La précision des images des satellites commerciaux américains n’est plus bridée
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La NOAA revient sur sa politique de régulation très restrictive du marché de l’imagerie satellitaire décidée en 2020. Elle bridait les offres américaines à l’exportation dans un secteur de plus en plus compétitif.
Les entreprises américaines du secteur de l’imagerie spatiale ont poussé un « ouf » de soulagement au début du mois d’août. La National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA), qui est chargé de réguler aux États-Unis le marché des images satellitaires, a décidé le 7 août dernier d’assouplir les règles de commercialisation des images satellites par des entreprises américaines établies trois ans auparavant.
La réglementation établie en 2020 avait été mise en place en réponse à une directive de régulations de l’utilisation commerciale prise par la Maison blanche en 2018 sous Donald Trump. Celle-ci avait pour but de bloquer la vente à l’étranger de l’accès à des données précises qui portaient un risque pour la sécurité nationale.
Mais depuis, la concurrence internationale s’est accrue et des images satellitaires de plus en plus précises sont proposées par des entreprises non américaines, à commencer par le Français Airbus, mais aussi par la Chine.
Changement de cap de la politique américaine
Depuis 2020, les entreprises américaines qui commercialisaient des images satellitaires étaient soumises à de lourdes démarches administratives ainsi que des conditions très strictes pour nouer des contrats avec des entreprises étrangères.
Ainsi, pour protéger la sécurité nationale américaine, les systèmes d’imageries satellitaires commerciaux américains sont divisés en trois niveaux de licence.
Le premier niveau désigne les systèmes dont la collecte fournit une qualité de données déjà disponibles ailleurs et potentiellement par des concurrents étrangers. Le deuxième réunit les solutions agréées par la NOAA qui proposent le même genre de données. Et le troisième niveau regroupe les solutions américaines qui proposent une qualité de données exclusive.
D’après un document publié par la NOAA (PDF), 71 systèmes commerciaux américains sont labellisés au niveau 1, 23 au niveau 3 et aucune au niveau 2.
La règlementation du troisième niveau était très stricte et empêchait, dans les faits, la commercialisation de ces technologies et l’industrie américaine ne profitait donc pas pleinement de son avance.
Des solutions non-américaines comme celle d’Airbus dans le « game »
Et cela laissait la place aux solutions non-américaines et en premier lieu à l’offre d’Airbus qui s’appuie sur la constellation Pléiades Neo. Celle-ci, malgré l’échec de Vega-C qui devait mettre en orbite les satellites Pléiades Neo 5 et 6, restait une des offres les plus compétitives avec une résolution de 30 cm et une capacité de revisite d’un point à observer toutes les 24h, comme on peut le voir dans un tableau comparatif figurant dans le document de la NOAA. On peut voir sur le site du constructeur français une image de l’île aux Oiseaux dans la baie d’Arcachon, par exemple, avec une résolution de 30 cm.
Dans ce tableau, les « meilleures » solutions américaines pouvaient descendre jusqu’à 25 cm de résolution. Mais dans la note de bas de page était précisé « Pour les meilleurs systèmes U.S., ce sont les paramètres de résolution sous licence qui sont indiqués, et non les performances réelles, qui peuvent être inférieures ».
Crédits : NOAA
La société américaine Maxar annonçait bien, en 2020, descendre à 15 cm de précision mais expliquait qu’elle y arrivait en post-traitant des données originellement acquise avec un système dont la précision était de 30 cm.
Mais en août, la NOAA a donc levé pas moins de 39 restrictions de ces licences créées en 2020 (sans spécifier la répartition entre les trois licences). L’agence explique que ces restrictions levées concernent notamment « l’imagerie globale pour certains modes d’imagerie », « l’imagerie non terrestre », ainsi que la possibilité de « revisite rapide » (le fait de pouvoir prendre des images d’un point très fréquemment). Elle a aussi supprimé toutes les conditions « relatives à l’imagerie par radar à synthèse d’ouverture (en anglais Synthetic Aperture Radar, SAR) en bande X ».
Umbra Space se dévoile
Le jour même de la levée de restriction, l’entreprise américaine Umbra Space a dévoilé les capacités réelles de ses satellites, proposant dès à présent une offre commerciale d’image par radar à synthèse d’ouverture d’une résolution de 16 cm. Son annonce est accompagnée d’une photo d’Honululu où l’on peut voir les détails du labyrinthe du jardin de l’ananas.
Crédits : Umbra Space
Le Vice-président de l’entreprise, Joe Morrison a publié un
sur X (ex-Twitter) libérant son enthousiasme et
que « pour la toute première fois, nous sommes désormais en mesure d’offrir notre gamme complète de produits de données à nos limites de résolution natives, y compris l’historique des phases, les données complexes et les données détectées » et ajoutant que « la résolution de 16 cm n’est que la partie émergée de l’iceberg… la prochaine année d’annonces de produits va être terriblement fun ».
Anticiper l’arrivée d’autres concurrents ?
Selon Intelligence Online, cette décision de la NOAA de relâcher les restrictions sur les offres américaines aurait été pressée par la peur de voir la Chine obtenir des marchés dans les pays asiatiques et moyen-orientaux, clients actuellement des groupes américains. Si le document de la NOAA affiche des résolutions de 50 cm pour les offres commerciales chinoises actuelles, « les autorités chinoises affichent 15 cm comme un objectif moyen terme ».
Du côté européen, l’échec de l’envoi par Vega-C des satellites Pléiades Neo 5 et 6 a douché un peu les futures ambitions commerciales. Airbus n’a pas communiqué sur un éventuel lancement d’autres satellites pour les remplacer, se bornant, le jour de la perte de ses satellites, à rappeler la résolution « exceptionnelle » de 30 cm.
La résolution commerciale d’Umbra Space de 16 cm est d’autant plus à saluer dans cet environnement, comparée à celles des solutions militaires. La série de satellites de la Composante spatiale optique (CSO) du programme d’armement français a une capacité de résolution actuelle, avec CSO-2 lancée en 2018, de 20 centimètres. Celle-ci devait être améliorée avec l’arrivée de CSO-3. Mais son lancement par Soyouz a été annulé à cause de l’invasion russe de l’Ukraine et le manque actuel de lanceur européen le repousse sine die.
Source : nextinpact.com
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@Raccoon Pour ce qui est des images en elles-mêmes, on a quasiment la même résolution sur google grâce au survol par avion (dans les zones civiles), c’est clair qu’ils n’avaient pas trop le choix, pour le reste des données (et la fraîcheur, genre après un séisme ou une innondation) par contre…