Les vieux programmeurs ont-ils encore des choses à apporter dans l'industrie du logiciel ?
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Oui, selon Mark Seemann qui estime que nous avons besoin aussi bien des jeunes que des vieux programmeurs
Dans les activités intellectuelles (comme le développement de logiciels), la jeunesse est souvent vantée comme la source de l’innovation. On est souvent confronté à des exemples comme celui d’Évariste Galois, jeune mathématicien, qui a fait toutes ses découvertes avant d’avoir 21 ans. Ada Lovelace qui avait environ 28 ans lorsqu’elle a réalisé ce qui est considéré comme le « premier programme informatique ». Alan Turing qui avait 24 ans lorsqu’il a écrit On Computable Numbers, with an Application to the Entscheidungsproblem. Ces exemples mondialement connus contribuent à opposer l’idée selon laquelle le monde n’a besoin que de jeunes programmeurs. Mais qu’en est-il réellement ? Le monde du logiciel peut-il se passer des programmeurs âgés ? Les vieux programmeurs ont-ils encore des choses à apporter dans l’industrie du logiciel ? Mark Seemann, programmeur indépendant et architecte logiciel vivant à Copenhague, tente de répondre à ces questions dans un billet de blogue.
Dans la société actuelle, les clichés admis sont tels que l’on associe la jeunesse à la vigueur, la force, la beauté et bien d’autres qualités désirables, rapporte Seemann. Dans le monde de la programmation, cette appréciation des choses est quelque peu répandue, et pour cause. En tant que jeune développeur, lorsque vous entrez nouvellement dans le monde de l’entreprise, la première des choses est d’apprendre afin d’acquérir les connaissances pour être performant et utile à l’entreprise qui vous a ouvert ses portes. Ce chemin qui ne se fait pas en un jour nécessite de travailler dur et parfois même sans compter les heures passées à chercher les solutions pour faire face aux problèmes rencontrés. Sur cette base, et dans le meilleur des mondes, la soif d’apprendre et de maîtriser rapidement les subtilités de la programmation sera un facteur de motivation qui poussera les jeunes développeurs à aller au-delà de leurs limites afin de faire leurs preuves. Bien évidemment, demander à un développeur sénior d’enchaîner des crunchs là où ses droits lui donnent la possibilité de refuser sera difficilement acceptable par ce dernier contrairement au jeune développeur qui pourra aisément le faire, souligne Seemann. Et d’ajouter que les entreprises, étant en quête de ressources exploitables à souhait et facilement manipulables, se tourneront donc bien évidemment vers cette catégorie de travailleurs pour être plus compétitives.
Selon Seemann, une autre raison qui pousse les entreprises à préférer parfois les jeunes développeurs au détriment des anciens est que cette motivation pour les jeunes à travailler sans relâche les mènera dans un nombre restreint de cas dans des régions nouvelles de l’innovation et à réussir l’impossible. Les exemples cités plus haut en sont l’illustration. Enfin, deux autres raisons non négligeables mises également au sujet de la préférence des jeunes sont dans un premier temps leurs connaissances qui sont beaucoup plus récentes. En effet, dans le monde de la programmation qui est en constante évolution, avoir des jeunes développeurs qui ont déjà les bases sur des technologies récentes est un plus pour une entreprise. Celle-ci pourra capitaliser sur les acquis de ces derniers pour avancer dans ses objectifs plutôt que de chercher à convaincre des développeurs âgés à aller se former sur des technologies nouvelles. Le second argument généralement mis en avant est le coût du développeur. Étant donné que les entreprises cherchent à réduire au maximum les charges, avoir des développeurs qui coûtent moins cher et qui peuvent leur permettre d’atteindre leurs objectifs fera de ces derniers des cibles de choix pour les entreprises.
Présenté ainsi, l’on pourrait conclure que les développeurs âgés n’ont plus rien à apporter dans le monde de la programmation. C’est même devenu un folklore qu’après l’âge de 35 ans les travailleurs sont considérés has been, déplore Seemann. Mais qu’en est-il réellement ? Les développeurs âgés n’ont-ils effectivement plus rien à apporter dans l’industrie du logiciel ?
Dans notre culture glorifiant la jeunesse, nous avons tendance à rejeter l’opinion et les expériences des personnes âgées, soutient l’architecte logiciel. Mais c’est cette expérience dont les entreprises ont besoin pour encadrer les jeunes lorsqu’ils débarquent nouvellement en entreprise, rappelle Seemann. Aussi, même si les développeurs âgés qui sont encore en entreprise seront moins enclins à repousser leurs limites, car estimant qu’une chose est impossible à faire en raison de leur expérience, cette même expérience leur permettra par ailleurs d’être plus efficaces que les jeunes dans la recherche de solutions pour faire face aux problèmes rencontrés. De même, face à l’argument des connaissances récentes qui est associé aux jeunes développeurs, il faut noter que dans certains secteurs d’activité comme les banques, les développeurs séniors sont fortement demandés pour gérer du code hérité écrit dans des anciens langages comme COBOL. Enfin, souligne l’architecte logiciel âgé de plus de 50 ans, et qui entend encore travailler pendant plusieurs années, l’industrie du logiciel a encore besoin des vieux développeurs. Entendez également par vieux développeurs, les personnes proches de la retraite ou ceux qui sont déjà à la retraite. En effet pour Seemann, cette catégorie de personnes n’a plus vraiment rien à perdre et donc peut parler plus librement que les jeunes qui sont encore soumis à des contraintes liées à leur carrière.
Au cours des deux dernières années, raconte Seemann, à plusieurs reprises des livres ont été édités et ont dénoncé au Danemark des faits comme les conditions déplorables du fisc, la situation au ministère de la Défense, etc. Ce qui ne change pas dans la majorité des cas, c’est que ces livres sont généralement écrits pas un professeur émérite ou un chef de département à la retraite. Ce n’est pas qu’ils ont eu une révélation après leur retraite. Ils savaient tout sur la pourriture du système dont ils faisaient partie pendant qu’ils en faisaient partie, mais ils avaient trop à perdre, avance Seemann. Aussi, fait-il remarquer, lorsque les gens prennent leur retraite, la menace de se faire virer disparaît. Les personnes âgées peuvent parler librement à un degré que la plupart des autres personnes ne peuvent pas. Ainsi, si un développeur que vous admiriez auparavant prend sa retraite et se met soudainement à dire ou à écrire des choses désagréables et surprenantes, il pourrait y avoir une bonne explication, et il serait peut-être bon d’y prêter attention, conclut l’architecte logiciel.
Sources : Blog Mark Seeman, developpez.com
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Fin des années 90 c’était déjà le bronx, à s’arracher des dév COBOL pour les banques avant “le bogue de l’an 2000”. 20 ans plus tard, y’a toujours des dév de 50/60 piges qui doivent basculer des applicatifs COBOL vers autre chose…