Impôts : les 6 chiffres fous sur la fraude fiscale en France
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Parce qu’elle est cachée, la fraude fiscale est, par nature, difficile à évaluer. Dans un rapport d’initiative citoyenne dévoilé le 15 novembre, la Cour des comptes donne quelques indications sur les montants en jeu et les efforts, chiffrés, déployés par l’administration pour la détecter.
Comment s’attaquer à un ennemi, connu, mais invisible ? C’est le casse-tête auquel fait face l’administration fiscale. Celle-ci sait que des contribuables violent délibérément la réglementation. Mais combien sont-ils et pour quels montants ? La Direction générale des finances publiques (DGFIP) tâtonne et a recours à plusieurs canaux pour prendre la main dans le sac les mauvais payeurs.
C’est en tout cas l’une des conclusions d’un rapport d’initiative citoyenne (1) publié le 15 novembre par la Cour des comptes . Centré sur la fraude fiscale des particuliers, il contient plusieurs chiffres quantifiant les efforts déployés et témoignant aussi du fait que l’administration navigue souvent à vue.
1. L’écart fiscal évalué entre 7 et 27 milliards d’euros
« Contrairement à de nombreux pays, la France ne dispose d’aucune évaluation rigoureuse de la fraude fiscale, ni même de l’écart fiscal », tel est le constat formulé par la Cour des comptes. Pour rappel, la fraude fiscale désigne le fait de violer délibérément la réglementation, notamment en omettant ou en dissimulant sciemment des revenus.
L’écart fiscal - c’est-à-dire la différence entre l’impôt devant être normalement payé et le montant réglé en réalité - est une notion plus large. Elle intègre la fraude fiscale mais aussi les erreurs des contribuables.
Ce travail d’évaluation, d’autres pays l’ont entrepris, souligne la Cour des comptes. En Estonie, l’écart fiscal serait le plus bas constaté et s’élèverait à 4,5 %. Il grimperait au maximum à 16,6 %, constaté aux Etats-Unis.
En transposant ce plus haut et ce plus bas à la France, le manque à gagner pour les recettes publiques serait évalué entre 7 et 27 milliards d’euros par an pour les seuls impôts à la charge directe des particuliers (impôt sur le revenu, impôt sur la fortune immobilière, droits sur les successions et les donations ou encore les impôts locaux). En prenant en compte tous les impôts perçus par l’Etat, la fourchette serait encore plus large et comprise entre 30 et 100 milliards d’euros.
2. Environ 3 milliards d’euros réclamés aux particuliers
« Les seuls montants connus sont ceux des sommes réclamées par l’administration fiscale après contrôle, soit 14,61 milliards d’euros au total en 2022, répartis entre 11,95 milliards d’euros d’impôts éludés et 2,66 milliards d’euros de pénalités », souligne la Cour des comptes. Ces mises en recouvrement émanent pour un cinquième des particuliers, correspondant donc à environ 3 milliards d’euros d’impôts et de pénalités supplémentaires à payer en 2022.
De fait, si la fourchette donnée pour l’écart fiscal de 7 à 27 milliards d’euros (hors pénalités) est véridique, peu ou prou entre 4,5 et 24,5 milliards d’euros échapperaient à l’administration fiscale chaque année au titre des seuls impôts des particuliers. Pour remise en contexte, les ménages se sont acquittés en 2022 de 160,74 milliards d’euros d’impôts directs, dont 93 milliards au titre de l’impôt sur le revenu (en tenant compte aussi des revenus de capitaux mobiliers).
3. 35.000 comptes étrangers passés au crible
Pour améliorer le repérage des fraudeurs, l’administration fiscale s’appuie notamment sur les données venant de l’étranger, dans le cadre des échanges internationaux automatiques d’informations à des fins fiscales. « Ces échanges automatiques sont intégrés dans les données de l’administration fiscale depuis 2017 pour les comptes bancaires détenus à l’étranger et les revenus perçus à l’étranger par des résidents fiscaux français », rappelle la Cour des comptes.
Depuis ce renforcement de la coopération internationale, « le nombre de situations fiscales étudiées à la suite d’échanges automatiques d’informations a […] été multiplié par 69 », peut-on lire dans le rapport. De 509 dossiers étudiés par la DGFIP en 2017, leur nombre est passé à 35.099 en 2021.
Pour rappel, ne pas déclarer un compte à l’étranger (y compris un simple compte de paiement ouvert dans une néobanque d’origine étrangère) expose le contribuable à une amende de 1.500 euros par compte non déclaré. Si le compte est situé dans un Etat qui n’a pas conclu avec la France de convention de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales, l’amende encourue est portée à 10.000 euros par compte.
4. 21,3 millions d’euros dépensés pour croiser les données
Pour détecter les fraudeurs fiscaux, l’administration compte aussi sur l’amélioration de ses outils informatiques. Plus précisément, elle a investi, depuis 2016, 21,3 millions d’euros dans le programme « Ciblage de la fraude et valorisations des requêtes » (CFVR). Il consiste à créer des infrastructures techniques et des algorithmes passant au crible les bases de données des administrations dans l’objectif de visualiser les anomalies et irrégularités fiscales et de proposer des programmations de contrôles.
D’abord utilisé sur les déclarations des entreprises, ce programme traite désormais aussi les imprimés fiscaux des particuliers. L’objectif asséné à ce datamining est important : porter d’ici à 2027 à 50 % , soit la même proportion que pour les entreprises, la part des contrôles fiscaux des particuliers initiés grâce à lui.
Plusieurs cas d’usage ont été testés. « Par exemple, un modèle de valorisation des cessions immobilières a été construit pour détecter les déclarations anormales par comparaison entre la valeur vénale estimée des biens, sur la base des données de l’année 2019, et la valeur déclarée par les particuliers », note la Cour des comptes. Pour quel résultat ? « Environ 16 % des dossiers soumis à ce modèle ont donné lieu à un avis d’imposition rectifié, pour un montant de droits rappelés et de pénalités de 49,3 millions d’euros », indique-t-elle.
Mais tout comme le chiffrage de la fraude fiscal est fastidieux, l’efficacité de ces algorithmes de détection automatique d’erreurs est difficile à mesurer, relève la Cour des comptes. « Les évolutions majeures ayant affecté la gestion des impôts des particuliers et singulièrement l’impôt sur le revenu au cours de la dernière décennie n’ont pas bouleversé l’ordre de grandeur des sommes réclamées par le fisc après contrôles », indique la Cour des comptes. Mais cela ne signifie pas que le recours à la technologie n’est pas pertinent, car en parallèle, le nombre de contrôles fiscaux a baissé, ce qui peut révéler que le ciblage des contrôles s’est amélioré.
5. 7.070 réductions et crédits d’impôts frauduleux évités
Mais l’informatisation n’apporte pas que du bon. Depuis la mise en place du prélèvement à la source et le prépaiement en janvier d’un acompte de 60 % au titre des réductions et crédits d’impôt, l’administration fiscale constate une augmentation des fraudes.
Si elle ne produit pas d’estimation, elle indique avoir empêché 7.070 virements suspects en 2022 pour un montant moyen de 5.000 euros, soit au total 35 millions d’euros de versements indus évités.
6. 3,4 millions d’euros versés aux « indics » du fisc
Les aviseurs fiscaux - c’est-à-dire les personnes dénonçant des opérations fiscales frauduleuses ou soupçonnées comme telles - sont une source efficace d’information pour les services fiscaux. En contrepartie, ces « indics » peuvent recevoir une indemnisation.
« Le rendement budgétaire du dispositif des aviseurs fiscaux est élevé », note la Cour des comptes. De janvier 2017 à septembre 2021, six aviseurs fiscaux ont permis le recouvrement de 110 millions d’euros. Et ils ont été indemnisés à hauteur de 1,8 million d’euros, soit une commission équivalente à seulement 1,5 % de l’impôt et des pénalités recouvrés. En 2022, trois autres informateurs ont permis à la DGFIP d’identifier de nouvelles fraudes, portant à 3,4 millions d’euros la rémunération des aviseurs fiscaux entre 2017 et fin 2022.
Neuf aviseurs rétribués, c’est toutefois peu au regard du nombre de signalements faits à l’administration. En six années, 446 dénonciations assorties de demandes d’indemnisation ont en effet été adressées. Toutes ne sont pas pertinentes. Mais le pourcentage de signalements justifiés, même non rétribués, n’est pas pour autant anecdotique. En effet, « les affaires ayant effectivement donné lieu à l’ouverture d’un contrôle fiscal se situent autour de 12 % en 2021 et de 11 % en 2022 », rapporte la Cour des comptes.
- (1) La plateforme citoyenne de la Cour des comptes et des Chambres régionales et territoriales des comptes permet à chacun de proposer des thèmes de contrôle et d’enquête pour les juridictions financières.
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Raccoon Admin Seeder I.T Guy Windowsien Apple User Gamer GNU-Linux User Teama répondu à Pluton9 le dernière édition par
@Pluton9 a dit dans Impôts : les 6 chiffres fous sur la fraude fiscale en France :
droits sur les successions
Qu’ils aillent taxer les voleurs que sont les généalogistes tel que Coutot-Roehrig, il y a des dizaines voire des centaines de millions d’euros à récupérer en plus d’empêcher ces bandits de grands chemins de dépouiller les gens.
@Pluton9 a dit dans Impôts : les 6 chiffres fous sur la fraude fiscale en France :
Mais l’informatisation n’apporte pas que du bon. Depuis la mise en place du prélèvement à la source
C’est pas franchement une réussite le prélèvement à la source. Même en ayant augmenter volontairement le taux de prélèvement je me suis encore retrouvé à payer une somme non négligeable cette année. J’aurais apprécié que le delta soit moins grand.
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Qu’ils s’occupent déjà des riches qui passent au travers avant de faire chier l’ouvrier qui galère en fin de mois