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    Remarqué avec le film d’horreur lovecraftien The Hole in the Ground, acheté en 2018 par A24, l’Irlandais Lee Cronin est contacté par Sam Raimi alors qu’il présente son ouvrage à Sundance. Le croyant un temps trop doux pour prendre le relai de Fede Alvarez, Robert Tapert accepte finalement de suivre l’instinct de son associé et confie à Cronin les rênes du cinquième long-métrage de la saga Evil Dead…

    Evil Dead Rise comporte le plus beau main title design qu’ont ait vu depuis bien longtemps. Tout est parfait, avec ce logo et ce titre, et on parle bien trop rarement de cet art. Pouvez-vous nous parler de votre collaboration avec Annie Atkins ?

    Je suis content que vous m’en parliez. Quand on fait un film, tous les détails comptent, de la première image à la fin du générique de clôture. Tout contribue à l’expérience. J’essaie d’être assez précis quand j’écris un scénario, donc l’émergence du titre hors de l’eau était déjà décrite ainsi dès la première version. Ce n’est pas quelque chose que j’ai décidé en postproduction. Dans le script, on peut lire que des lettres rouges gigantesques s’élèvent dans le ciel et donnent une idée de ce que le film sera. On a longtemps eu une version temporaire de ce titre au montage.

    Annie Atkins vit tout comme moi à Dublin et j’avais déjà travaillé avec elle sur mon film The Hole in the Ground. Je me suis dit qu’elle serait parfaite pour ce job. On en a beaucoup parlé au préalable, puis on a bloqué un style et un look. Le timing était très important, de même que l’espacement des lettres. En plus, il fallait que le titre interagisse avec l’environnement : on voit en effet le reflet des lettres dans la surface du lac et elles bloquent le soleil, ce qui change légèrement la couleur du plan. Annie a un œil génial ; elle a écouté mes idées et m’a guidé dans le choix des polices qui serviraient le mieux cette introduction.

    La composition est entièrement basée sur le concept du titre, on n’a pas cadré au hasard et décidé d’ajouter les lettres aléatoirement. Je voulais que la fin du prologue soit audacieuse, opératique et culottée à plusieurs niveaux. Il fallait taper métaphoriquement du poing sur la table et dire au public : « Vous allez vivre une sacrée expérience en regardant ce film. ». C’est d’ailleurs l’objectif de l’introduction dans son ensemble : elle est là comme une sorte de teaser et donne un avant-goût du parcours de montagnes russes qui va suivre. L’idée est de clouer le spectateur sur son siège avant de vraiment débuter l’intrigue.

    Vous répétez rarement deux fois le même plan dans Evil Dead Rise. Certes, l’histoire est globalement contenue dans un immeuble, un couloir et un appartement, mais vous nous guidez à travers le récit en renouvelant constamment votre approche visuelle.

    C’est ce que j’appelle le « rafraîchissement visuel ». Ça sonne un peu comme un cliché, mais chaque plan raconte un nouveau bout d’histoire et ajoute un peu de dynamisme au récit. J’ai compris très tôt que ce film allait avoir besoin d’énergie. C’était primordial pour créer une « poussée » proche du rollercoaster. Quand on analyse une idée, on essaie de l’appréhender en un tableau gigantesque, composé de plein de petites vignettes. C’est comme un montage photographique. On se demande où on va mettre la caméra à tel ou tel moment, et plus on avance dans la préparation, plus on peut préciser les détails. Donc, ce rafraîchissement était important.

    Je sais qu’il y a des réalités pragmatiques dans la création d’un film et on est tous amenés à faire du coverage (captation d’une même scène via de multiples angles afin de s’assurer d’avoir tout le matériel requis au montage – NDR). Mais quand j’arrive sur un plateau, au milieu de mon équipe d’artistes et de techniciens, je me dis aussitôt que le coverage est la mort du cinéma. C’est une facilité, une sécurité. Autant que possible, j’essaie d’éviter d’y avoir recours.

    Mon directeur de la photographie Dave Garbett en a déjà parlé en interview et il est d’accord avec moi. Notre collaboration est basée sur ce principe : chaque image est l’occasion d’apporter un élément nouveau. Voilà d’ailleurs pourquoi nous avons beaucoup employé l’objectif à foyer partagé sur Evil Dead Rise. Pour certains plans, nous avions besoin de profiter d’un gros plan et d’une réaction dans le même cadre.

    Couper au montage aurait diminué l’énergie. Je voulais condenser le maximum de détails à l’écran, car cela donne lieu à une expérience plus immersive. Le spectateur a vraiment l’impression de faire partie de ce monde. Si, dans la vie réelle, on se retrouvait dans cette histoire, à vivre ce que vivent les personnages, ça ressemblerait à une sorte de rêve fou et fiévreux. On aurait l’impression d’être drogué. En juxtaposant toutes ces couleurs, toute cette énergie, tous ces sons et toutes ces images, on pouvait s’approcher de cette sensation de cauchemar éveillé.

    Vos décors sont incroyablement chargés. Même avant l’intervention de l’élément fantastique, cela donne à l’image une atmosphère claustrophobique. La lumière est faible et l’appartement est rempli de meubles, d’accessoires et de bibelots, ce qui contraste avec le vide de l’immeuble, qui va bientôt être démoli.

    On a parlé de tout ça en préproduction. Faire un film Evil Dead, c’est aspirer à créer le meilleur spectacle horrifique possible. Mais avant de se lancer dans le parcours de train fantôme, il faut trouver des motivations dans le script et comprendre pourquoi on prendra telle ou telle décision.

    Dans les précédents Evil Dead, personne ne vivait dans le chalet et cela donnait à l’histoire un aspect exotique et relativement crédible. Mais dans Evil Dead Rise, on parle d’une famille contemporaine qui vit dans le même endroit depuis dix, voire quinze ans. Il y a donc des couches de vie qui se sont superposées au fil du temps.

    Il y a même des détails dans le décor sur lesquels on n’a jamais vraiment eu l’occasion d’insister à l’écran. Vers le début du film, quand Ellie et Beth ont une conversation sans les enfants, Beth est sur le sofa et Ellie est debout dans l’encadrement de la porte. En regardant attentivement, vous verrez la taille des enfants, avec les années correspondantes.

    La relation entre les deux sœurs peut être lue de différentes façons. Ellie accuse sans cesse Beth de n’être qu’une groupie, car elle travaille dans le monde du spectacle et dans le milieu du rock. Ce qui la met systématiquement en rage. Est-ce une manière pour vous d’anticiper d’inévitables accusations de fanboyisme alors que vous vous retrouvez à la tête d’un projet aussi culte qu’Evil Dead ?

    J’adore cette interprétation ! Honnêtement, je n’y avais pas pensé en ces termes. C’était surtout pour moi un élément dramatique : Ellie est fière de sa sœur, mais elle est également jalouse de sa liberté. C’est pour ça qu’elle essaie tout le temps de la diminuer, même inconsciemment.

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    – Lily Sullivan, l’interprète de l’héroïne Beth qui va devoir protéger ses neveux contre leur mère possédée.

    Vous avez tourné en anamorphique, ce qui est plutôt intéressant car l’immeuble est vertical, et compte tenu du format, vos plans d’établissement deviennent forcément baroques. Vous exploitez toutefois la verticalité du cadre avec la scène du couloir, et vous resserrez le ratio lorsqu’on voit tout le massacre à travers le judas.

    Dans mon précédent film, j’avais tourné une scène entière en plan fixe et toute la violence intervenait hors champ. Ça peut sembler facile, mais ça confère à ce moment une certaine puissance. The Hole in the Ground disposait d’un budget bien plus faible, donc je ne pouvais pas aller très loin dans mes ambitions, mais cette idée de mise en scène me plaisait vraiment.

    Avec Evil Dead Rise, j’ai essayé de trouver une occasion de jouer sur ce point de vue restreint, un peu comme une signature. Quand on ne voit pas tout, les autres sens s’éveillent. Dans Evil Dead Rise, c’est un peu différent : il y a des moments qu’on cache au spectateur, mais aussi des passages viscéraux, comme celui où l’enfant est projeté contre le mur avec un bras en moins.

    Le but, c’est que le spectateur se dise que l’action dépasse largement ce qu’il voit dans les limites du cadre. Le judas devient presque un personnage lui-même au fil de l’intrigue. Je n’avais pas de cave, donc il me fallait une ouverture vers un espace parallèle à celui de l’appartement. Ce qui transformait ce dernier en une sorte de sanctuaire et s’inscrivait parfaitement dans l’esprit de la saga Evil Dead.

    L’emploi de l’anamorphique est aussi dû à des limitations. Je ne pouvais pas m’amuser avec une forêt entière, mais je voulais tout de même créer un vrai film de cinéma, avec une certaine ampleur. C’est marrant : parfois mes neveux me demandent de prendre des photos avec mon smartphone, et je le tiens instinctivement en position horizontale. Ça les rend dingues, car ils veulent tout en vertical pour pouvoir diffuser ça sur Instagram. Je n’arrive pas à penser de la sorte.

    Quand je vois quelqu’un filmer en vertical, j’ai envie de lui arracher son smartphone des mains…

    (rires) Des touristes m’ont arrêté dans la rue il y a quelques jours pour me demander de prendre une photo d’eux devant un mur fleuri. J’ai tenu le smartphone à l’horizontale et ils ont commencé à me dire : « Non non, en vertical. » « Eh, je vous fais une faveur, laissez-moi prendre la photo. »

    Enfin bref, je voulais donner à Evil Dead Rise une certaine échelle, même en intérieur. Nos yeux ont un champ de vision très large. Quand je me balade dans mon appartement, je peux presque voir tous les murs sans tourner la tête. Je voulais capturer ça tout en faisant ressentir l’enfermement des personnages. Il est facile d’installer une focale anamorphique sur une caméra, mais il faut qu’il y ait un raisonnement derrière.

    Dès les logos d’ouverture, vous dites aux spectateurs qu’ils vont devoir faire attention à ce qui se déroule sur les côtés, ou derrière : le bourdonnement d’une mouche passe à travers toutes les enceintes avant de disparaître.

    C’était une sorte de message, mais aussi une opportunité d’ancrer le film dans la continuité des précédents. Bruce Campbell m’a donné un disque dur avec des numérisations des enregistrements sonores originaux. J’ai intégré plusieurs de ces effets dans mon histoire, de différentes façons. La mouche vient de là.

    Le film regorge d’effets gore extrêmes qui impliquent, une fois n’est pas coutume, une enfant et des adolescents. En coulisse, comment avez-vous géré cela sur le plan psychologique, notamment avec la petite Nell Fisher ?

    Les parents sont essentiels dans le processus, ils doivent comprendre les nécessités et les réalités du tournage. La communication avec les enfants est elle aussi très importante : il faut leur parler des effets spéciaux le plus tôt possible. Nell Fisher, qui joue Kassie, avait 9 ans pendant le tournage, mais elle était incroyablement intelligente.

    Dans The Hole in the Ground et dans plusieurs de mes courts-métrages, j’avais déjà travaillé avec des enfants. Ce que j’ai appris, c’est qu’on doit les intégrer à l’équipe et les impliquer dans le développement. Quand les gars des effets spéciaux préparent des gags avec beaucoup de sang, il faut inviter les gosses à appuyer sur un bouton. Ça devient une fête de Halloween, ils s’amusent et ils veulent être là quand quelque chose d’horrible va être filmé. Ils voient le côté rigolo sur le plateau, et pas forcément le plan final sur le combo.

    Votre hommage à Shining est excellent.

    Il y a des œuvres qui vous marquent quand vous êtes jeune et auxquelles vous ne pouvez plus échapper par la suite. La filmographie de Sam en fait partie ; il figure sur mon mont Rushmore cinéphilique. Et bien sûr, il y a Shining. Je savais que j’allais avoir besoin d’un ascenseur dans l’immeuble, donc je devais absolument le remplir de sang. Il aurait presque été impoli de ne pas le faire. Dans Shining, on voit ce qui arrive après, mais dans Evil Dead Rise, on voit ce qui se déroule dedans !

    – Propos recueillis par Alexandre Poncet.
    – Merci à Étienne Lerbret.
    – Mad Movies #370

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    Brendon Durey est le directeur du studio néo-zélandais Filmfx, collaborateur privilégié de Rob Tapert et Sam Raimi depuis les séries Hercule et Xena au milieu des années 1990. Déjà présent en coulisses de Ash vs Evil Dead, Durey a volontiers repris du service sur Evil Dead Rise…

    Quel est exactement votre rôle en tant que superviseur des effets spéciaux ?

    Le département des effets spéciaux – ou des effets mécaniques comme on le nomme parfois – s’occupe de tout ce qui ne concerne pas les monstres en latex ou les trucages numériques. Notre boulot principal concerne la météo et les atmosphères : nous créons la pluie, le vent, la neige ou le brouillard. Nous nous occupons aussi des flammes, des effets pyrotechniques et des trucages physiques impliquant des mouvements hydrauliques, pneumatiques ou des pompes diverses. Sur des films d’horreur, on doit par exemple pomper du sang un peu partout.

    Dans la plupart des pays, le département des maquillages va souvent créer les saignements sur les personnages, mais en Nouvelle-Zélande cette mission nous revient presque systématiquement. Nous travaillons donc directement avec les maquilleurs et installons des systèmes dans les prothèses. Je ne veux surtout pas prétendre que nous concevons les maquillages : ce domaine ne nous concerne pas du tout. C’est un art très spécifique, et je ne sais absolument pas faire ça.

    Vous devez travailler très étroitement avec les autres départements, car tout est lié…

    Absolument. Le production designer d’Evil Dead Rise, Nick Bassett, a été incroyable, soit dit en passant. La première fois que j’ai bossé avec lui, c’était sur Hercule contre Arès en 1998. Nous sommes restés amis et nous avons souvent collaboré depuis, en montant les échelons chacun de notre côté.

    Depuis une douzaine d’années, Nick est le production designer attitré de Rob Tapert en Nouvelle-Zélande et leur méthodologie est bien rodée. Quand on connaît les gens depuis plusieurs décennies, les choses avancent plus vite et plus efficacement.

    Pouvez-vous nous parler de votre travail en préproduction d’Evil Dead Rise ?

    Durant ma première réunion avec Lee, après avoir lu le scénario, je lui ai expliqué ma méthodologie pour le sang et le vomi : si un personnage donne un coup de couteau à un autre et qu’une giclée de sang lui arrive au visage, il ne faut pas attendre le jour du tournage pour savoir quel look on veut obtenir.

    Nous faisons des tests sur des mannequins pour chaque effet d’éclaboussure afin de définir la pression et la quantité de sang exactes. Il est important d’établir tout ça avant le début des prises de vues, car nettoyer le plateau coûte très cher.

    Comment préparez-vous votre faux sang ?

    Nous avons développé notre propre recette au fil des années. Elle a été utilisée sur Ash vs Evil Dead et Spartacus. Sur Hercule et Xena, on avait déjà pu faire des expériences avec le faux sang. Nous avons aujourd’hui une méthode de fabrication très efficace. La base, c’est le sirop de maïs à haute teneur en fructose, une matière extrêmement sucrée. On le stocke dans des containers de 20 litres. On le fait bouillir, puis on ajoute de l’eau. La clé pour obtenir un faux sang crédible, c’est la viscosité.

    Nous avons mis au point des tests pour nous assurer que cette viscosité soit conforme à l’effet que nous recherchons. Nous fabriquons d’ailleurs différents types de faux sang, chacun avec une viscosité et une couleur particulières. L’une de nos mixtures présente un rouge très éclatant, qui correspond à du sang frais. Nous avons un mélange plus sombre pour du sang qui aurait été versé il y a longtemps.

    Certains réalisateurs demandent aussi une hémoglobine plus sombre. Une fois le faux sang standard cuisiné, nous en fournissons des échantillons aux départements des maquillages, des costumes et des décors. Car quand le sang vole dans les airs, c’est notre job. Mais quand il est renversé sur le sol, c’est le job des décorateurs ; quand il éclabousse un costume, c’est le job des costumiers ; quand il est appliqué sur le visage de quelqu’un, c’est celui des maquilleurs. Ce sont souvent ces derniers qui choisissent la couleur et la teinte finale du faux sang.

    Ce qui est clair, c’est que nous devons en produire des quantités astronomiques. Sur Evil Dead Rise, nous en avons préparé six tonnes et demie…

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    Vous avez battu un record, non ?

    Cette quantité était nouvelle pour nous. Engager une armée de techniciens pour préparer des portions de 20 litres aurait coûté une fortune, donc nous nous sommes tournés vers une usine alimentaire : nous avons pu utiliser leur équipe et leurs cuves industrielles pour créer la quantité dont nous avions besoin.

    Nous avons quand même dû acheter des IBC (intermediate bulk containers – NDR), c’est-à-dire des réservoirs industriels en plastique qui sont utilisés pour déplacer de grands volumes de liquides. Nous en avons rempli six et demi, nous les avons fait livrer au studio, et nous les avons stockés dans un container réfrigéré jusqu’au moment où nous avons dû les utiliser.

    Avez-vous travaillé sur la séquence où du sang coule du nez et des yeux d’une adolescente ?

    Oui, on s’est inspirés du clip When the Party’s Over de Billie Eilish, dans lequel une matière noire sort des yeux de l’artiste. Nous avons collé des petits tubes le long des tempes de Gabrielle Echols et nous les avons tirés jusqu’à la base des yeux et vers les narines. Puis les artistes des effets visuels ont effacé numériquement ces tubes.

    C’est extrêmement efficace, car on regarde le sang et non les tempes ou les joues. On est focalisé sur l’élément réel et non sur ce qui est faux.

    Oui, et ces artistes sont devenus très bons pour effacer ce genre de choses. À l’inverse, les interactions entre des liquides et la surface de la peau sont très difficiles à simuler à l’aide d’effets digitaux.

    Le vomi a-t-il été simulé de la même façon ?

    Oui, nous avons installé un coquetier en silicone à l’intérieur de la bouche de l’actrice et lui avons fixé un tube sur la joue jusqu’au milieu de la lèvre inférieure, en direction de la bouche. Nous avons pompé notre faux vomi dans sa bouche et celui-ci a rebondi à l’extérieur, donnant l’illusion d’un spray réaliste. C’était très inconfortable pour l’actrice, mais elle a pu s’entraîner à placer le coquetier d’une certaine façon afin de résister à la pression…

    C’était vraiment une guerrière : vous vous imaginez, vous, en nuisette et maquillée en monstre, en train de dégobiller des litres de faux vomi devant 40 personnes ?Je crois qu’elle a expulsé 50 litres dans cette scène, alors que l’estomac humain est limité à 7…

    Êtes-vous un fan de L’Exorciste ?

    Oui, je l’ai toujours été. Je comprends pourquoi vous me posez la question ! Ça faisait partie des références qu’on a étudiées pour Evil Dead Rise. Nous avons aussi revu Stand by Me et Monty Python, le sens de la vie.

    Comment a été tournée la séquence de la salle de bains, lorsqu’Ellie se retrouve au plafond ?

    C’est mon ami Stuart Thorp, le coordinateur des cascades, qui s’est chargé de cet effet. Avec son équipe, ils ont mis au point un système d’attaches spécifiquement pour cette séquence. Le département des décors a également construit une salle de bains inversée qui a été utilisée pour les plans les plus complexes. Ils ont donc filmé la tête en bas.

    – Propos recueillis par Alexandre Poncet.
    – Merci à Étienne Lerbret.
    – Mad Movies #370

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    Le tout petit film bricolé au fin fond des bois par Sam Raimi il y a plus de 40 ans a accouché d’une saga qui excite toujours autant les fans d’horreur. Le nouveau-né Evil Dead Rise cristallise les mutations d’une désormais franchise qui a traversé les modes bille en tête. Alors, groovy ou non ?

    Au Festival de Sitges 1982, un petit film d’horreur fauché tourné entre potes fait sensation. Son titre : Evil Dead. À l’époque, le long-métrage n’a été projeté qu’à trois reprises : en avant-première mondiale discrète dans une salle du Michigan le 15 octobre 1981, au Marché du Film de Cannes en mai 1982 et au Festival du Film Fantastique d’Édimbourg en août 1982. Le début du début de la légende.

    Sam Raimi et son producteur/pote Rob Tapert sont donc présents en Espagne, en mode humble et rigolard, pour présenter leur petite péloche tournée en total « hémoglobinorama ». Et fantasment déjà sur la suite qu’ils rêvent de donner à leur Evil Dead. Sans vraiment se rendre compte que leur film va devenir le point d’orgue de l’Âge d’Or « goresque » des années 1980 (Re-Animator, Braindead, tout ça). Ni imaginer que leur petit film bricolé mutera en une simili-franchise qui fera encore fantasmer les horror fans presque 50 ans plus tard…

    Toujours plus DEAD

    Entre 1992, l’année de L’Armée des ténèbres, et le remake de 2013, 21 ans s’écoulent. Deux décennies où Sam Raimi est partit « spider-maniser » sa carrière tout en surveillant du coin de l’œil son bébé qui continue de (sur)vivre. Notamment à travers une adaptation en comédie musicale, des jeux vidéo, des comics et autres jeux de société. Et des projets fous qui restent lettre morte.

    La New Line annonce ainsi en 2004 un crossover intitulé Freddy vs. Jason vs. Ash. Soit une partouze de tronçonneuse, de griffes et de machette. Mais Raimi n’est pas très chaud (le projet prendra finalement la forme d’une courte série de comics parue en 2007). En 2012, Evil Dead a même droit à sa parodie porno, Evil Head, avec baise en boucle dans la cabane et gros câlin avec un arbre possédé.


    – Ellie (Alyssa Sutherland), maman devenue deadite suite à la découverte d’un livre maudit.

    Remake

    L’année suivante, Fede Alvarez remet la pendule (celle dont les aiguilles tournent à toute vitesse dans le film original) à l’heure avec un remake produit par Sam Raimi, Rob Tapert et Bruce Campbell. Evil Dead version XXIe siècle est plutôt bien accueilli pour sa radicalité sanglante et son ambiance très premier degré (pas d’humour slapstick à l’horizon). De quoi ravir les nouveaux venus, mais laisser quelque peu de côté certains fans restés bloqués sur leur vision nostalgique de la saga.

    Deadites en série

    En 2015, Raimi décide de reprendre cette dernière en main avec les trois saisons de la série made in Starz Ash vs Evil Dead dont il réalise le pilote, histoire de montrer que malgré son passage (sa trahison, diront certains) du côté des blockbusters, il n’a rien perdu de son côté sale gosse.

    Anges et deadites

    Dix ans plus tard (aujourd’hui, donc) entre en scène un nouvel opus qui aura mis un bon bout de temps à prendre forme. Evil Dead Rise est annoncé durant le Comic-Con 2019 pour une sortie programmée directement sur HBO Max en été 2022. Mais la Warner n’ayant cessé de changer de politique – et de direction – suite à la pandémie, le long-métrage est finalement calé pour une sortie mondiale – en salles de chez salles, avec des fauteuils, un grand écran et tout et tout – en avril 2023. À raison, les fantasticophiles sont méfiants et aux aguets. Car ils en ont subi, des suites et des remakes pourris de films fantastiques cultes des années 1970-80 (La Malédiction, Fog, Carrie, Poltergeist… la liste est longue !).

    Et voilà qu’un trailer bien méchant, mis en ligne début janvier, met le feu aux poudres. Pour éviter la redite, ce cinquième Evil Dead s’éloigne de la cabane dans les bois pour aller faire un petit tour à Los Angeles. Où une certaine Beth se pointe chez sa sœur aînée Ellie qui, mère célibataire, gère comme elle le peut ses trois mômes dans son appartement pourrave. Suite à un tremblement de terre qui a ébranlé les fondations de l’immeuble, les deux frangines découvrent au sous-sol un vieux livre poussiéreux qui va transformer Ellie en suppôt de Satan. Beth va devoir s’improviser mère-courage de substitution pour protéger ses nièces et son neveu de leur génitrice devenue démone sadique, hystérique et accro à l’arrachage de peau.

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    – Possession en pleine nature avant le déplacement de l’intrigue en milieu urbain.

    Lee Cronin, qui a pris de la bouteille quatre ans après son très bof The Hole in the Ground, assure derrière la caméra : il reste techniquement fidèle à la charte Evil Dead (les cadrages tordus) tout en assombrissant l’ambiance avec une photo maladive et blafarde (dans la lignée de celle de L’Exorciste) et en rendant des hommages divers. À Evil Dead 2, forcément (la séquence de l’œil), mais aussi à l’ascenseur sanglant de Shining.

    Et le sang, justement, coule à flots. Notamment via l’utilisation enthousiaste d’armes blanches et d’ustensiles de cuisine (cf. la séquence de la râpe à fromage, ustensile déjà employé à mauvais escient dans le méchant Farm House de George Bessudo), et une séquence finale ultra gore versant dans un grand-guignol plus contemporain. Reste que depuis la démocratisation de l’horreur graphiquement explicite (notamment à la télévision avec The Walking Dead), l’impact sur le spectateur n’est clairement plus aussi intense qu’à l’époque du premier Evil Dead, qui avait essuyé les plâtres avec ses déversements de sang non coagulé.

    Ce RISE sur le gâteau

    Mais ne boudons pas notre plaisir : Cronin signe un film parfaitement dosé entre l’hommage sincère, la réinterprétation maligne et le gore outrancier, et parvient à trouver un équilibre convaincant entre les deux extrêmes de la franchise (l’attitude rigolarde des Raimi et le sérieux imperturbable du Alvarez). Signe des temps, la saga se pare même d’un brin de postmodernisme en incluant dans son univers des caractérisations de personnages et des influences visuelles (une séquence en particulier lorgne du côté de Junji Itô) dans l’air du temps, là où ses précédentes itérations avaient plutôt tendance à fonctionner en vase clos.

    L’avenir dira si cette ouverture sur le monde est le signe d’un renouvellement ou du début de la fin. Mais ce qu’on attend avant tout d’un Evil Dead, c’est d’être un film d’horreur qui en jette. Et ce Rise en est un. Merci à lui.

    – Par Christophe Lemaire
    – Mad Movies #370