La matière noire pourrait être composée de fragments d'objets géants et exotiques, et les astronomes pensent savoir comment les détecter.
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Les recherches de particules de matière noire n’ont jusqu’à présent rien donné, ce qui pousse les théoriciens à faire preuve de plus de créativité dans leurs idées.
Des objets astrophysiques exotiques et sombres pourraient se cacher dans l’espace interstellaire, et une nouvelle proposition explique comment les trouver : les fixer très, très intensément.
Nous ignorons la nature de la matière noire, même si nous soupçonnons fortement son existence. Nous observons des indices indirects de son existence partout, de la vitesse de rotation des galaxies à la croissance des plus grandes structures cosmiques. Pendant des décennies, les cosmologistes ont pensé que la matière noire était une sorte de particule exotique, jusqu’alors inconnue du Modèle Standard de la physique des particules. Cette étrange particule n’interagirait ni avec la lumière, ni avec la plupart des autres éléments, si ce n’est par son influence gravitationnelle.
Mais jusqu’à présent, les recherches de ces particules de matière noire n’ont rien donné, ce qui pousse les théoriciens à faire preuve de plus de créativité dans leurs idées.
Il se pourrait que la matière noire ne soit pas composée de milliards de minuscules particules parcourant l’univers. Elle pourrait plutôt être constituée d’amas d’objets beaucoup plus massifs. Plus précisément, les chercheurs à l’origine d’une nouvelle étude, publiée en novembre 2025 sur le serveur en libre accès arXiv, ont examiné deux types d’objets exotiques.
La première est connue sous le nom d’étoile bosonique. Dans ce modèle, la matière noire est composée de particules ultra-ultra-ultra-légères — potentiellement des millions de fois plus légères que les neutrinos, les particules les plus légères connues. Elles seraient si légères que leur nature quantique leur donnerait l’apparence d’ondes à l’échelle galactique plutôt que de particules individuelles. Mais ces ondes pourraient parfois se condenser et s’agglomérer, se rapprochant par leur propre gravité, sans pour autant s’effondrer.
Une autre possibilité est celle des Q-balls. Dans ce modèle, la matière noire n’est pas une particule, mais un champ quantique qui imprègne tout l’espace-temps. Grâce à une propriété particulière de ce champ, il pourrait se fragmenter occasionnellement, créant ainsi d’immenses sphères stables qui errent dans le cosmos comme un grain de farine flottant dans une sauce mal mélangée.
Les étoiles de bosons et les Q-balls, qui font partie de la catégorie plus générale des objets astrophysiques sombres exotiques (EADO), sont difficiles à détecter. Elles sont grandes — de la taille d’une étoile environ — mais n’émettent pas de lumière propre, ce qui les rend presque invisibles lors de nos observations du cosmos.
Mais les astronomes ont découvert un mécanisme permettant aux EADO de révéler leur présence : la microlentille gravitationnelle. Si une étoile Q-ball ou une étoile bosonique passait entre nous et une étoile lointaine, la forte gravité de l’EADO transformerait la lumière de l’étoile en une lentille gravitationnelle. De notre point de vue, l’étoile semblerait alors se positionner brusquement, puis revenir rapidement à sa position initiale.
Il nous suffirait donc d’observer une multitude d’étoiles pendant une très longue période et d’espérer avoir de la chance. Heureusement, nous disposons de l’instrument idéal pour cela. La mission du télescope spatial Gaia était précisément celle-ci : observer une multitude d’ étoiles pendant une très longue période.
Les astronomes à l’origine de l’étude proposent une campagne d’observation des étoiles bosoniques (EADO) à partir des données de Gaia, en repérant leur signal unique et révélateur : des sauts brusques dans leur position. Selon leur nombre, Gaia pourrait avoir observé jusqu’à plusieurs milliers d’EADO.
Mais si elles n’existent pas, cette même campagne permettrait de limiter considérablement la contribution des Q-balls et des étoiles de bosons à l’ensemble des connaissances sur la matière noire. Quoi qu’il en soit, explorer l’obscurité nous apprendrait forcément quelque chose.
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Un peu long à lire mais très intéressant
