Pour une accélération du numérique d’intérêt général en Europe
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Les Social Tech, ce sont ces entreprises du numérique à but non lucratif ou à lucrativité limitée qui tentent de régénérer l’esprit du web des origines. Comment y parviennent-elles ? Plongez lors de la Social Good Week dans le numérique d’intérêt général, qui tente d’offrir une alternative juste, sobre et équitable aux mastodontes de la tech !
Certaines entreprises numériques ne peuvent être achetées. Elles choisissent des modèles à but non lucratif ou à lucrativité limitée pour se concentrer sur des missions démocratiques, sociales, environnementales. Ce sont les Social Tech. Elles régénèrent la vision égalitaire et révolutionnaire du numérique des origines du Web, conçu comme le terreau d’un renouveau démocratique, créateur de liens et d’autonomie citoyenne,capable de réduire les barrières culturelles, sociales et linguistiques. L’utopie s’est vue en grande partie récupérée par des acteurs avec des logiques marchandes et une avance technologique considérable, qui ont imposé leurs modèles d’hypercroissance dans un monde fragile, aux ressources finies. En 2022, après une crise sanitaire inédite qui a encore accru la dématérialisation des échanges et donc des inégalités, le numérique d’intérêt général offre une alternative plus juste, sobre et équitable.
Un modèle numérique porté par et pour les acteurs de l’économie sociale et solidaire
Des solutions alternatives à celles du tout profit se sont développées partout dans le monde, en adoptant des modèles permettant de garantir les principes des origines d’internet et parfois même une mission d’intérêt général. Le plus connu et le plus ancien est bien sûr Wikipédia, mais bien d’autres ont émergé : Openstreetmap comme outil de cartographie citoyenne, Open Food facts comme base de données sur l’alimentation. Côté logiciels libres, Framasoft et Chatons proposent des outils libres et adaptés aux besoins numériques du plus grand nombre tout en respectant les données personnelles. Mentionnons également en France les Licoornes, ces coopératives qui proposent des modèles de plateformes alternatives (Mobicoop sur le covoiturage, Label Emmaüs sur l’économie de seconde main, Commown et Telecoop sur le hardware et les télécoms…) ou encore les coopératives de livreurs ou chauffeurs VTC. Citons enfin les start-ups d’État qui s’appuient sur l’ouverture des données publiques comme Accès Libre ou encore Datagir qui utilise divers jeux de données de l’ADEME pour évaluer l’impact environnemental de nos comportements. Ces modèles alternatifs se déclinent également partout sur les territoires et au sein des tiers-lieux qui proposent des solutions collectives pour renouveler l’innovation citoyenne et ouvrir le numérique à tous. La Coop des Communs réunit des chercheurs qui s’attachent à démontrer toute la valeur créée par ces modèles génératifs.
L’ESS représente 10 % du PIB et 9 % de la population active en Europe
En somme, les organisations de l’économie sociale et solidaire, qui constituent le gros des troupes en première et deuxième ligne, assurent au quotidien l’accompagnement des publics fragiles, l’accès à la culture, l’éducation populaire et sportive, la lutte contre les inégalités, la vitalité démocratique et la transition écologique. Mais ces organisations ont également besoin d’être accompagnées – via la Fonda, PANA et Guid’Asso, Solidatech ou encore le Dispositif Local d’Accompagnement -, d’être mises en réseau et de monter en compétences pour opérer la transition numérique.
La représentation de l’ESS dans l’économie est significative : 10 % du PIB et 9 % de la population active en Europe, sans compter plus de 90 millions de bénévoles. Si des solutions technologiques de collecte, de médiation numérique, ou de mobilisation des compétences ont émergé – microDON, HelloAsso, Koeo, Vendredi -, la plupart des associations, fondations voire des coopératives peinent cependant à monter dans le train des dernières révolutions technologiques.
Comme l’a démontré l’étude du Social Good Accelerator réalisée en 2019, la plupart des organisations de l’ESS – quel que soit leur statut – rencontrent des freins dans leur développement proches de ceux des TPE avec en outre des difficultés supplémentaires liées à leur absence de profit, le financement des projets au détriment des structures, le manque d’organisation sectoriel sur ces enjeux.
L’Union européenne, terre fertile pour un numérique d’intérêt général
Côté technologique, l’Union européenne accuse un retard certain en la matière, mais elle a su préserver, tant bien que mal, son pilier social. Dans une volonté de remise à niveau, sa stratégie numérique (Digital Compass) repose sur quatre grand piliers ambitieux pour 2030 : des infrastructures numériques sûres et durables, une transition numérique de toutes les entreprises, une numérisation des services publics qu’il s’agit d’accompagner et enfin celui des compétences, sans doute le plus important.
L’UE a pour ambition de former plus de 20 millions de professionnels dans le numérique et d’équiper en « compétences numériques de base » au minimum 80 % de la population d’ici 2030. Là encore, que ce soit parmi les acteurs de la médiation numérique (regroupés sous la coopérative La MedNum) ou les organismes qui, sous statut de l’ESS, proposent aux publics éloignés des métiers numériques des formations professionnalisante accélérées – Simplon, Social Builder, Code Phénix… -, l’ESS regorge de solutions en faveur de l’intérêt général.
C’est dans ce sens que le Social Good Accelerator et ses membres ont travaillé en lien avec la Commission européenne sur le volet numérique du Plan d’action européen pour l’ESS et ses déclinaisons, car Bruxelles a compris qu’il s’agissait là d’un levier incontournable pour la transition environnementale et la préservation du modèle européen.
Social Good Week : mobilisons la créativité et la communauté des acteurs du numérique d’intérêt général pour proposer un autre modèle européen
En 2010, HelloAsso – plateforme d’utilité de crowdfunding citoyen et d’organisation communautaire pour les associations, lançait avec l’aide de ses partenaires le Social Good Day, inspiré du Social Good Summit de la Fondation de l’ONU. La journée se transforme en semaine en 2012 et, jusqu’en 2018, chaque année, l’écosystème du numérique et du monde associatif s’organise, partout sur les territoires, pour proposer des évènements de sensibilisation accessibles au plus grand nombre, encourager les initiatives de terrain pour un numérique d’intérêt général et la valorisation des initiatives citoyennes. En 2018, la dernière édition a réuni plus de 5000 participants.
En 2022, HelloAsso passe le relais au Social Good Accelerator, think et do tank européen pour le numérique social et solidaire. L’économie sociale est à un tournant historique, à la convergence des transitions économiques, écologiques et numériques. Partout sur le continent, les initiatives fondées sur l’idée de souveraineté, d’ouverture, d’économie générative, d’écoconception et d’inclusion naissent, essaiment et ne demandent qu’à changer d’échelle. La Social Good Week européenne, qui se tiendra du 2 au 8 novembre 2022 dans 5 pays, a pour ambition de devenir le grand rendez-vous annuel des acteurs du numérique d’intérêt général en Europe. Rejoignez le mouvement !
À propos de la Social Good Week
Lancée en 2010 par HelloAsso et désormais impulsée par le Social Good Accelerator, la Social Good Week prend une dimension européenne en 2022 avec une ambition : mettre en lumière et en synergie les modèles numériques solidaires, durables et inclusifs. Jusqu’en 2018, 122 organisations participantes dans 20 villes en France ont organisé plus de 100 événements pour environ 5000 participants. En 2022, le Social Good Accelerator et ses membres – dont HelloAsso, microDON, ESS France, la MedNum, Bayes Impact, ShareIT, Fantastique Bazar, la Fonda, relancent le dispositif et l’européanise. Une trentaine d’événements sont organisés dans 5 pays. Vous pouvez retrouver le programme ici.
La cérémonie de lancement aura lieu mercredi 2 novembre à 19h à l’Académie du Climat à Paris. Au programme, un ensemble de tribunes d’entrepreneurs et une conférence qui rassemblera Axelle Lemaire (marraine du Social Good Accelerator, ancienne Secrétaire d’Etat chargée dy numérique, Directrice Innovation Transformation et Impact de la Croix Rouge française), Benoît Hamon (Ancien ministre à l’ESS, CEO de l’Association SINGA), Pierre-Louis Rolle (Directeur Stratégie et Innovation, Agence Nationale de Cohésion des Territoires) et Mary Lisa Durban (Directrice Europe de la Fondation Orange). Pour s’inscrire.
La cérémonie de clôture aura lieu le 8 novembre 2022 au Parlement européen à Bruxelles avec David Cormand (Député européen EELV), Barbara Trachte (Secrétaire d’Etat à la transition économique, Région de Bruxelles Capitale), Anna Athanasopoulou, Chef d’unité – Proximité, économie sociale et industries créatives à la Commission européenne, Brieuc Van Damme (Administrateur de la Fondation Roi Baudouin), Antonio Tiani (Directeur SocialWare / TechSoup Benelux), Adrien Duguet (Association européenne des Civic Tech). Pour s’inscrire.
À propos des organisateurs – Social Good Accelerator &Cie
Le Social Good Accelerator est un think & do tank européen qui souhaite développer, défendre et promouvoir les modèles numériques de l’Economie sociale et solidaire.
Notre mission : « Développer un modèle numérique européen solidaire, durable et accessible à toutes et à tous en accélérant la transition numérique de l’économie sociale et de la Social Tech. » Notre association vise à renforcer l’économie sociale et la société civile grâce aux biens communs numériques et à la mise à l’échelle des technologies sociales européennes.
Né en 2017 et fédéré en association en 2018, le mouvement part d’un double constat : d’une part, la transition numérique des organisations de l’Economie sociale n’est pas suffisamment prise en considération et les modèles numériques alternatifs de l’Economie sociale peinent à émerger. D’autre part, les modèles numériques de l’ESS représentent pourtant une troisième voie pour l’innovation et la compétitivité européenne centrées sur les valeurs démocratiques, la justice sociale et l’environnement.
A ce jour, l’association est composée de 72 membres – entreprises, organisme à but non lucratif, et individus.
Source : usbeketrica.com
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Pour le fond, je dis bravo, mais pour l’étiquette “social tech”, quelle horreur !
Pionniers, fondateurs, outre chose pour les petits derniers, mais certainement pas jambe de bois pour grands malades…
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Cet article me fait penser à celui-ci, dans lequel Molly White “s’inquiète” de confier à des entrepreneurs de la Big Tech le soin de développer un Web 3.0.
Et bien perso, en lisant l’article sur les Social Tech dont il est question ici, je “m’inquiète” en voyant les noms et qualités des gens associés aux développement de l’ESS.
@duJambon a dit dans Pour une accélération du numérique d’intérêt général en Europe :
Pionniers, fondateurs, outre chose pour les petits derniers, mais certainement pas jambe de bois pour grands malades…
Ca t’embête d’expliquer un peu ? J’ai pas compris ce que tu voulais dire
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@Pollux Je crains aussi le détournement des bonnes intentions par les nouveaux venus…
Je corrige: Pionniers, fondateurs, ET Autre chose pour les petits derniers, mais certainement pas jambe de bois pour grands malades (SOCIAL TECH)…
La tête va plus vite que les doigts
Pour moi, le web 1.0 c’était l’ère du partage désintéressé (je ne parle pas que de warez), le 2.0 la reprise en main par toutes sortes de groupes d’intérêt (financiers, politiques et autres truands), quant au 3.0, je ne sais pas ce que ce sera (peut-être l’ère du flicage ?), mais on ne va pas vers le meilleur.
Quant à l’invention du “réseau social”, c’est le plus beau moyen de contrôle depuis l’invention de la presse et de la télévision…