Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension !
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@michmich a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
@ALRBP a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
En Chine, encore une fois, la politique de sécurité fonctionne
On est d’accord, en France c’est un pansement peu efficace, en Chine c’est un système (suivi d’effets plus ou moins désirables).
Mais ce que décrit 7cf dans son analyse, c’est qu’ironiquement ce mal aura eu le mérite d’entraver la criminalité du quotidien.
“comment est-on censé faire comprendre aux gamins que le crime ne paie pas ?”
Ma réponse te plaira que moyennement, mais à part le ratio bénéfice/risque, je vois pas trop.
La Chine contrôle pas trop mal la criminalité, c’est un fait. Mais comme je le dis, vu que c’est pareil au Viet Nam et que c’était pareil en URSS, je pense que la nature marxiste-léniniste (dictature à parti unique répressive avec une idéologie collectiviste) du régime joue plus que les caméras IA. Maintenant, il semble que le peuple chinois en est satisfait.
Pour ce qui est du “bénéfice/risque”, je me contenterai de chercher dans l’histoire pour constater que même quand on pendait les bandits sur la place du village, on pouvait pas voyager entre deux villes sans se faire attaquer. Alors, manifestement, c’est pas là qu’il faut chercher la solution. Par-contre, je remarque qu’en Chine, un haut cadre du parti peut être emprisonné pour corruption bien plus facilement que chez nous. L’impunité, c’est avant tous ces de ces politiciens qui profitent d’un bien plus grand laxisme que les voleurs de scooteurs. La classe dirigeante montre l’exemple, et en France, c’est manifestement le mauvais exemple.
Punir sévèrement les pauvres et épargner les riches, montrer que la République est injuste et hypocrite, c’est comme ça qu’on fabrique des ennemis de la République.
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@ALRBP a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
même quand on pendait les bandits sur la place du village, on pouvait pas voyager entre deux villes sans se faire attaquer.
Je pense les gens plus impressionnables et surtout plus informés actuellement, j’imagine qu’une pendaison à l’époque que tu décris n’atteignait qu’un nombre restreint de personnes, ça twittait nettement moins en ce temps là.
PS: je pensais à une justice plus réactive, pas à pendre tout le monde.
“je remarque qu’en Chine, un haut cadre du parti peut être emprisonné pour corruption bien plus facilement que chez nous.”
Et plus arbitrairement, genre purge de maintien de peur et loyauté, loin d’une quelconque justice.
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@michmich a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
@ALRBP a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
même quand on pendait les bandits sur la place du village, on pouvait pas voyager entre deux villes sans se faire attaquer.
Je pense les gens plus impressionnables et surtout plus informés actuellement, j’imagine qu’une pendaison à l’époque que tu décris n’atteignait qu’un nombre restreint de personnes, ça twittait nettement moins en ce temps là.
PS: je pensais à une justice plus réactive, pas à pendre tout le monde.
Oh, tout le monde savait, et comme aujourd’hui, les bandits partent du principe qu’ils se feront pas prendre. Quand tu vois comment certains commettent des meurtres sans les camoufler, avec la certitude de se faire prendre et, pour le coup, de passer un moment en prison… (parce que là, on est, heureusement, plus sévères que pour les pick pockets)
Après, la justice, ça coute cher aussi. Faut accepter de payer pour. Une place en prison, c’est pas gratuit (et le travail en prison actuellement, c’est mal géré et ça paie pas les frais).
Mais y’a tout un tas de choses à régler. Ça fait longtemps qu’on parle de l’importance de la police de proximité, supprimée sous Sarko et jamais remise (malgré les demandes). Du travail, une école qui marche. Tout ça ça aide, mais ça coute cher.
Alors, moi, contrairement à ce qu’on m’avais prédit, depuis que je vois une grosse partie de mon salaire partir en impôts, j’ose dire “et bien, si avec plus d’impôts vous pourriez régler ça, prenez mon fric et réglez-moi ça”. La France va mal, mon argent sera manifestement plus utile dans l’action publique que sur mon compte épargne. Mais évidement, ça marche que si tout le monde est mis à contribution, sinon, bah, c’est pas mes petits économies qui vont sauver la France, mais celles de tous les français le peuvent. -
@ALRBP a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
l’importance de la police de proximité, supprimée sous Sarko
Grosse bêtise, c’était le pouls de la société cette police.
Ils ont pris ton fric, et n’ont rien réglé!
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@michmich a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
@ALRBP a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
l’importance de la police de proximité, supprimée sous Sarko
Grosse bêtise, c’était le pouls de la société cette police.
Ils ont pris ton fric, et n’ont rien régler!
Ouai, pas faux.
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@michmich a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
Ils ont pris ton fric, et n’ont rien réglé!
La définition parfaite des politiciens
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@Popaul a ecrit :
Et si la phrase entre tes parenthèse était “parce que je peux faire confiance aux autres” ?
Est-ce que pour faire confiance aux humains faut que l’humain s’auto-fouette ?La confiance n’exclut pas le contrôle, et l’expérience démontre que non, si on laisse une large communauté libre de ses agissements, quelques individus malfaisants profiteront toujours de toutes les opportunités qui leur sont données de faire du mal aux autres (et à eux-mêmes)
@Popaul a écrit :
Mais j’ai encore cette naïveté de croire que l’humain peut faire mieux que de se trouver des excuses foireuse pour s’envoyer des bombes sur la gueule et du coup, de se regarder en chien de faïence.
Perso je vois ce système de surveillance comme un instrument d’éducation. Fais ça pendant 30 ans, tu crées un changement de mentalité dans la population et plus personne ne dira “t’as cherché aussi, planquer ses affaires c’est la base”. Désolée mais non, ça n’a rien d’universel et ce n’est “la base” que dans les pays remplis de voleurs. Il existe quantité d’endroits où ce n’est pas la norme, et je ne parle pas que de dictatures: Japon, Hong Kong, Singapour…
@Popaul a dit :
Que ça soit un pote ou un inconnu… seul ou en groupe -> C’est de l’humain
Ce n’est pas “de l’humain”, c’est un choix culturel collectif que d’accepter que c’est “ta faute si tu t’es fait voler, parce que tu n’as pas protégé tes affaires”, tout comme autrefois c’était “la faute de la fille si elle s’est faite violer, parce qu’elle ne s’est pas assez couverte”. On tolère aujourd’hui les actions des voleurs comme on tolérait hier les agissements des violeurs et ce sont des choses qui se changent quand on en a la volonté sociétale.
L’Occident a un précédent horrible en tête avec ce genre de système et il en est resté traumatisé. La leçon a été apprise, il est temps de relever la tête maintenant.
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@7cf148fd
Je dois le répéter mais mes compétences en communications sont relativement faibles. Du coup, je vais tenter de faire comme toi, ne citer que ce qui est arrangeant dans le discours (ptite pique perso, a prendre avec le plus de légèreté possible, please).De toute façon, ce système de surveillance est déjà en place rien que par le fait que la communication est désormais nettement plus facile rien qu’avec internet. Même si c’est à double tranchant vu les dérives complètement connes des complotistes, platistes et divers autres “je ne contracte pas”.
On ne compte plus les affaires révélées de zillionaires, de politiciens, d’entreprises & Co qu’abusent du système actuel.@7cf148fd a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
Ce n’est pas “de l’humain”, c’est un choix culturel collectif que d’accepter que c’est “ta faute si tu t’es fait voler, parce que tu n’as pas protégé tes affaires”
Si, c’est humain ! ce système collectif mis en place permet des dérives ! Nous sommes parfaitement d’accord. Seulement, suivant l’échèle socialo-financière du gaillard qui se fait choper à fauter, la sentence sera différente.
Du coup, le ptit pétzouille qui margouline risque nettement plus mais ne s’en rendra pas réellement compte.@7cf148fd a dit dans Vidéosurveillance algorithmique (VSA) : Pas le temps de souffler, l’Assemblée prépare déjà son extension ! :
Perso je vois ce système de surveillance comme un instrument d’éducation. Fais ça pendant 30 ans, tu crées un changement de mentalité dans la population
La seule chose que tu vas changer c’est la manière de comment planquer nos ptits vices de cette surveillance.
Place un système d’éducation ou l’on ne s’apprend plus à s’auto-concurrencer mais plutôt à partager nos connaissances. Je parie qu’une génération (30 ans) suffirait pour améliorer les choses et ceci sans laisser des personnes derrière.
Mais bon, faudrait que ça se passe globalement où très majoritairement histoire que ça se spread. On en est loin vu l’état actuel des choses (“C’est eux qu’on commencé, du coup missile dans la gueule”).
La répression ne fonctionne pas.
La connaissance fonctionne. -
À l’intérieur de l’opération de surveillance massive de la Chine
(article de wired, ne tirez pas sur le pianiste je ne suis pas responsable du contenu et je n’ai pas eu le temps de le lire)
Dans le nord-ouest de la Chine, le gouvernement réprime la population minoritaire musulmane ouïghoure, la maintient sous surveillance constante et jette plus d’un million de personnes dans des camps de concentration.
Le Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine, est en état de confinement. Chaque message, mot et mouvement est surveillé pour son potentiel extrémiste. Un million de musulmans ouïghours sont détenus dans des camps de concentration. Mais à Istanbul, à 5 000 kilomètres de là, une communauté de femmes ayant échappé à une vie de répression combat une résistance numérique. Illustration : Natasha Wigoder
La femme se souvient de la première fois où elle a eu un smartphone.
C’était en 2011 et elle vivait à Hotan, une ville oasis du Xinjiang, au nord-ouest de la Chine. Nurjamal Atawula, 30 ans, adorait prendre des photos de ses enfants et échanger des chaînes d’emoji avec son mari pendant son absence. En 2013, Atawula a téléchargé WeChat, l’application chinoise de messagerie sociale. Peu de temps après, des rumeurs ont circulé parmi ses amis : le gouvernement pourrait suivre votre position grâce à votre téléphone. Au début, elle ne les croyait pas.
Début 2016, la police a commencé à effectuer des contrôles de routine au domicile d’Atawula. Son mari était régulièrement appelé au commissariat. La police l’a informé qu’elle se méfiait de son activité sur WeChat. Les enfants d’Atawula ont commencé à trembler de peur à la vue d’un policier.
Le harcèlement et la peur ont finalement atteint le point où la famille a décidé de déménager en Turquie. Le mari d’Atawula, inquiet qu’Atawula soit arrêtée, l’a envoyée pendant qu’il restait au Xinjiang et attendait les passeports des enfants.
« Le jour de mon départ, mon mari a été arrêté », a déclaré Atawula. Lorsqu’elle est arrivée en Turquie en juin 2016, son téléphone ne fonctionnait plus et, le temps qu’elle le fasse réparer, tous ses amis et parents l’avaient supprimée de leurs comptes WeChat. Ils craignaient que le gouvernement ne les punisse pour avoir communiqué avec elle.
Elle était seule à Istanbul et sa connexion numérique avec la vie au Xinjiang était terminée. Hormis un appel Skype intercepté avec sa mère pendant 11 minutes et demie fin décembre 2016, la communication avec ses proches a été complètement coupée. “Parfois, j’ai l’impression que les jours passés avec ma famille ne sont que mes rêves, comme si j’avais été seule toute ma vie, depuis ma naissance”, a-t-elle déclaré.
Atawula vit désormais seule à Zeytinburnu, un quartier populaire d’Istanbul. Il abrite la plus grande population d’Ouïghours de Turquie, la minorité ethnique majoritairement musulmane originaire du Xinjiang, une vaste terre riche en ressources, composée de déserts et de montagnes le long de l’ancienne route commerciale chinoise de la Route de la Soie.
Atawula fait partie des quelque 34 000 Ouïghours vivant en Turquie. Elle ne parvient à contacter aucun de ses proches, par téléphone, WeChat ou toute autre application. «Je me sens très triste quand je vois d’autres personnes discuter par vidéo avec leur famille», dit-elle. « Je me demande pourquoi nous n’entendons même pas la voix de nos enfants ?
Pour les Ouïghours du Xinjiang, tout type de contact à partir d’un numéro de téléphone non chinois, même s’il n’est pas officiellement illégal, peut entraîner une arrestation immédiate. La plupart des Ouïghours de Turquie ont été supprimés par leurs familles sur les réseaux sociaux. Et beaucoup n’oseraient pas essayer de prendre contact, de peur que les autorités chinoises ne punissent leurs proches. Ce n’est qu’une des façons par lesquelles le gouvernement du président Xi Jinping maintient un réseau de surveillance étroitement contrôlé sur les Ouïghours en Chine, et cela a un effet d’entraînement sur les Ouïghours vivant partout dans le monde.
Zeytinburnu, la banlieue d’Istanbul où vit Atawula, se trouve derrière les autoroutes sinueuses de la ville et est parsemée de restaurants et de cafés servant une cuisine ouïghoure : des nouilles larges et glissantes, des brochettes d’agneau et du thé vert. Le drapeau séparatiste ouïghour – une version bleu clair du drapeau turc – est courant. Il s’agit d’une image interdite en Chine, représentant le Turkestan oriental, le nom du Xinjiang méprisé par le gouvernement chinois et que presque tous les Ouïghours d’ici donnent à leur patrie.
Le Xinjiang – qui signifie « nouvelle frontière » en chinois – a été placé sous le contrôle du Parti communiste chinois en 1949. Au cours de la seconde moitié du XXe siècle, l’indépendance ouïghoure constituait une menace qui pesait sur l’agenda du parti. Le gouvernement a tenté d’éradiquer le séparatisme et d’« assimiler » les Ouïghours en encourageant la migration massive des Chinois Han, le groupe ethnique dominant de la Chine, vers le Xinjiang.
Dans les années 90, des émeutes ont éclaté entre les Ouïghours et la police chinoise. Dans un livre blanc publié en mars, le gouvernement chinois a défini les émeutes comme des « actes inhumains, antisociaux et barbares » perpétrés par des groupes séparatistes. Amnesty International, quant à elle, a décrit les manifestations de 1997 à Gulja, dans le Xinjiang , comme une manifestation pacifique qui a tourné au massacre, citant la militante ouïghoure en exil Rebiya Kadeer. “Je n’ai jamais vu une telle méchanceté de ma vie”, a-t-elle déclaré. « Les soldats chinois matraquaient les manifestants. »
Après les attentats du 11 septembre, le gouvernement chinois s’est inspiré de la guerre contre le terrorisme menée par George W. Bush et a commencé à cibler les groupes séparatistes du Xinjiang. En 2009, des émeutes ethniques sanglantes ont éclaté entre Ouïghours et Chinois Han à Urumqi, la capitale du Xinjiang. La police a mis la ville en état de confinement, imposant une coupure d’Internet et coupant le service de téléphonie mobile. C’était le début d’une nouvelle politique visant à contrôler la population ouïghoure – numériquement.
Le verrouillage de WeChat
Ces dernières années, la Chine a mené sa répression contre l’extrémisme islamique via les smartphones. En 2011, le géant chinois de l’informatique Tencent Holdings a lancé une nouvelle application appelée WeChat, connue sous le nom de « Undidar » en langue ouïghoure. Il est rapidement devenu un outil de communication essentiel dans toute la Chine.
Le lancement de WeChat a été « un moment de soulagement et de liberté immense », a déclaré Aziz Isa, un universitaire ouïghour qui a étudié l’utilisation ouïghoure de WeChat aux côtés de Rachel Harris à l’université SOAS de Londres. « Jamais auparavant dans la vie des Ouïghours nous n’avions eu l’occasion d’utiliser les médias sociaux de cette manière », a déclaré Isa, décrivant comment les Ouïghours, quelles que soient les classes sociales, discutaient ouvertement de tout, de la politique à la religion en passant par la musique.
En 2013, environ un million d’Ouïghours utilisaient l’application. Harris et Isa ont observé une augmentation constante du contenu islamique, « pour la plupart apolitique, mais certains ouvertement radicaux et oppositionnels ». Isa se souvient avoir été préoccupé par certains des contenus les plus nationalistes qu’il avait vus, même s’il estime qu’ils représentaient moins de 1 % de tous les messages. La plupart des Ouïghours, dit-il, « ne comprenaient pas que les autorités surveillaient ».
Ce type de communication sans restriction sur WeChat a duré environ un an. Mais en mai 2014, le gouvernement chinois a mobilisé un groupe de travail pour éradiquer les « fautes professionnelles » sur les applications de messagerie instantanée, en particulier « les rumeurs et les informations conduisant à la violence, au terrorisme et à la pornographie ». WeChat, aux côtés de ses applications rivales, devait permettre au gouvernement de surveiller l’activité de ses utilisateurs.
Miyesser Mijit, 28 ans, dont le nom a été changé pour protéger sa famille, est une étudiante ouïghoure en maîtrise à Istanbul qui a quitté le Xinjiang en 2014, juste avant la répression. Au cours de ses études de premier cycle en Chine continentale, elle et ses pairs ouïghours avaient déjà appris à utiliser leurs ordinateurs portables et leurs téléphones avec prudence. Ils craignaient d’être expulsés de l’université s’ils étaient surpris en train d’exprimer leur religion en ligne.
Le frère de Mijit, qui a été enrôlé dans la police du Xinjiang à la fin des années 2000, l’a avertie de surveiller son langage lorsqu’elle utilise la technologie. “Il m’a toujours dit de ne rien partager sur ma religion et de faire attention à mes paroles”, a déclaré Mijit. Elle n’a pas participé aux nombreuses conversations WeChat sur la religion. Si ses amis lui envoyaient des messages sur l’Islam, elle les supprimait immédiatement et effectuait une réinitialisation d’usine sur son téléphone avant de rentrer au Xinjiang pour les vacances universitaires. Ses précautions se sont révélées insuffisantes.
Un État de surveillance est né
La surveillance des Ouïghours ne se limitait pas à leurs smartphones. Mijit se souvient de sa première rencontre avec la technologie de reconnaissance faciale à l’été 2013. Son frère rentrait du commissariat de police avec un appareil légèrement plus gros qu’un téléphone portable. Il a scanné son visage et a indiqué sa tranche d’âge entre 20 et 30 ans environ. L’appareil a rapidement affiché toutes ses informations, y compris son adresse personnelle. Son frère l’a prévenue que cette technologie serait bientôt déployée dans tout le Xinjiang. «Toute votre vie sera enregistrée», lui dit-il.
En mai 2014, parallèlement à la répression de WeChat, la Chine a annoncé une « campagne de frappe forte contre le terrorisme violent » plus large. Il s’agissait d’une réponse à plusieurs attaques très médiatisées attribuées à des militants ouïghours, notamment un attentat suicide à la voiture piégée sur la place Tiananmen en 2013 et, au printemps 2014, un attentat au couteau dans une gare de Kunming suivi d’un attentat à la bombe sur un marché à Urumqi. Les autorités se sont concentrées sur les Ouïghours, aux côtés des Kazakhs, des Kirghizes et d’autres minorités turques du Xinjiang.
Après avoir été soumise à des contrôles policiers quotidiens à son domicile à Urumqi, Mijit a décidé de quitter le Xinjiang pour la Turquie. Lorsqu’elle est revenue en Chine pour des vacances en 2015, elle a vu des appareils comme celui que son frère lui avait montré être utilisés aux postes de contrôle de la police tous les quelques centaines de mètres. Son visage a été scanné par la police dès son arrivée aux portes de la ville. « Je suis descendue du bus et tout le monde a été contrôlé un par un », a-t-elle déclaré. Elle a également été accueillie par des dispositifs apposés à l’entrée de chaque supermarché, centre commercial et hôpital.
Amina Abduwayit, 38 ans, une femme d’affaires d’Urumqi qui vit maintenant à Zeytinburnu, se souvient avoir été convoquée au commissariat de police et avoir vu son visage scanné et enregistré dans la base de données de la police. « C’était comme un spectacle de singes », a-t-elle déclaré. «Ils vous demandaient de regarder comme ceci et cela. Ils vous demanderaient de rire, et vous riez, et vous demanderaient de regarder et vous regarderiez.
Abduwayit a également été invité à donner des échantillons d’ADN et de sang à la police. Cela faisait partie d’une campagne plus vaste et globale menée par le gouvernement chinois pour établir une image biométrique de la population ouïghoure du Xinjiang et aider à retrouver ceux considérés comme non-conformistes. « Le commissariat était rempli d’Ouïghours », raconte Abduwayit. “Tous étaient là pour donner des échantillons de sang.”
Finalement, Abduwayit a été obligé de donner un échantillon de voix à la police. « Ils m’ont donné un journal à lire à haute voix pendant une minute. C’était l’histoire d’un accident de la route et j’ai dû la lire trois fois. Ils pensaient que je faisais semblant de parler à voix basse.
Le programme de reconnaissance vocale a été piloté par le géant chinois de l’intelligence artificielle iFlytek, qui revendique une part de 70 % du secteur chinois de la reconnaissance vocale. En août 2017, Human Rights Watch a trouvé des informations indiquant qu’iFlytek fournissait une technologie d’empreinte vocale aux bureaux de police de la province du Xinjiang. L’entreprise a ouvert un bureau dans la Silicon Valley en 2017 et reste ouverte à l’idée de travailler « sous la direction du ministère de la Sécurité publique » pour offrir « une nouvelle expérience en matière de sécurité publique et d’identification médico-légale », selon la version chinoise de son site Internet . La société affirme qu’elle se concentre particulièrement sur la création de technologies antiterroristes.
Human Rights Watch pense que l’entreprise a testé un système en collaboration avec le ministère chinois de la Sécurité publique pour surveiller les conversations téléphoniques. « De nombreux dirigeants de partis et d’État, dont Xi Jinping, ont inspecté et loué le travail innovant de l’entreprise », peut-on lire sur le site Internet d’iFlytek.
Halmurat Harri, une militante ouïghoure basée en Finlande, s’est rendue dans la ville de Turpan en 2016 et a été choquée par l’impact psychologique des contrôles policiers quasi constants. « On a l’impression d’être sous l’eau », dit-il. « Vous ne pouvez pas respirer. À chaque respiration que vous prenez, vous faites attention.
Il se souvient d’être allé en voiture dans le désert avec un ami qui lui avait dit qu’il voulait regarder le coucher du soleil. Ils ont enfermé leurs téléphones portables dans la voiture et sont partis. « Mon ami m’a dit : 'Dis-moi ce qui se passe dehors. Les pays étrangers sont-ils au courant de l’oppression ouïghoure ? Nous avons parlé pendant quelques heures. Il voulait rester là toute la nuit.
Pour transformer le Xinjiang en l’un des États de surveillance les plus étroitement contrôlés au monde, il a fallu créer un vaste réseau de sécurité en forme de grille. Plus de 160 000 caméras ont été installées dans la ville d’Urumqi en 2016, selon les experts chinois en sécurité et surveillance Adrian Zenz et James Leibold.
Au cours de l’année qui a suivi la nomination de Chen Quanguo au poste de secrétaire régional du Parti en 2016, plus de 100 000 postes liés à la sécurité ont été annoncés, tandis que les dépenses en matière de sécurité ont bondi de 92 %, soit une augmentation stupéfiante de 8,6 milliards de dollars .
Cela fait partie d’ un vaste ensemble d’investissements massifs en matière de sécurité intérieure en Chine, qui ont atteint un montant record de 197 milliards de dollars en 2017. Environ 173 millions de caméras surveillent désormais les citoyens chinois. Dans un avenir proche, le gouvernement a présenté des plans pour parvenir à une couverture vidéo à 100 % des « zones publiques clés ».
Pour les Ouïghours, « la situation de l’emploi au Xinjiang est difficile et limitée », a déclaré Zenz. Beaucoup de bons emplois exigent la maîtrise du chinois, ce que de nombreux Ouïghours ne maîtrisent pas. Rejoindre la police est l’une des seules opportunités viables offertes aux Ouïghours, qui sont ensuite chargés de surveiller leur propre peuple.
Les goulags ouïghours de Chine
Les efforts du gouvernement pour contrôler la population du Xinjiang n’étaient pas seulement numériques ; il a également commencé à les emprisonner physiquement. En août 2018, un comité des droits de l’homme des Nations Unies a déclaré qu’il estimait qu’un million d’Ouïghours étaient détenus dans ce qui équivaut à un « camp d’internement massif entouré de secret ».
Dans un premier temps, la Chine a entièrement nié l’existence de ces camps. Mais ensuite, en octobre 2018, le gouvernement a annoncé avoir lancé « un programme d’enseignement et de formation professionnels » et adopté une loi légitimant ce qu’il appelle des « centres de formation ».
Dans un rapport de septembre 2018, Human Rights Watch a constaté que les violations des droits humains au Xinjiang étaient d’une ampleur et d’une ampleur jamais vues depuis la Révolution culturelle et que la création des camps reflétait l’engagement de Pékin à « transformer le Xinjiang à sa propre image ».
Gulbahar Jalilova, 54 ans, une vendeuse de vêtements ouïghoure du Kazakhstan, a passé un an, trois mois et 10 jours dans des centres de détention et des camps à Urumqi. Elle vit désormais à Istanbul. Selon son mandat d’arrêt en Chine, émis par le Bureau de la sécurité publique d’Urumqi, elle a été arrêtée « pour son implication suspecte dans des activités terroristes dans la région ». La police l’a accusée de blanchiment d’argent via l’un de ses employés à Urumqi, qui a également été arrêté. Jalilova nie ces accusations, affirmant qu’elles n’étaient qu’un simple prétexte.
Jalilova a été emmenée dans un kanshousuo , l’un des nombreux centres de détention temporaire de la capitale du Xinjiang. Au cours des 15 mois suivants, elle a été transférée dans trois prisons et camps différents à Urumqi. Elle se souvient avec précision et rigueur de sa vie en détention : une cellule de 10 pieds sur 20, avec jusqu’à 50 personnes assises en rangées serrées, les pieds repliés sous elles.
Jalilova, qui souffre de troubles de la mémoire depuis sa libération en août 2018, tient un carnet dans lequel elle a noté tous les noms des femmes qui se trouvaient dans la cellule avec elle. Elle note également les raisons de leur arrestation, notamment le téléchargement de WhatsApp – une application bloquée en Chine – qui stocke les numéros d’éminents universitaires ouïghours et le fait d’avoir été arrêté avec du contenu religieux sur leurs téléphones.
Elle se souvient que la cellule était équipée de caméras sur les quatre côtés et d’un téléviseur installé au-dessus de la porte. « Les dirigeants de Pékin peuvent vous voir », lui ont dit les gardes. Une fois par mois, a expliqué Jalilova, les gardiens diffusaient les discours de Xi Jinping aux détenus et leur faisaient écrire des lettres de remords. « Si vous écriviez quelque chose de mal, ils vous puniraient », a déclaré Jalilova. « Vous ne pouvez dire que ‘Merci au Parti’, ‘Je me suis purifié de ceci ou de cela’ et ‘Je serai une personne différente une fois libéré.’ »
Elle a été libérée en août 2018 et est arrivée en Turquie, ne se sentant plus en sécurité au Kazakhstan, où le gouvernement a été accusé d’avoir expulsé les Ouïghours vers le Xinjiang .
Évadez-vous en Turquie
Bien qu’il n’existe aucune statistique officielle sur les camps, la base de données des victimes du Xinjiang, gérée par des bénévoles , a rassemblé plus de 3 000 témoignages d’Ouïghours, de Kazakhs et d’autres minorités musulmanes concernant leurs proches disparus. Il montre qu’environ 73 pour cent des personnes détenues sont des hommes.
Il s’ensuit que la majorité des personnes qui ont fui le Xinjiang pour la Turquie ces dernières années sont des femmes. Les militants locaux estiment que 65 % de la population ouïghoure en Turquie est composée de femmes, dont beaucoup sont séparées de leur mari.
Certaines femmes ouïghoures ont fui clandestinement le Xinjiang en fuyant par voie terrestre, via la Chine et la Thaïlande, vers la Malaisie, avant de s’envoler vers la Turquie. À Zeytinburnu, ils vivent dans un réseau d’appartements partagés, gagnant autant d’argent qu’ils peuvent en travaillant sans papiers dans l’industrie textile locale, comme tailleurs ou couturières.
Les femmes arrivées sans leur mari sont connues parmi les autres Ouïghours sous le nom de « veuves ». Leurs maris sont piégés au Xinjiang et elles ne savent pas si elles sont vivantes, emprisonnées ou mortes.
Kalbinur Tursun, 35 ans, a quitté le Xinjiang en avril 2016 avec son plus jeune fils Mohamed, le seul de ses enfants à avoir un passeport à l’époque. Elle a laissé ses autres enfants et son mari au Xinjiang. Elle était enceinte de son septième enfant, une fille appelée Marziya dont elle craignait d’être forcée d’avorter, ayant déjà eu beaucoup plus d’enfants que ne le permet la politique chinoise des deux enfants.
Lorsque Tursun est arrivée en Turquie, elle appelait son mari par vidéo tous les jours via WeChat. Tursun pense que la police chinoise l’a arrêté le 13 juin 2016, car c’était la dernière fois qu’elle lui a parlé. Un ami lui a alors dit que son mari avait été condamné à 10 ans de prison en raison de sa décision de partir. «J’ai tellement peur que mes enfants me détestent», dit-elle.
La Turquie est considérée comme un pays plus sûr que d’autres pays à majorité musulmane, notamment le Pakistan et l’Arabie saoudite, dont les dirigeants ont récemment rejeté le sort des Ouïghours. Les Ouïghours sont arrivés en Turquie par vagues depuis la Chine depuis les années 1950. Ils ne reçoivent pas de permis de travail et beaucoup espèrent qu’ils finiront par trouver refuge en Europe ou aux États-Unis.
Bien que la Turquie ait traditionnellement agi en tant que protecteur des Ouïghours, qu’elle considère comme des parents turciques, le président Recep Tayyip Erdoğan s’est montré réticent à prendre la parole en faveur des Ouïghours ces dernières années, alors que les relations commerciales avec la Chine se sont améliorées. (De la même manière, l’administration Trump a refusé de faire pression sur la Chine sur les questions de droits de l’homme au Xinjiang alors qu’elle négocie un accord commercial avec Pékin.)
Le 9 février 2019, Hami Aksoy, porte-parole du ministère turc des Affaires étrangères , a brisé le silence diplomatique. « Ce n’est plus un secret que plus d’un million de Turcs ouïghours victimes d’arrestations arbitraires sont soumis à la torture et au lavage de cerveau politique dans les camps d’internement et les prisons », peut-on lire dans la déclaration d’Aksoy.
Hua Chunying, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a rejeté ces affirmations deux jours plus tard, qualifiant cette déclaration d’« accusation sans fondement basée sur des mensonges ». Elle a souligné la menace des « trois forces du mal » – le terrorisme, l’extrémisme et le séparatisme – en Chine et à l’étranger.
Grâce à la politique de la Chine dans la région, a déclaré Hua, les habitants du Xinjiang « ont désormais un sentiment plus fort de sécurité, de bonheur et d’épanouissement… le sourire radieux sur les visages de la population locale est la réponse la plus éloquente à ces rumeurs ».
Hua a également souligné la menace terroriste à laquelle la Turquie est confrontée en tant que pays multiethnique. « S’il adopte deux poids, deux mesures en matière de lutte contre le terrorisme, il finira par se faire du mal ainsi qu’à autrui », a-t-elle déclaré.
Amina Abduwayit, la femme d’affaires d’Urumqi, avait peur de s’exprimer librement lorsqu’elle est arrivée en Turquie en 2015. Pendant les deux premières années qui ont suivi son arrivée, elle n’a pas osé saluer un autre Ouïghour. « Même si j’étais loin de la Chine, je vivais toujours dans la peur de la surveillance », a-t-elle déclaré. Même si elle a désormais moins peur, elle n’a pas ouvert son application WeChat depuis un an et demi.
D’autres ont essayé d’utiliser WeChat pour contacter leur famille, mais la diffusion des informations au goutte-à-goutte est devenue de plus en plus lente. En 2016, les conclusions du Citizen Lab de l’Université de Toronto, un centre de recherche qui surveille les méthodes de contrôle de l’information, ont montré comment l’application censurait ses utilisateurs en suivant l’utilisation de leurs mots clés. Parmi les termes de recherche qui pourraient déclencher des soupçons officiels figurent des mots liés aux questions ouïghoures tels que « émeutes d’Urumqi en 2009 », « émeutes de Kashgar en 2012 » et tout ce qui a trait à l’islam.
À Zeytinburnu, la couturière Tursungul Yusuf, 42 ans, se souvient de la façon dont les appels téléphoniques et les messages de ses proches au Xinjiang sont devenus de plus en plus laconiques à mesure que 2017 avançait. « Lorsque nous parlions, ils restaient brefs. Ils disaient : « Tout va bien, nous sommes en sécurité. » Ils parlaient en code : si quelqu’un était emprisonné dans les camps, ils disaient qu’il avait été « admis à l’hôpital ». Je dirais « compris ». Nous ne pouvions pas parler librement. Ma fille aînée a écrit « Je suis impuissante » sur son statut WeChat. Elle m’a ensuite envoyé un message, “Assalam”, avant de me supprimer.
Une sorte de code WeChat s’est développé grâce aux emoji : une rose à moitié tombée signifiait que quelqu’un avait été arrêté. Une lune sombre, ils étaient partis dans les camps. Un emoji solaire : « Je suis vivant ». Une fleur : « J’ai été libéré. »
Les messages devenaient de jour en jour plus énigmatiques. Parfois, une série frénétique de messages répétant la propagande du PCC était suivie d’une panne de communication. Aydin Anwar, militant ouïghour basé à Washington, rappelle que là où les Ouïghours écrivaient « inshallah » sur les réseaux sociaux, ils écrivent désormais « CPC ».
Aux rares occasions où elle a pu parler avec des proches, elle a déclaré que « c’était comme si leur âme leur avait été retirée ». Une série d’images de grenades constituaient un thème commun : le symbole de cohésion ethnique du Parti, l’idée selon laquelle toutes les minorités et les Chinois Han devraient vivre harmonieusement les uns à côté des autres, « comme les graines d’une grenade ». Fin 2017, la plupart des Ouïghours de Turquie avaient complètement perdu le contact avec leur famille.
Résilience, Résistance, Résolution
Dans un appartement bordé de livres à Zeytinburnu, Abduweli Ayup, militant et poète ouïghour, entraîne Amina Abduwayit, la femme d’affaires qui a fui le Xinjiang après que la police ait prélevé son ADN. Ils filment une vidéo qu’ils envisagent de télécharger sur Facebook. Ayup la filme sur son smartphone, alors qu’elle est assise à une table et raconte comment sa ville natale, Urumqi, était une « prison numérique ».
Abduwayit décrit comment ils avaient peur d’allumer les lumières tôt le matin, de peur que la police pense qu’ils priaient. Elle énumère ensuite tous les membres de sa famille qui, selon elle, ont été transférés vers des centres de détention.
Abuwayit n’est que l’un des centaines d’Ouïghours de Turquie – et des milliers à travers le monde – qui ont décidé de télécharger leur histoire sur Internet.
Depuis l’année dernière à la même époque, une sorte de révolution numérique a eu lieu. Halmurat Harri, militant ouïghour basé en Finlande, estime qu’il a été le premier à filmer un témoignage . “Je veux la liberté pour mes parents, la liberté pour les Ouïghours”, a-t-il déclaré dans une vidéo enregistrée sur son téléphone portable en avril dernier dans sa salle de bain à Helsinki, avant de se raser les cheveux en signe de protestation. “Ensuite, j’ai appelé les gens et leur ai demandé de réaliser leurs propres vidéos de témoignage”, a déclaré Harri.
Des vidéos filmées sur des smartphones depuis les cuisines, les salons et les chambres ouïghours ont commencé à apparaître sur YouTube, Facebook et Twitter. Ayup a décrit comment au début, les gens « se couvraient le visage et avaient peur que leur voix soit reconnue », mais à mesure que 2018 avançait, les gens sont devenus plus courageux.
Gene Bunin, un universitaire basé à Almaty, au Kazakhstan, gère la base de données des victimes du Xinjiang, gérée par des bénévoles, et a catalogué et rassemblé des milliers de témoignages d’Ouïghours, de Kazakhs, de Kirghizes et d’autres minorités musulmanes ciblées au Xinjiang.
Bounine a remarqué que contrairement aux tentatives privées de prise de contact, la révélation publique des proches portés disparus semblait pousser les autorités chinoises à réagir. Cela est particulièrement vrai dans les cas où les victimes avaient des liens avec le Kazakhstan, où le gouvernement a exercé des pressions sur la Chine pour qu’elle libère les Kazakhs de souche. « Il existe des preuves que le gouvernement chinois est prêt à faire des concessions pour ceux dont les proches témoignent par vidéo », a déclaré Bounine.
Il a été informé que des personnes avaient été libérées 24 heures seulement après que leurs proches avaient publié des témoignages en ligne. « C’est un signe fort que les autorités du Xinjiang réagissent à ces vidéos », a-t-il déclaré.
La Chine a récemment intensifié sa défense des pratiques au Xinjiang, apparemment en réponse à une attention occidentale plus large. En mars, Reuters a annoncé que la Chine inviterait des diplomates européens à visiter la région. Cela faisait suite à une déclaration du gouverneur du Xinjiang, Shohrat Zakir, selon laquelle les camps étaient en fait des « internats ».
Harri a récemment lancé un hashtag, #MeTooUyghur, encourageant les Ouïghours du monde entier à exiger des preuves que leurs familles étaient en vie.
Les grands groupes de discussion WhatsApp, composés de membres de la diaspora ouïghoure internationale, ont également été une source vitale de solidarité pour une communauté privée d’information.
Le 24 décembre 2018, Kalbinur Tursun, la femme qui a laissé cinq de ses enfants au Xinjiang, était assise dans le magasin de vêtements pour femmes qu’elle gère à Zeytinburnu, parcourant un groupe WhatsApp ouïghour. Elle le vérifie tôt le matin, tard le soir et des dizaines de fois tout au long de la journée, alors que plusieurs centaines de membres ouïghours publient des vidéos et des mises à jour quasi constantes sur la crise au Xinjiang.
Elle a visionné une vidéo d’une pièce remplie d’enfants ouïghours jouant à un jeu. Une voix hors champ crie « Bizi ! Bizi! Bizi! »—Chinois pour « Nez ! Nez! Nez!" et un groupe d’enfants excités se tapent le nez. Tursun était étonné.
A gauche, elle a reconnu sa fille de 6 ans, Aisha. « Son émotion, son rire… c’est elle. C’est comme un miracle", a-t-elle déclaré. “Je vois tellement mon enfant dans mes rêves que je n’aurais jamais imaginé la voir dans la vraie vie.” Cela faisait deux ans qu’elle n’avait pas entendu la voix de sa fille.
La vidéo semble provenir de l’une des « écoles des petits anges » de la province de Hotan, à environ 300 miles de Kashgar, la ville natale de Tursun, où, selon certaines informations, près de 3 000 enfants ouïghours sont détenus. Tursun se demande si ses quatre autres enfants n’ont pas été emmenés encore plus loin. S’adressant à Radio Free Asia, un responsable du Parti communiste de la province a déclaré que les orphelinats étaient patrouillés par la police pour « assurer la sécurité ».
Contrairement à presque tous les membres de la diaspora ouïghoure mondiale, Nurjamal Atawula a réussi à trouver un moyen de contacter sa famille après la panne de WeChat. Elle a utilisé l’un des moyens les plus anciens possibles : écrire une lettre. Fin 2016, elle a entendu parler d’une femme de Zeytinburnu qui faisait régulièrement des allers-retours entre la Turquie et le village de ses parents dans le Xinjiang. Elle a demandé à la femme d’apporter une lettre à sa famille. La femme accepta. Atawula a écrit à son frère et a pris soin de ne pas inclure quoi que ce soit que l’inspection des frontières ou la police pourrait utiliser contre lui.
“Quand j’écrivais la lettre, j’avais l’impression de vivre à l’âge des ténèbres”, a déclaré Atawula. Elle l’a donné à la femme, ainsi que de petits cadeaux pour ses enfants et de l’argent qu’elle avait économisé pour sa famille.
Un mois plus tard, elle a reçu une réponse. La femme ouïghoure, qu’elle appelle sa sœur, a fait sortir clandestinement de Chine une lettre de son frère, cachée dans un paquet de mouchoirs.
Atawula a envoyé une réponse avec son intermédiaire, mais après le troisième voyage, la femme a disparu. Atawula ne sait pas ce qui lui est arrivé. Elle écrit toujours à sa famille, mais ses lettres sont désormais conservées dans un journal, dans l’espoir qu’un jour ses enfants pourront les lire.
Cela fait maintenant plus de deux ans qu’Atawula a reçu la lettre de son frère. Elle le garde soigneusement plié, toujours dans le mouchoir dans lequel il est arrivé. Depuis, elle n’a lu les mots que trois fois, comme si à trop les regarder, ils perdaient leur pouvoir.
Ma ravissante sœur,
Comment vas-tu? Après que vous ayez quitté Urumqi, nous n’avons pas pu vous contacter, mais lorsque nous avons reçu votre lettre, nous avons été très heureux. J’ai tellement de mots pour toi… peut-être qu’après nos retrouvailles, nous pourrons les dire. Vous avez dit que vos enfants vous manquaient. Qu’Allah vous donne la patience. Maman, moi et mes proches, tu nous manques tous beaucoup. Nous avons tellement d’espoir pour vous. Soyez forts et ne vous inquiétez pas pour les enfants.
Cet article est une coproduction avec la chaîne Authoritarian Tech de Coda.
Source: https://www.wired.com/story/inside-chinas-massive-surveillance-operation/
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Ben on y est, il faut une IA pour résumer les articles ici … krkrkrkrkrkrkr