[Critique] Top Gun: Maverick
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Ce n’est pas tous les jours que nous célébrons le triomphe commercial d’un blockbuster hollywoodien. Mais la suite de Top Gun s’élève bien au-delà du niveau d’une simple séquelle en mode fan service…
Les premières images de Top Gun: Maverick inquiètent : alors que retentit le thème de Harold Faltermeyer puis la chanson Danger Zone, on assiste à un montage où des avions décollent en rugissant, exactement comme au début du premier opus. Serait-on face à un revival régressif boosté au fan service ? La scène suivante rassure immédiatement : ces images tournent en fait en boucle dans la tête de Pete « Maverick » Mitchell, qu’on découvre au milieu des reliques de son passé - les photos de visages familiers punaisées au mur, son blouson d’aviateur, ses Ray-Ban, sa Kawasaki… Maverick refuse de vieillir, mais au fond, que reste-t-il de sa jeunesse ? Goose est mort, Iceman est en train de crever d’un cancer. Seul Maverick est encore là, lui qui ne s’est jamais pardonné la mort de son partenaire et refuse de lâcher le manche face à des hauts gradés qui voudraient le mettre à la retraite pour le remplacer par un drone.
Maverick est un dinosaure, un putain de boomer, et l’heure de l’extinction a sonné. « Peut-être, mais pas aujourd’hui » rétorque t-il à sa hiérarchie. Le parallèle saute aux yeux : Top Gun: Maverick n’est pas seulement un film avec Tom Cruise, c’est aussi et surtout un film sur Tom Cruise. Un homme qui, comme Maverick, refuse de raccrocher et prend des risques insensés dans l’exercice de sa profession, quitte à frôler la mort. Le mythe d’Icare est au cœur du long-métrage et de la carrière de Cruise, et on ne sera guère étonné d’apprendre un jour qu’il s’est brûlé les ailes lors d’une cascade de trop… « Ce n’est pas ce que je suis, c’est qui je suis » lance Maverick en parlant de son métier d’aviateur. Cruise, dont on sait qu’il travaille comme un enragé, ne se confond-il pas lui-même avec son métier ? On a coutume de dire que Nicolas Cage est le plus fou des acteurs de Hollywood, mais le vrai dingue n’est autre que Tom Cruise.
Only the brave
Tony Scott n’étant plus là pour dompter la bête, Joseph Kosinski, qui connaît l’acteur pour l’avoir dirigé dans Oblivion, est chargé de cette délicate mission. Mais ce n’est pas pour cette raison qu’il s’avère être un choix idéal. Car le cinéaste a également signé il y a cinq ans un long-métrage passé à ce point inaperçu qu’il n’a même pas été distribué au cinéma en France, alors qu’il s’agit d’un des spectacles héroïques les plus réussis des années 2010 : Line of Fire. Un film qui s’intéresse à une brigade de pompiers spécialisés dans les feux de forêt, avec en tête d’affiche Josh Brolin et deux futurs acteurs de Top Gun: Maverick : Jennifer Connelly dans le rôle de sa femme et Miles Teller dans celui de son fils spirituel.
Une œuvre à l’ancienne qui parle de bravoure, de camaraderie, de paternité, de l’esprit de sacrifice, du sens du devoir, de la mort… Des valeurs et des thèmes chers au cinéma de John Ford, Howard Hawks et Raoul Walsh, et qu’on retrouve au cœur du nouveau Top Gun, qui s’impose par extension comme l’héritier direct d’un autre grand classique du cinéma américain, L’Étoffe des héros : la présence d’Ed Harris, les traits communs entre Maverick et Chuck Yeager, les femmes fortes jouées par Jennifer Connelly et Barbara Hershey…
Là réside la grande surprise de Top Gun: Maverick : alors qu’on s’attendait à un blockbuster explosif à la mise en scène clinquante, Kosinski livre un fiim humble, à hauteur d’hommes, certes spectaculaire mais jamais dans l’esbroufe ni dans la performance gratuite. Une approche qui s’étend jusqu’au score de Hans Zimmer et au très beau thème signé Lady Gaga. Ce ne sont pas les dogfights qui définissent le film, mais ses personnages. Autour de Maverick gravitent des fantômes qui prennent chair.
Goose se réincarne chez son fils Rooster (Miles Teller, impeccable), qui oublie sa rancœur et devient un homme en retrouvant une figure paternelle. Penny (Connelly), l’ex de Maverick, soigne ses blessures et trouve l’âme sœur. Iceman s’en va mais ressuscite à travers Hangman (Glen Powell, découvert chez Ryan Murphy), un jeune pilote plein de morgue. Et Maverick, qui est lui-même un fantôme parmi les fantômes, finit par accepter de vieillir et de vivre au sens propre du terme en trouvant une famille recomposée reflétant celle de son passé. Pas question d’« hommes déconstruits », mais de reconstruction.
Right stuff
Malgré l’affection nostalgique qu’on lui porte, le Top Gun de Tony Scott n’était pas à proprement parler un très bon film. Sa suite, elle, possède une âme véritable. Paradoxalement, Maverick permet de revoir l’original d’un œil plus bienveillant puisqu’il ranime les éléments les plus intéressants de son ainé. Impossible de ne pas être profondément touché par la scène où Maverick retrouve Iceman, d’autant que comme son partenaire, Val Kilmer joue son propre rôle, celui d’un Apollon au charisme solaire devenu un vieil homme malade et handicapé, mais dont le regard n’a rien perdu de sa vivacité malicieuse. Un homme s’éteint, tout un monde s’en va avec lui et c’est à ce moment que Maverick comprend comment agir pour se sauver lui-même.
Si cette modestie dans la mise en scène des moments émotionnels est au cœur de la réussite du film, Kosinski n’oublie pas pour autant que son Top Gun est un divertissement destiné aux fans (les rappels de l’original sont légion, mais fort bien intégrés car cohérents d’un point de vue narratif) : il est aussi là pour en mettre plein la vue. À cet égard, la mission finale est un tour de force immersif, avec des avions qui slaloment tels des X-Wings dans des montagnes enneigées et un souci constant de coller aux personnages jusque dans leur cockpit. Kosinski prend ainsi soin de montrer l’épreuve physique que ces derniers traversent là où l’original ne jouait que sur l’apparence et jamais sur le ressenti.
Grâce à un montage d’une précision mathématique, la topographie de la bataille est toujours limpide, et tous les pilotes parviennent à exister, même si l’on regrette un peu que Hangman ou Phoenix, la seule fille de l’équipe, ne soient pas un peu plus développés. Sans doute dans le but de laisser du champ à la romance presque adolescente entre Maverick et Penny et à sa relation tumultueuse avec Rooster…
Autre homme clé de l’affaire, le scénariste Christopher McQuarrie (auteur du script de Usual Suspects et réalisateur de Mission: Impossible - Fallout) fignole des dialogues bien sentis («Mon père vous faisait confiance. Je ne commettrai pas la même erreur ») et offre dans le dernier acte un rebondissement inattendu en déplaçant l’action de l’air au sol, rendant ainsi hommage à deux pépites oubliées des années 1980, Firefox : l’arme absolue du grand Clint et Aigle de fer de Sidney J Furie.
N’en déplaise à ceux qui accusent le film de « masculinité toxique » sous prétexte qu’il met en vedette des mâles hétéros blancs (militaires de surcroît, quelle horreur !), Top Gun: Maverick est un blockbuster d’une noblesse rare qui redonne foi dans le cinéma hollywoodien mainstream, un spectacle enivrant dont on ressort ému et comblé, Cruise livrant au passage sa meilleure interprétation depuis La Guerre des mondes. « Il est temps de lâcher prise » écrit Iceman à son ami. « Je ne sais pas comment faire » lui répond Maverick. Tout est dit.
Par Cédric DELELÉE
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vu deux fois dans une super salle, je l’attends en BR avec impatience pour le voir encore 10 fois lol
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@mister158 Hé ben ! Ça doit vraiment valoir le coup alors…
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Je l’ai adoré au ciné et vivement de le revoir chez moi avec le système de son
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Vous me faites monter la hype les gars
De plus je trouve cette critique très bien écrite et pertinente dans ses arguments.
Vivement
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Perso je suis hypé
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Mais c’est un film de ouf mon pote, alors il faut oublier le coté très américain c’est sûr mais le reste … c’est ouffissime.
Imagine qu’à chaque fois que l’avion prends 7g tu es avec le pilote qui n’est autre que l’acteur !!!
imagine qu’il y a des go pro partout où on peut les loger !!!
le son évidement est extrêmement important d’où l’intérêt de le voir dans une bonne salle.
après ben évidement c’est tom cruise qui gagne à la fin …
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@mister158 a dit dans [Critique] Top Gun: Maverick :
après ben évidement c’est tom cruise qui gagne à la fin
Ah ben merde ! tu m’as gâché la “surprise”.
Quand je pense qu’à une certaine époque le suspens ne se devait qu’à la couleur des fils et des boutons. (le fil rouge sur le bouton rouge…)