Le mot «woke» se transforme en «Ta gueule»
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Dans une société démocratique, on doit pouvoir débattre de l’égalité sans être renvoyé dans les cordes.
Un sondage Tamedia que nous avons publié en début de semaine montre que la Suisse est très loin d’idées qualifiées de woke. Mais au fait, c’est quoi, le wokisme? Le terme, qui trouve son origine dans le mot anglais «woke» (éveillé, en l’occurrence aux discriminations), est utilisé à tout-va sans qu’on se préoccupe vraiment de sa définition.
Parce qu’au fond, c’est souvent une façon policée, mais non moins violente, de disqualifier l’autre et de lui enjoindre de se taire. Une sorte de «Ta gueule» moderne, si vous me passez l’expression. Ou un processus de dé-légitimation de l’adversaire, comme le disait récemment sur France Inter Réjane Sénac, politologue et auteure de «L’égalité sans condition», dont l’interview a nourri cette réflexion.
Ce terme est une solution bien pratique, qui permet de tout mettre dans un même panier, alors qu’il y a là différents débats. Par exemple, on peut trouver limite de se peindre le visage en noir, mais ne pas voir de problème au fait qu’un musicien blanc arbore des dreadlocks ou apprécier de porter un kimono.
«Dès que ce mot à tiroirs est prononcé, chacun retourne dans sa tranchée. Qu’on se drape de vertu, de bon sens ou de provoc’, la guerre est ouverte.»
Mais qualifier l’autre de woke est l’argument du pauvre. Dès que ce mot à tiroirs est prononcé, chacun retourne dans sa tranchée. Qu’on se drape de vertu, de bon sens ou de provoc’, la guerre est ouverte. Le souci est qu’à ce stade, on perd de vue ce qui constitue le fond de la discussion pour se jeter à la figure des gros clichés. Dans lesquels, soyons francs, le politiquement correct reproché à certains n’a généralement plus sa place. Le choc des mots, sans le poids des idées.
Que la conversation tourne au vinaigre lors d’une réunion de famille ou d’une rencontre entre amis, c’est dommage. Que ce soit le cas dans le débat public, c’est bien plus regrettable. Parce qu’il est question d’égalité et de la façon de la promouvoir. Y a-t-il sujet plus légitime dans une société démocratique, qui défend ce principe à l’article 8 de sa constitution?
Indépendamment du fait qu’on soit d’accord ou pas avec une proposition, je trouve sain de remettre en question ce que l’on est, ce que l’on fait ou ce que l’on a fait, même si c’est parfois gênant. Et puis, on peut trouver l’idée naïve, elle n’en est pas moins à la base de notre démocratie semi-directe: c’est dans le compromis, dans l’échange, que se trouve la solution. Encore faut-il, pour cela, se parler.
Je ne me place pas au-dessus de la mêlée, il m’est arrivé d’utiliser des «termes guillotines». Car il y a des précédents. Bisounours, boomer… Ou encore ce «complotiste» un peu vite balancé à des personnes qui se posent des questions. La liberté d’opinion et d’expression, bien entendu, n’est pas sans limites et des principes comme la diffamation, l’insulte ou la haine raciale sont des bornes légitimes. Mais cela nous laisse de la marge.
Aujourd’hui, il est piquant de relever que certaines personnes qui brandissent le mot «woke» reprochent à leurs interlocuteurs de les museler, au nom de la lutte contre le racisme ou la transphobie. À ce stade, tous les arroseurs sont arrosés.
Source: https://www.24heures.ch/le-mot-woke-se-transforme-en-ta-gueule-678958469695
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@duJambon
Ta gueule !!! -
@BahBwah Y’a ça aussi: https://www.lefigaro.fr/sciences/que-cache-le-besoin-excessif-de-controle-20230528
Et plutôt que de prêcher une égalité toute théorique, le wokisme devrait plutôt prôner l’équité.
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Il y aurait donc des gens qui fuient le débat en se servant de “termes guillotines” ?
Décidément, on en apprend tous les jours !
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moi j’en ai un bien pratique
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Thomas Legrand avait fait une émission très instructive sur le wokisme (France Inter), facile à trouver avec votre moteur de recherche préféré. Après l’émission on avait l’impression d’avoir nettement progressé sur les définitions et les tenants et aboutissants.
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chacun chez soi et les moutons seront bien gardés !
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Ensemble luttons contre le wokisme