J'aime pas la cannelle
-
“La cannelle est à la gastronomie ce que la variole
était à la médecine” disait dernièrement un grand
scientifique gastronome parmi les gastronomes. Il est
vrai qu’on répugne à évoquer cette écorce nauséabonde
sans expérimenter le moindre haut-le-coeur.Il y a là sans nul doute un des derniers grands combats
à mener pour la santé mondiale. Il faut éradiquer
cette saloperie au plus vite. Voici 6 bonnes raisons
pour définitivement libérer le monde de ce pesticide.1. La cannelle est-elle soluble dans l’acide sulfurique ?
Pour déterminer si la cannelle est soluble dans l’acide
sulfurique, nous allons procéder scientifiquement,
car c’est la science qui a finallement permis à l’humanité
de confectionner ces petits sachets d’herbages à tremper
dans l’eau chaude (qui, parfois, d’ailleurs, contiennent
de la cannelle, mais c’est une autre histoire) - d’où
l’expression “avoir la science infuse” - cqfd.
Sortons donc notre vieille boîte poussiéreuse du
grenier “la chimie amusante” afin d’en extraire le
flacon d’acide sulfurique soigneusement bouché.
Attention, l’acide sulfurique étant hautement
dangereux, nous aurons pris soin au préalable de nous munir
de gants de boxe de protection. Ne disposant
pas d’un gramme de cannelle chez soi, rendons-nous chez
le marchand et versons l’acide sulfurique sur son stock de
cannelle.
Que constatons-nous ?
Nous constatons sans attendre que, d’une part, la cannelle est
soluble dans l’acide sulfurique et que, d’autre part, cette
solubilité déclenche une réaction secondaire non souhaitée
d’animosité verbale et physique incontrôlée chez les
marchands, dont vous vous prémunirez fort à propos à l’aide
des gants de boxe de protection. La preuve est donc
maintenant faite : la cannelle est un excitant déclenchant
sur le consommateur un comportement pathogène agressif.
Cette drogue devrait par conséquent être proscrite. J’ai bien
envie de dénoncer le marchand pour détention et usage illégal
de stupéfiant.2. La cannelle est-elle comestible ?
Sans nul doute, sans quoi la Terre ne connaitrait pas
l’invasion de crétins auxquels nous devons faire face
quotidiennement. Le problème serait auto-résoluble, en quelque sorte.
Ajoutons qu’au rang des substances comestibles et à pouvoir
gustatif égal à la cannelle, nous trouvons : la merde de chacal,
le crachat d’éléphant hépatique, le foie de morue à l’ail, la
bouillie de limaces au viandox et l’inégalable ragoût de rate
gangraineuse au souffre.
C’est vrai. C’est dans le tableau périodique des éléments.3. La cannelle peut-elle être considérée comme un virus ?
Certes. Seuls les crétins consomment la cannelle. Or, il est
statistiquement impossible que tous les crétins de la planète
se mettent, comme ça, sans concertation, à consommer de la
cannelle. Cette pratique étant connue depuis des siècles, nous
pouvons écarter l’hypothèse du complot international de
consommation de cannelle nécessitant des infrastructures de
communication qui n’existent que depuis peu.
Il ne reste donc qu’une explication logique à ce fait étonant :
c’est la consommation de la cannelle qui rend con et pas
seulement l’inverse !
Le consommateur est dès lors pris dans un cercle vicieux
infernal : la prise de cannelle régulière l’ayant rendu con,
il sera de plus en plus enclin à intégrer la cannelle à ses
habitudes alimentaires, et deviendra donc de plus en plus con,
ce jusqu’au stade ultime de crétinisme avancé qui précède
la mort dans lequel la victime ira jusqu’à saupoudrer ses
tartes aux pommes de cannelle avant de les servir sournoisement
à ses amis non encore infectés sans même les prévenir du
danger qui les gettent. La cannelle est un virus d’un type
extrêmement dangereux, le virus alimentaire, pour lequel
il n’existe malheureusement encore aucun vaccin.4. La cannelle possede-t-elle des propriétés dopantes ?
Pas à proprement parlé. Mais considérant que le consommateur de
cannelle devient con et progressivement dépendant, nous pouvons
affirmer que la cannelle possède des propriétés, sinon dopantes,
du moins débilogènes.5. Les militaires utilisent-ils la cannelle ?
D’après mes renseignements dont je tairai la source
confidentielle, les militaires n’utilisent pas de cannelle
pour leur propre consommation. Ils n’en auraient pas besoin.
En revanche, le département d’études sur les armes
bactériologiques considère très sérieusement l’utilisation de
la cannelle comme agent débilisant. Selon mes sources cependant,
les tests poussés de consommation massive de tarte aux pommes
infectées de cannelle sur les rats de laboratoire les ayant tous
fait crever (cf. l’expression “devenir con à en crever”), le
département d’état aurait décidé de stopper ces recherches
jugées trop dangereuses et contraires aux conventions de Genève.6. Enfin, comment peut-on se débarasser de ce fléau ?
La meilleure solution consisterait à expédier le stock mondial
de cannelle dans l’immensité spatiale intergalactique une bonne
fois pour toute. Malheureusement, le coût de cette opération
serait très élevé et le public n’est pas prêt à cette dépense
salutaire. Il ne reste donc que la solution de l’incinération.
Attention cependant, lorsque vous procéderez à la crémation
de votre stock personnel, veillez à ne pas respirer les vapeurs
toxiques qui ne peuvent que se dégager de pareil poison !Contre ce fléau, prenons les armes, hardis,
Que tombent les cuistres et les bouffeurs de cannelle.
Sus, les preux, sus, allez combattre l’ennemi,
Scandez tous en coeur : “sans cannelle, la vie est belle !” -
Wahouuu, waw, waw, wawww dixit Gordon Ramsay
-
Houla, très fort taux de THC !
-
Il faut chercher un peu, mais il y a un rapport (Moi, j’aime beaucoup la Cannelle!)
Dune : anatomie de l’Épice
L’Épice, substance aux pouvoirs extraordinaires décrite dans « Dune », roman de 1965 dont l’adaptation au cinéma sortait le 15 septembre dernier, possède des propriétés qui rappellent celles de molécules bien réelles. Passionné de science-fiction, le chimiste Fabrice CHEMLA (1) a mené l’enquête sur sa composition. Cet entretien fait partie des 10 contenus les plus vus sur notre site cette année.
Quels sont vos liens avec Dune ?
F.C. Je suis passionné du roman du même nom, publié pour la première fois en 1965 par l’Américain Frank Herbert (2), et dont le film Dune est une adaptation. À l’âge de 17 ans, je suis tombé en arrêt devant la couverture de l’édition de poche de 1980, qui montre un visage avec des yeux fascinants d’un bleu intense. Cette couverture est devenue extrêmement célèbre dans le milieu de la science-fiction. À l’époque, j’ai été littéralement happé par cette saga. Plus récemment, afin de tenter d’identifier des analogues terrestres de cette substance fictive et mystérieuse, l’Épice, j’ai mené en tant que chimiste une sorte d’enquête et répertorié les indices semés par Frank Herbert concernant son apparence et ses propriétés. Cet exercice a donné lieu à divers articles parus dans plusieurs ouvrages (3), dont le plus récent, publié par CNRS Éditions, sera présenté à la presse le 29 septembre à la Maison de la chimie, à Paris.
Qu’est-ce exactement que l’Épice ?
F. C. L’Épice est un des éléments centraux de la saga Dune, qui se passe dans un empire interstellaire d’un futur très lointain. Produite seulement sur la planète Dune et consommée par les « Navigateurs de la Guilde interplanétaire » depuis leur enfance, l’Épice est dotée de plusieurs propriétés miraculeuses. Tout d’abord, elle a un effet « anti-âge » qui triple l’espérance de vie. Ensuite, c’est un « nootrope », à savoir une substance qui augmente l’acuité intellectuelle. Enfin, elle a des propriétés hallucinogènes et « enthéogènes » (qui donne l’inspiration sacrée), qui permettent de prédire l’avenir et ainsi de détecter et d’éviter les obstacles potentiellement fatals dans l’hyperespace, moyen de transport fictif utilisé par les Navigateurs pour réaliser des voyages interstellaires ou intergalactiques à des échelles de temps humaines.
Que dit le roman de sa composition et de ses caractéristiques chimiques ?
F. C. En fait, on n’y trouve aucun nom précis de molécules ou de structures chimiques. Et pour cause : Frank Herbert n’était pas chimiste ! En revanche, l’auteur indique qu’il s’agit d’un « Mélange » – autre nom de l’Épice –, produit après fermentation des déjections du ver des sables, une créature imaginaire endémique de la planète Dune. Il précise aussi que l’Épice est solide, qu’elle présente une odeur caractéristique de cannelle, et une couleur changeante selon l’environnement (bleu, violet ou brun-rouge).
Qu’est-ce que vos connaissances en chimie ont permis de déduire de ces indices ?
F. C. Premièrement, le fait que l’Épice soit un mélange indique qu’elle est vraisemblablement composée de plusieurs molécules – et non d’une seule. Ensuite son odeur de cannelle indique la présence d’aldéhyde cinnamique (trans-cinnamaldéhyde ; de formule chimique C9H8O), une substance que l’on retrouve dans l’essence de cannelle. Quant à sa couleur changeante, elle permet d’imaginer que l’Épice renferme un colorant naturel de la famille des anthocyanes, des composés présents naturellement dans de nombreux végétaux terrestres bleus, rouges ou bruns (aubergine, raisin muscat, myrtille, cassis, etc.). Ces composés ont également une couleur variable selon leur degré d’acidité, ou pH (4) : rouge quand le pH est acide, violet quand il est basique, etc. Les connaissances actuelles en chimie suggèrent donc que l’Épice pourrait contenir du cinnamaldéhyde et un anthocyane.
À quoi pourrait être dû l’effet anti-âge de l’Épice ?
F. C. Plusieurs substances terrestres peuvent présenter cette vertu… Dont les anthocyanes ! En effet, ces molécules font partie d’une classe de composés dits flavonoïdes, connus pour protéger les cellules des radicaux libres nocifs (effet antioxydant), et ainsi du vieillissement cellulaire. Dans l’état actuel des connaissances, les flavonoïdes ne permettent pas de ralentir le vieillissement de l’organisme. Mais on peut imaginer que l’Épice contient un anthocyane avec une structure particulière qui lui permettrait d’être efficace aussi dans ce sens, et donc de rallonger la vie.
Quid de ses étonnantes propriétés cognitives ?
F. C. Pour ce qui est de sa capacité à stimuler l’acuité intellectuelle, nombre de substances terrestres, dont le café, le thé ou le chocolat, sont connus pour avoir ce type d’effet. Mais on ne peut pas proposer une substance précise ici, car malheureusement, il n’y a pas assez d’informations sur ce sujet dans le livre. Concernant ses propriétés hallucinogènes et enthéogènes, toutes les descriptions dans la saga permettent de faire un parallèle avec différents psychotropes hallucinogènes terrestres – qui, par définition, sont capables d’altérer la perception de la réalité et de provoquer des hallucinations.
Lesquels précisément ?
F. C. Certains sont des substances naturelles illicites en France mais traditionnellement utilisées dans certaines cultures lors de pratiques religieuses ou mystiques, par exemple pour entrer en contact avec des esprits. C’est le cas de la psilocybine, issue de champignons hallucinogènes du genre Psilocybe et utilisée par les Aztèques du Mexique. On peut aussi citer la DMT (N,N-diméthyltryptamine), présente dans le yagé, un breuvage hallucinogène séculaire à base de lianes du genre Banisteriopsis, consommé par nombre de tribus indigènes d’Amazonie ; ou encore l’ibogaïne, extraite de la plante gabonaise iboga (Tabernanthe iboga). Mais les effets hallucinogènes et enthéogènes de l’Épice pourraient aussi être induits par un analogue d’une substance synthétique, également illicite en France : le LSD (diéthylamide de l’acide lysergique).
Par quel mécanisme ces substances provoquent-elles des hallucinations ?
F. C. Grâce à un motif structural chimique appelé « tryptamine » (C10H12N2), présent dans tous ces composés. Ce motif existe aussi dans un neurotransmetteur clé, impliqué dans la régulation de l’humeur (joie, dépression…) : la sérotonine. Il permet à cette molécule d’activer ses récepteurs spécifiques à la surface des neurones. Comme toutes les substances hallucinogènes citées plus haut possèdent aussi un motif tryptamine, elles peuvent se fixer sur les récepteurs cérébraux de la sérotonine. Ce faisant, elles peuvent modifier non seulement l’humeur (voilà pourquoi certains de ces hallucinogènes sont désormais testés pour le traitement des dépressions sévères) mais aussi – et surtout – les états de conscience. D’où les hallucinations survenant après leur consommation, rappelant celles induites par l’Épice de Dune.
- (1) Enseignant-chercheur à l’Institut parisien de chimie moléculaire (CNRS/Sorbonne Université).
- (2) Nouvelle édition : « Dune », Franck Herbert, éditions Robert Laffont, octobre 2020.
- (3) « Dune – Exploration scientifique et culturelle d’une planète-univers », éditions Le Bélial, octobre 2020. « Dune – Le MOOK », éditions L’Atalante & Leha, novembre 2020. « Étonnante chimie. Découvertes et promesses du XXIe siècle », CNRS Éditions, avril 2021.
- (4) Pour « potentiel hydrogène ». Il s’agit d’une mesure – évaluée sur une échelle allant de 0 à 14 – de l’activité chimique des ions hydrogène (H+). Dans un milieu aqueux à 25 °C, une solution est « neutre » si son pH est de 7, acide s’il est inférieur et basique s’il est supérieur.
Source: https://lejournal.cnrs.fr/articles/dune-anatomie-de-lepice
Je me demande si notre petit camarade @Papawaan ne serait pas en manque de polyphénols qui agit sur les maladies dégénératives du cerveau… et vous ne devinerez jamais dans quel aliment cette molécule est en profusion
Je vous donne un indice: On en met sur les tartes aux pommes -
En tout cas, je me suis toujours félicité d’une chose: petit, je voulais faire pompier ou docteur, pas navigateur de la guilde interplanétaire. Ouf ! -
-
Hé ben ! Waouh sacré pavé pour une petite épice ! Bah sinon la canelle a faible dose ça passe
-
Perso je kiffe la cinnamon…en faites je surkiffe.
Faire attention au dosage par contre :
-
@Papawaan tu nous ferais pas un truc sur la noix de muscade, pas mal de choses à en dire
-
@michmich ah oui mais la noix de muscade, c’est bon Miam !!! (pas comme la canelle, infâme pesticide)