[Critique] Nosferatu : Le comte des comtes
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Après nous avoir douchés avec The Northman, le réalisateur de The Witch s’attaque enfin au projet qu’il fantasmait depuis des années et dévoile une œuvre d’art captivante, bien partie pour s’inscrire dans l’hstoire du cinéma fantastique au même titre que les classiques dont elle sinspire.
Petit rappel historique pour les plus jeunes de nos lecteurs : en 1922, soit vingt-cinq ans après la première publication de Dracula, Friedrich Wilhelm Murnau adapte le roman de Bram Stoker sous le titre Nosferatu, les ayants droit de l’auteur ayant refusé de lui céder ceux du livre. Ainsi, le comte Dracula, Mina Harker et son mari Jonathan deviennent respectivement le comte Orlock, Ellen Hutter et Thomas Hutter. Pionnier de l’expressionnisme allemand, Murnau signe un classique du muet célébré par les surréalistes et qui sera ressuscité à de nombreuses reprises avec différents accompagnements musicaux, de Hans Erdmann pour l’original à Christopher Young (Hellraiser) en passant par James Bernard, le compositeur des Dracula de la Hammer. C’est en 1979 que Werner Herzog, compatriote de Murnau et auteur adulé pour Aguirre, la colère de Dieu, s’attaque à un remake coproduit par la France.
Intitulé Nosferatu, fantôme de la nuit, interprété par Klaus Kinski et Isabelle Adjani, le résultat est une pure merveille, un cauchemar à l’atmosphère fascinante. Que Robert Eggers se lance aujourd’hui dans son propre Nosferatu n’a rien de très surprenant : il aime profondément les deux films, et sa filmo semble l’avoir prédestiné à une telle aventure tant on retrouve chez lui les influences conjuguées de Murnau et Herzog, particulièrement criantes dans The Witch et The Northman (sans oublier celle de Zulawski, mais nous y reviendrons). La plus grande difficulté d’une nouvelle adaptation d’un roman/film éreinté jusqu’à plus soif résidait dans le risque que le public trouve ça plus poussiéreux qu’effrayant, d’autant plus qu’il n’est pas question ici pour le réalisateur d’en proposer une version contemporaine mais bel et bien un récit à l’ancienne. Un obstacle a priori insurmontable, que Eggers parvient pourtant à franchir avec une économie de moyens assez renversante - mais une densité thématique qui fait de Nosferatu une œuvre tout à fait moderne et dans l’air du temps, sans qu’un seul instant cela ne semble forcé.
COMTE À REBOURS
Dès le prologue, qui n’existait pas dans les versions précédentes, Eggers annonce la couleur : le personnage principal, ce n’est pas Nosferatu, mais Ellen. D’emblée, il fait donc d’une victime une héroïne dont le parcours va définir l’identité même du film. Quant à Orlok, loin d’être dépeint de façon romantique en tant qu’âme damnée éprise de la réincarnation de son amour perdu, c’est un monstre vorace et un prédateur sexuel. Ici, les séquences où il se repaît de ses victimes sont filmées comme de véritables scènes de viol, y compris lorsqu’il s’en prend à Thomas, séquestré dans son château.
Cette crudité inédite vient renforcer l’autre atout majeur du film, à savoir son étrangeté. Celle-ci passe aussi bien par le choix des cadres que par celui des postures, des directions de regards et des déplacements des acteurs à l’intérieur de ces mêmes cadres (Barry Lyndon n’est pas loin), au point que leur chorégraphie donne une impression de fluidité héritée du ballet, d’une danse de mort qui parfois se désarticule sans prévenir pour s’immobiliser dans des tableaux de maître figés pour l’éternité.
La photographie, d’une beauté spectrale renversante (on pense à celle d’Elephant Man), et la reconstitution d’époque au diapason apportant une touche de classicisme très british, Eggers atteint une sorte de perfection formelle excentrique et presque zulawskienne qui, drapée dans la partition ténébreuse de Robin Carolan, crée peu à peu une sensation de rêve éveillé de plus en plus angoissante. Quand on réalise qu’Eggers nous a pris au piège, il est trop tard: la peur s’est installée pour ne plus nous quitter et le malaise est tangible.
Nosferatu n’est pas un film confortable : c’est un film bizarre tout en restant le plus accessible de son auteur depuis The Witch, un conte gothique pour adultes dont la dimension sexuelle est aussi démonstrative et bestiale que dans le sublime Dracula de Coppola, mais de façon beaucoup moins fantasmatique. Il n’est pas question ici de plaisirs interdits qu’on épouse avec avidité, mais d’agression et de possession, ce qui nous vaut une scène prolongeant l’une des plus mémorables de The Witch, à ceci près que la proie du Mal n’est plus un enfant innocent mais une jeune femme à l’âme torturée.
L’HISTOIRE D’ELLEN H.
Ellen Hutter, puisque c’est elle, fait battre le cœur du film et dresse un pont entre l’époque où l’histoire se déroule et celle où on nous la raconte : elle a tout de la jeune fille en détresse telle qu’on peut en trouver dans les romans victoriens, mais elle fait preuve d’une bravoure insensée et d’une a*négation qui la pousse à se sacrifier pour sauver ceux qu’elle aime… et, plus largement, le patriarcat que représentent les figures d’autorité masculines qui l’entourent. Ellen est une force de la nature qui, après un temps de sidération, se bat comme une lionne face à un être contre-nature.
Pour camper un personnage de cette trempe, il fallait une comédienne prête à se mettre en danger et Lily-Rose Depp envoie valser tous les doutes qu’on pouvait formuler à son égard : déjà impressionnante en pop star manipulée dans la série The Idol, elle est ici exceptionnelle d’intensité et d’émotion. Par la force des choses, on pense à Adjani chez Herzoeg ou dans Possession de Zulawski, mais aussi plus volontiers à son rôle d’amoureuse érotomane dans L’Histoire d’Adèle H., un des plus méconnus et des plus beaux film de François Truffaut.
La jeune actrice investit d’ailleurs tellement l’écran que ses partenaires masculins semblent parfois manquer de chair, à l’exception du toujours impeccable Willem Dafoe et de Bill Skarsgärd. La silhouette décharnée de ce dernier, ainsi que son regard hypnotique et sa voix sépulcrale produisent leur petit effet, même si l’acteur suédois est loin de posséder l’aura maléfique de Max Schreck et Klaus Kinski. On pourra également reprocher au film de dérouler un récit sans surprise : en effet, on connaît déjà l’histoire par cœur et presque rien ne vient la faire dévier de son cap, mais Eggers fait de ces passages obligés (le voyage de Thomas en Transylvanie et son arrivée au village, son séjour dans le château, la traversée du navire avec Nosferatu à son bord, les visites du vampire dans la chambre d’Ellen, les premières lueurs de l’aube qui le frappent…) de véritables trésors esthétiques aux ambiances envoûtantes.
À l’heure où ces lignes sont écrites, nous n’avons eu accès qu’aux premières réactions de la critique US et sommes donc très curieux et impatients de savoir quel sort va réserver le public à ce film à la fois classique et singulier. Le Dracula de Coppola, dont on retrouve parfois chez Eggers le côté volontairement artisanal et la théâtralité presque japonaise, avait remporté un succès inattendu auprès de spectateurs pourtant peu portés sur le fantastique, a fortiori « auteurisant ».
On souhaite la même chose à Nosferatu, qui n’est pas seulement un superbe film d’épouvante soutenu par une performance d’actrice sidérante mais aussi l’accomplissement du projet rêvé d’un auteur qu’on croyait avoir perdu avec The Northman.
Sans vouloir prêcher pour notre paroisse, il ne fait désormais plus aucun doute que le cinéma d’horreur connaît une période de renouveau qui en fait définitivement le genre le plus stimulant du cinéma actuel.
– Par Cédric Delelée
– Mad Movies #388–> rhaaaaaaaaaaaaaaaaaaa, que ça donne envie ^^
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2 genres que j’aime très particulièrement :
Les Zombies et les Vampires ^^ (contrairement aux films avec des maisons hantées ou de démons vengeurs ) donc ce Nosferatu, je l’attend de pied ferme (je parle du film bien sûr ). -
@Psyckofox a dit dans [Critique] Nosferatu : Le comte des comtes :
je l’attend de pied ferme (je parle du film bien sûr ).
Punaise pareil. J’adore tout ce que touche Eggers.
La photographie et le jeu sur les ombres ont l’air d’être à tomber par terre.
EDIT:
Puis Mlle DEPP est une très bonne actrice. Elle m’a bluffée dans la série The Idol
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@Psyckofox je connais mon planning du 25 au soir
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T’as de la chance…moi je vais me coltiner un voyage familial de plusieurs centaines de km qui va me gazer comme pas possible
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Bonsoir, rien n’égale Nosferatu le vampire de 1922, film muet en N&B réalisé par F. W. Murnau. Le top, en version allemande restauré en 2006 disponible sur Darkiworld. Bon film à tous. @+.
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@Psyckofox a dit dans [Critique] Nosferatu : Le comte des comtes :
T’as de la chance…moi je vais me coltiner un voyage familial de plusieurs centaines de km qui va me gazer comme pas possible
Yes c’est clair. Moi le seul repas qui me gaze est en train de se terminer !
J’ai beau aimé l’original, cette version est plus que bienvenue.
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@Violence a dit dans [Critique] Nosferatu : Le comte des comtes :
Moi le seul repas qui me gaze est en train de se terminer !
Purée la chance , mon calvaire n’a pas encore commencé pour ma part (4 jours à Bruxelles bordel…4 jours )
@Violence a dit dans [Critique] Nosferatu : Le comte des comtes :
J’ai beau aimé l’original
L’original a un côté glauque…il m’avait foutu le cafard mais dans le bon sens du terme ^^
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@Psyckofox a dit dans [Critique] Nosferatu : Le comte des comtes :
@Violence a dit dans [Critique] Nosferatu : Le comte des comtes :
Moi le seul repas qui me gaze est en train de se terminer !
Purée la chance , mon calvaire n’a pas encore commencé pour ma part (4 jours à Bruxelles bordel…4 jours )
@Violence a dit dans [Critique] Nosferatu : Le comte des comtes :
J’ai beau aimé l’original
L’original a un côté glauque…il m’avait foutu le cafard mais dans le bon sens du terme ^^
Oui oui l’original est très bien et je l’adore même, mais dépoussiéré un peu tt cela, je ne dis pas non…
Pour le HS Noël, moi vu le repas que je viens de passer, mon fils à quand même pleurer par rapport au cadeau de sa tante qui en à rien a péter de lui. Elle lui offre toujours des trucs de merde, soit pas complet, soit un truc Vinted dégueulasse, soit pas de son âge malgré nos recommandations.
Il est venu me voir en pleurant, il m’a dit: je peux lui rendre le cadeau? Je lui ai répondu: vas-y si tu veux mais tu te débrouille. Il est aller la voir et lui a rendu son cadeau lol… Intérieurement je riais fort… Putain Noël, c’est fait pour faire plaisir a tes enfants, neveux, de 6 ans (pour le plus grand), proches, pas les faire chialer !
Bref maintenant, se forcer pour ses gens là ou le mot famille ne veux plus dire grand chose, c’est terminé. Ma femme mes gosses, mes beaux-parents et rien d’autre.
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patricelg PW Addict DDL Rebelle Windowsien Ciné-Séries Cluba répondu à Psyckofox dernière édition par patricelg
@Psyckofox a dit dans [Critique] Nosferatu : Le comte des comtes :
2 genres que j’aime très particulièrement :
Les Zombies et les Vampires ^^ (contrairement aux films avec des maisons hantées ou de démons vengeurs ) donc ce Nosferatu, je l’attend de pied ferme (je parle du film bien sûr ).Pareil Alors, imagine toi être enfermé, seul, dans une cabane en haut des arbres entourés de zombies vampires possédés par des démons vengeurs
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@patricelg a dit dans [Critique] Nosferatu : Le comte des comtes :
zombies vampires possédés par des démons vengeurs
Et avec la ganache de Nosferatu
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Robert Eggers confirme une version longue de Nosferatu avec des scènes inédites
Robert Eggers, réalisateur de ce Nosferatu, a annoncé qu’une version longue de son film sera prochainement disponible. Cette édition spéciale inclura des scènes inédites, approfondissant l’ambiance et les personnages de cette réinterprétation du classique.
Eggers, connu pour son souci du détail et son esthétique singulière, promet de satisfaire les amateurs de son travail et les fans du mythe vampirique.
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