[Critique] Knock at the Cabin : Une famille en horreur
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M. Night Shyamalan garde le rythme et nous livre moins de deux ans après Old un nouveau thriller surnaturel - mais l’est-il vraiment ? S’accrochant au minimalisme qui l’a fait connaître (sept personnages et un décor lui suffisent), le cinéaste démontre avec Knock at the Cabin qu’il n’a rien perdu de sa virtuosité, ni de son goût pour les intrigues risquées, aptes a soulever des débats d’idées trop rarement provoqués par le cinéma hollywoodien…
Un couple homosexuel (Ben Aldridge et Jonathan Groff) et leur fille adoptive Wen (Kristen Cui) s’en vont passer un week-end dans le calme d’une maison perdue au fond des bois. Peu après leur arrivée, quatre personnes (Dave Bautista, Nikki Amuka-Bird, Rupert Grint et Abby Quinn) s’invitent par la force dans leur location. Guidés par des visions inexpliquées, les intrus soumettent la petite famille à un choix impossible, qui pourrait annuler ou précipiter l’apocalypse…
Comme M. Night Shyamalan l’explique lui-même dans l’entretien suivant, Knock at the Cabin repose sur une volonté d’urgence. Le générique d’ouverture ne laisse planer aucun doute sur la question, les cartons disproportionnés s’enchaînant sans qu’on ait forcément le temps de lire l’intégralité des noms. Pointant à 100 minutes générique compris, le film est propulsé par une mécanique implacable, soutenue par une temporalité qui va en s’accélérant. Il est rare qu’une structure narrative obéisse à des formes et des mouvements aussi précis, l’auteur faisant méticuleusement avancer son intrigue en même temps que ses personnages dans son espace restreint.
L’ouverture se déroule devant la cabane, le dernier acte sur le porche de derrière, des flashes-back découpent le récit de façon métronomique et une ellipse temporelle (une nuit qui passe en quelques secondes) permet de séparer stratégiquement les deux premiers tiers. Le hors champ est amené à s’immiscer progressivement dans le drame, d’abord à travers les explications du groupe d’envahisseurs, puis via un téléviseur, et enfin par des manifestations concrètes sur lesquelles on ne s’étendra pas ici.
– Eric (Jonathan Groff) tente de défendre sa famille face à un groupe d’intrus mené par Léeonard (Dave Bautista)DISPOSITIFS DE MISE EN SCÈNE
L’art de la mise en espace déployé par Knock at the Cabin n’a rien à envier à William Friedkin ; tout comme le réalisateur de Bug et Killer Joe, Shyamalan s’efforce de faire avancer visuellement son récit en déplaçant peu à peu ce qu’on pourrait décrire comme des bulles de mise en scène. Le décor n’étant pas appelé à changer, chaque séquence a droit à un dispositif, un montage et un point de vue bien spécifiques, et jamais un plan ne sera répété une fois cette bulle arrivée à terme.
Le processus peut paraître abstrait à la lecture de ces lignes, mais il est particulièrement criant à l’écran, et ce dès la formidable scène de siège où le cinéaste et sa monteuse Noemi Katharina Preiswerk cisèlent une multi angularité délicieusement hitchcockienne, augmentée par un sound design de premier ordre. Quand elle ne cède pas à des dissonances très modernes, la bande originale de l’Islandaise Herdis Stefänsdôttir (Y, le dernier homme) marche dans les pas de Bernard Herrmann : une référence que James Newton Howard avait déjà brandie sur Signes — qui est, de l’aveu de Shyamalan, le long-métrage le plus proche de Knock at the Cabin au sein de sa propre filmographie.
L’IMPORTANCE DU CADRAGE
Aussi distinctes les unes des autres que l’étaient les morceaux de bravoure successifs de La Guerre des mondes de Steven Spielberg, les bulles de mise en scène de Knock at the Cabin exhibent toutes un développement visuel excitant et surtout pertinent, Car toujours en accord avec les enjeux du moment et les états d’âme des protagonistes. La première conversation entre Leonard (Bautista) et la petite fille est déjà un modèle de construction scénique. Par une succession d’inserts, Shyamalan commence au plus près de Wen et partage son monde intérieur tout en amenant à travers les sauterelles enfermées dans un bocal l’idée du piège à venir. La gamine est d’abord filmée en plan serré, dans l’axe de la profondeur, et Leonard s’approche lentement dans le contrechamp.
Inconfortable, la première interaction entre les deux personnages est filmée en plongée/ contre-plongée, puis le cinéaste redescend son cadre au niveau de l’enfant lorsque se noue une relation de confiance. Les très gros plans s’appliquent désormais aux deux personnages, les regards caméra soulignant la disparition totale des barrières. La mécanique du champ/contrechamp est bientôt interrompue par des plans de coupe à 90 degrés sur Bautista, qui détourne le regard vers quelque chose hors champ. Wen essaie de le ramener à elle (les regards caméra s’enchaînent à nouveau) mais les plans de coupe se multiplient. Quand on revient au champ/contrechamp initial, la caméra se retrouve soudainement penchée, comme si un grain de sable venait de coincer l’engrenage. Lorsqu’apparaissent d’autres inconnus à l’autre bout de la forêt, la petite fille se lève pour se diriger vers la maison, laissant Leonard assis derrière elle: la situation de départ est littéralement inversée “t l’espace ne peut que se réduire.
DOMINANTS ET DOMINÉS
La caractérisation des deux héros bénéficie elle aussi d’un traitement visuel minutieux : quand Andrew (Aldridge) et Eric (Groff) se retrouvent ligotés à des chaises au début de l’histoire, le dominant supposé du couple est placé au premier plan, de profil, et le compagnon fragile apparaît dans la continuité, bien plus petit et flou. Si le focus revient sur Eric quand il est amené à parler, Shyamalan conserve le même cadrage réducteur, Andrew occupant toujours la majorité du cadre.
Parallèlement, le cinéaste adopte implicitement le point de vue du plus faible en jouant sur l’agressivité des sources de lumière, faisant partager au spectateur la commotion du personnage. Au fur et à mesure qu’Eric gagne en importance dans le débat qui agite la maison (surtout après le flashback de l’adoption, qui le décrit comme aventureux et proactif), la façon dont Shyamalan le cadre évolue, jusqu’à un dernier acte reposant essentiellement sur lui. La bonté extrême d’Eric est à l’évidence, pour l’auteur, la clé de voûte du film, lequel se détourne rapidement des codes du home invasion racoleur au profit de concepts dérangeants et antinomiques.
AGRESSION BIENVEILLANTE
Dans Knock at the Cabin, les personnages tuent et torturent avec respect et bienveillance, un concept particulièrement désarçonnant que Shyamalan utilise pour questionner l’absurde violence de notre époque. Jamais complaisant dans l’horreur, l’auteur manie des thèmes dangereux (la religion, la pensée sectaire, la surpopulation, l’intolérance, l’esprit de vengeance) comme s’il portait une grenade dégoupillée. Malgré l’apparente verbalisation des enjeux par l’un des personnages, le dernier acte reste d’une ambiguïté suffisamment prégnante pour susciter des discussions passionnées à la sortie de la salle.
Une chose est sûre : si les grenouilles de bénitier seront ravies d’y percevoir un fantastique à forte connotation religieuse, ils auront du mal à avaler que la survie de l’Humanité puisse dépendre d’un couple gay et de leur fille asiatique…
– Par Alexandre Poncet
–Mad Movies #368 -
Disponible ^^
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Merci pour la news
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je l’ai déjà récupérer, j’attends pour le mater
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tudikoi Ciné-Séries Club Rebelle Windowsien Torrent user DDL PW Addicta répondu à Violence le dernière édition par
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Doublon Dragon
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En le matant, j’avais même pas fait attention jusqu’à qu’un des protagonistes n’est sorti "Bosthon".
Sinon pour en revenir au film, j’ai bien aimé et c’est passé crème (si on avait été à leur place, qu’est ce qu’on aurait fait ? Moi perso je sais ce que j’aurai fait ).
En tous cas le film m’a fait oublié Old sur le coup lol. -
Ouai il est pas mal quand même mais je le passe en dessous de la trilogie Incassable, Split, Glass
Mais j’ai bien aimé, le film commence direct là où Old mettait 10 plombes
C’est clair, putain mais qui je bute !
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@Violence a dit dans [Critique] Knock at the Cabin : Une famille en horreur :
je le passe en dessous de la trilogie Incassable, Split, Glass
Pareil bien sûr .
Perso je le mets au dessus d’Old, Phénomènes, Le Dernier Maître de l’air (bon c’était facile sur le coup lol), After Earth. -
@Violence a dit dans [Critique] Knock at the Cabin : Une famille en horreur :
C’est clair, putain mais qui je bute !
Personne, je laisse couler
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@Psyckofox Pourquoi pas c’est une option ^^
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Knock at the cabin fait partie des films jetables, c’est-à-dire qu’une fois vu, il n’y a pas vraiment de quoi le regarder à nouveau, de plus le rythme est un peu lent, ce temps aurait pu-être mis à profit pour développer un peu l’histoire ou les personnages qui ne sont guère convaincants.
Dommage.
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@duJambon Je n’irais pas jusque là.
On en causait ici : https://planete-warez.net/topic/3269/critique-knock-at-the-cabin-une-famille-en-horreur/11
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@Violence C’est pour ça que j’ai pas fait une prez. Ben moi j’ai pas accroché, j’ai même failli arrêter en route, mais je voulais quand même savoir comment ça finissait.
Viré sans regret après visionnage, ça fait de la place pour autre chose
Je préfère nettement la trilogie incassable aussi. -
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