FTTH : des déploiements toujours au ralenti, qui « confirment l'échec annoncé du 100% FTTH en 2025 »
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L’Avicca en mode vénère
La semaine dernière, l’Arcep a mis en ligne son observatoire trimestriel sur les abonnements et le déploiement des marchés des communications électriques. L’occasion comme à chaque fois de faire un point d’étape sur le plan France THD. L’Avicca tire à boulets rouges : « les statistiques Arcep pour le deuxième trimestre confirment l’échec annoncé du 100 % FTTH en 2025 ». Ambiance.
19,8 millions de clients en FTTH
Au 30 juin 2023, le régulateur dénombre 32,1 millions d’abonnements internet haut et très haut débit sur le fixe, soit 65 000 de plus en trois mois seulement, contre 100 000 le trimestre précédent et 120 000 de mieux qu’il y a un an. Sur douze mois, ce sont seulement 357 000 abonnements supplémentaires, contre le double au deuxième trimestre 2022. « La croissance du nombre de ces abonnements continue de ralentir », conclu l’Arcep.
Sur les 32,1 millions, 22,9 millions profitent du très haut débit et 19,8 millions de la fibre optique de bout en bout (FTTH), soit un peu moins de 800 000 de plus qu’au premier trimestre. Comme c’est le cas depuis des mois, les abonnements xDSL (ADSL, VDSL2), coaxial, 4G fixe, THD radio et satellite sont en baisse.
36,16 millions de locaux raccordables
Un autre indicateur intéressant concerne le nombre de locaux raccordables à la fibre optique. Ils sont 870 000 de plus en trois mois (de 2019 à 2022 on dépassait le million sur cette période), pour arriver à un total de 36,16 millions (+13 % en un an).
On arrive donc à un total de 82,7 % de locaux éligibles au FTTH (sur les 43,751 millions de locaux recensés), soit 1,5 point de plus en trois mois. En plus du taux national, voici celui par zone (les calculs prennent évidemment en compte l’évolution du nombre de locaux de chaque zone dans le référentiel de l’Arcep) :
- Zones très denses : 91,7 % (+0,3 point) éligibles au FTTH
- Zones moins denses d’initiative privée : 88,3 % (-0,4 point) éligibles au FTTH
- AMEL : 59,1 % (+6,3 %) éligibles au FTTH
- Zones moins denses d’initiative publique : 74,7 % (+4 points) éligibles au FTTH
Les zones très denses toujours au ralenti
Trimestre après trimestre, l’Arcep fait un triste constat : « le rythme de déploiement dans les zones très denses demeure très insuffisant avec moins de 50 000 locaux rendus raccordables [47 000 pour être précis, ndlr], soit une baisse de près de moitié par rapport à la même période de l’année précédente ».
Dans les zones moins denses d’initiative privée aussi la chute est réelle et persistante : seulement 130 000 locaux supplémentaires ont été rendus raccordables. Dans les zones AMEL (appels à manifestation d’engagements locaux), la hausse est de 90 000 locaux. Enfin, ce sont une nouvelle fois les Réseaux d’Initiative Publique (RIP) qui drainent le gros des déploiements avec 600 000 locaux raccordables supplémentaires.
« Désintérêt total » des opérateurs en ZTD
L’Avicca ne décolère pas de la situation : « Sourds aux alertes du régulateur, de l’État et des collectivités, les opérateurs privés manifestent toujours leur désintérêt total pour les 106 communes de la zone très dense ». Elle rappelle s’il en est besoin que « les grands opérateurs nationaux – et pas uniquement Orange – se sont battus à l’époque pour obtenir ce classement et ont tout fait pour en écarter l’action publique », laissant donc entendre qu’ils n’ont aucune excuse pour ne pas déployer de réseau.
Orange en prend pour son grade. L’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel reconnaît qu’il « reste encore et toujours le seul opérateur à y déployer un tout petit peu de FTTH » – sur les 47 000 locaux, 43 000 sont déployés par Orange, le reste par SFR – mais ajoute que « sa volonté d’y fermer le cuivre est proportionnellement inverse au rythme de complétude des déploiements ».
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L’Avicca cite en exemples deux villes choisies « depuis plus d’un an comme territoire d’expérimentation de la fermeture du cuivre en ZTD : à Rennes, en 1 an, la complétude est passée de 92 à 93 % de raccordables ; à Vanves, sur la même période, elle est passée de 95 … à 94 % ! ».
Pour rappel, « la complétude est atteinte dès lors que l’ensemble des locaux sont raccordables ou, dans une faible proportion, « raccordables sur demande », sauf impossibilité dûment justifiée (par exemple, cas de refus des copropriétés ou propriétaires concernés) », explique l’Arcep.
L’Avicca cible tout le monde
« Je tiens à rappeler ici que le déploiement préalable et complet d’un réseau FTTH est un des critères principaux posés par le cadre de l’Arcep depuis décembre 2020 pour la fermeture du réseau cuivre », expliquait Laure de la Raudière (présidente de l’Arcep) fin 2022. À l’époque déjà, l’Arcep s’inquiétait d’une « baisse importante, voire inquiétante » des déploiements en zones denses… sans passer à l’action pour autant jusqu’à présent.
Pour l’Avicca, « la situation en zone AMII est désormais aussi caricaturale qu’en ZTD : les déploiements y avancent aussi lentement que la prise des décisions de l’Arcep, d’Orange et de l’État ». Chez Orange, environ 89 % de ces locaux sont raccordables, contre 95 % pour SFR. Des chiffres identiques à ceux du trimestre précédent.
Confirmation de « l’échec annoncé du 100 % FTTH en 2025 »
Pour enfoncer le clou, l’association explique que ces statistiques « confirment l’échec annoncé du 100 % FTTH en 2025 », qui est pour rappel le dernier jalon du plan France THD. « En toute logique, l’État devrait désormais annoncer une fin des déploiements FTTH au mieux en 2028 pour la zone privée. À défaut d’être une annonce agréable à entendre, cela aurait au moins le mérite de la franchise… ». Pour l’Avicca, le coupable est évident : « Complétude à 100 % de la responsabilité des opérateurs privés dans la non-atteinte de l’objectif 2025 du gouvernement ».
Un dernier mot enfin sur le 100 % FTTH : « Ne soyons pas plus bêtes que la moyenne : évidemment qu’on sait que le 100 % on ne l’atteindra jamais, mais on ne l’atteint avec aucun réseau. Déjà aujourd’hui, il y a des gens qui n’ont pas de filaire cuivre, ça existe. On ne va pas être plus malin avec la fibre, mais on ne doit pas être moins malin […] il y aura toujours des exceptions ou on utilisera des technologies alternatives. […] Pour quelques exceptions, on en fait quelque chose de plus important qu’il ne pourrait y paraitre », expliquait Patrick Chaize, président de l’Avicca. Problème, les « exceptions » sont actuellement bien trop nombreuses…
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Source : nextinpact.com