Ça pourrait vous arriver : un vieux préampli TV perturbe un aéroport
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Dans la série des enquêtes de l’ANFR, je voudrais « David perturbe Goliath ». Elle est intéressante, car au-delà de guerre camping-car vs avion, elle soulève la question de l’utilisation de vieux matériel, parfois sans en avoir connaissance. Cela peut provoquer des perturbations dans plusieurs domaines.
L’histoire débute fin avril, quand « la Direction générale de l’Aviation civile (DGAC) saisit l’ANFR pour un brouillage sur l’aéroport de Nantes Atlantique dans la bande VHF 117,975 - 137 MHz ». Ces fréquences sont présentées par l’Agence nationale des fréquences comme « un des piliers des radiocommunications aéronautiques en courtes et moyennes distances, en particulier pour les échanges vocaux entre les pilotes et les services au sol ».
L’ANFR dépêche des agents sur place. Elle rappelle au passage que les services de sécurité (pompiers, police, gendarmerie et transport aérien) sont traités en priorité dans les cas de parasitage. Comme toujours en pareille situation, l’enquête sur le terrain commence là où sont identifiés les problèmes : l’aéroport.
Radiogoniomètre à la main, l’enquête commence
Sur place, les agents font chou blanc et tournent alors autour de l’aéroport avec leur radiogoniomètre, un appareil qui permet de déterminer la direction d’un signal et donc de remonter par la suite à l’émetteur. Une fois la direction trouvée, les enquêteurs suivent le signal.
Ils arrivent dans une impasse de Saint-Aignan-Grandlieu, « commune qui héberge une partie de l’aéroport. Au fond de cette impasse, une maison : le signal brouilleur semble bien provenir de cette habitation… ». En se rapprochant de la maison, et avec l’autorisation du propriétaire, la source du signal se fait plus précise : un camping-car qui se trouve sur le terrain.
Problème, dans ce véhicule métallique, impossible d’avoir la direction précise du signal, il faut donc continuer les recherches à la main. Ils sont sûrs que l’objet du délit se trouve dans le camping-car, puisque le fait de couper l’alimentation électrique de ce dernier met fin aux perturbations.
Coupable : « un vieux préamplificateur télé, poussiéreux »
C’est gagné : « Après une fouille méticuleuse, l’un des agents aperçoit un petit boîtier derrière une grille d’aération… […] Une fois sorti de sa cachette, Bingo ! Il s’agit d’un vieux préamplificateur télé, poussiéreux, en plastique jauni, mais toujours branché ! ».
Pour rappel, le but d’un préamplificateur est d’améliorer la qualité de la réception des signaux des chaines de télévision captés par une antenne râteau. Un appareil qui tombe en désuétude face aux moyens modernes d’accéder à la télévision que sont le xDSL, la fibre et la 4G/5G. La télévision du camping-car est d’ailleurs branchée à une box 4G, autant dire que le préampli n’est d’aucune utilité.
Une fois débranché, l’aviation civile confirme la fin des perturbations. Cet exemple est symptomatique d’un problème plus large : « Trop longtemps oublié, ce discret appareil réapparaît soudain en pleine lumière, en causant bien des problèmes ! ». S’il ne s’était pas mis à faire n’importe quoi, il serait certainement encore en marche.
Un préampli peut facilement se cacher
Des préamplis du genre, on peut aussi en trouver dans d’anciennes maisons, parfois dans les combles et donc relativement invisibles pour les habitants. Et même s’ils ne sont pas tous la source de brouillage, cela peut arriver un jour avec, en prime, une consommation électrique totalement inutile et le risque de laisser brancher un appareil caché dans l’habitation, sans aucun contrôle.
Ce phénomène n’est pas nouveau, loin de là : « Les agents de l’ANFR sont rompus au traitement des brouillages générés par des préamplis télé défectueux ». Les opérateurs de téléphonie mobile et l’aviation civile sont les principales victimes de ces défaillances.
L’antenne râteau vient prêter main forte pour le brouillage
L’ANFR explique d’ailleurs comment un petit boitier en apparence sans danger peut ainsi perturber des avions. On peut parler d’effet boule de neige : « Du fait de son vieillissement, cet équipement était devenu nocif pour les utilisateurs autorisés de radiofréquences. Il n’était plus conforme aux exigences en matière de compatibilité électromagnétique (CEM) en émettant des parasites ».
Néanmoins, le petit boitier seul ne peut pas perturber les communications avec les avions, mais il a trouvé de « l’aide » avec l’antenne. Alors que les signaux sont normalement « confinés aux câbles de distribution des habitations », des émissions parasites peuvent atteindre l’antenne-râteau. De récepteur, elle se transforme alors en « un redoutable émetteur : par sa forme, elle amplifie en effet ces signaux parasites, qui sont ainsi diffusés dans tout le voisinage et peuvent perturber les services qui utilisent légitimement les fréquences concernées ». C’est exactement ce qu’il s’est passé.
« Ce type de brouillage est par ailleurs très fluctuant en fréquences, selon l’état des composants qui varie en fonction de la température ou d’autres facteurs ». C’est d’ailleurs ce qui a un peu compliqué la tache de l’ANFR : le brouillage était signalé en 118 MHz par l’aviation civile, mais l’ANFR ne l’avait constaté qu’en 130 MHz. « Cette oscillation aléatoire rend la recherche parfois ardue ».
Source : next.ink
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@Raccoon Très intéressant, J’ai encore un de ces préampli en service (en cas de panne internet), mais moins vieux, pour amplifier le signal du câble.