déjà pas mal…
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@Ashura C’est peut-être aussi un avantage, tu as le temps de te mettre en condition en attendant la fin du transfert