Crise existentielle en vue pour TikTok, de plus en plus interdit aux Etats-Unis
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Les élus américains du Congrès s’apprêtent à interdire TikTok sur les appareils des fonctionnaires pour cause de menace à la sécurité nationale, alors que de nombreux Etats ont déjà franchi le pas: le réseau social est en position délicate aux Etats-Unis, où sa présence même est en question.
Après le Sénat la semaine dernière, la Chambre des représentants pourrait adopter, dès cette semaine, un texte prohibant le téléchargement et l’utilisation de TikTok sur les équipements professionnels des employés de l’Etat fédéral américain.
Près de vingt Etats américains ont déjà pris des mesures similaires pour leurs propres employés.
«Ce n’est pas un sujet démocrate ou républicain, c’est une question de sécurité nationale», explique à l’AFP Ryan McDougle, sénateur local de Virginie, en pointe sur le dossier.
«Le problème fondamental est le suivant: TikTok appartient à ByteDance (sa maison mère), qui est lui-même soumis au contrôle effectif du Parti communiste chinois» (PCC), a expliqué, dimanche sur la chaîne CNN, le républicain Mike Gallagher, élu à la Chambre des représentants.
Et ce qui a longtemps été un chiffon rouge brandi par les seuls républicains fait de plus en plus nettement consensus, au point que la présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, s’est dite favorable vendredi à ce que le texte soit soumis au vote cette semaine.
Une autre proposition de loi, déposée la semaine dernière par des élus des deux bords, demande l’interdiction pure et simple de TikTok aux Etats-Unis, ce qu’avait tenté, sans succès, Donald Trump en 2020, à la fin de son mandat.
TikTok a pris plusieurs mesures pour tenter de convaincre les autorités américaines que les données des utilisateurs américains de la plateforme étaient protégées, notamment en les stockant sur des serveurs situés aux Etats-Unis.
Mais il a admis que des employés basés en Chine avaient accès à ces données, même si cela se faisait, selon lui, dans un cadre strict et limité.
«Le Parti communiste chinois ne nous a pas demandé de partager ces données», a régulièrement affirmé TikTok. «Nous n’avons pas transmis au PCC des informations relatives aux utilisateurs américains et nous ne le ferions pas si on nous le demandait».
Le réseau social attend depuis de longs mois les conclusions d’un examen du Comité sur les investissements étrangers aux Etats-Unis (CFIUS), une agence gouvernementale qui évalue les risques de tout investissement étranger pour la sécurité nationale américaine.
Le CFIUS étudie actuellement une «solution globale», avec des mesures relatives à la gouvernance, à la modération des contenus et à la sécurité des données, a indiqué TikTok à l’AFP, ce qui permettrait de «répondre aux inquiétudes» du gouvernement américains.
Définir un protocole entre le gouvernement américain et TikTok «va être délicat», estime néanmoins Michael Daniel, directeur général de la Cyber Threat Alliance, organisation non gouvernementale dédiée à la cybersécurité.
Faute de nouveau cadre, les autorités américaines pourraient contraindre ByteDance à vendre TikTok, selon le site Politico.
Alors que le sujet était jusqu’ici cantonné, pour l’essentiel, à la sphère politique, il pourrait désormais s’étendre.
«Les gens n’ont pas réalisé la réaction en chaîne que cela va provoquer», prévient Karen Freberg, professeure de communication stratégique à l’université de Louisville (Kentucky).
Elle mentionne notamment «les sociétés sous-traitantes du gouvernement, comme Amazon», qui pourraient être incitées à agir pour s’aligner avec les obligations faites au secteur public.
Le partenaire de TikTok, qui assure le stockage des données des utilisateurs américains aux Etats-Unis, n’est autre qu’Oracle, qui est, lui aussi, prestataire de l’Etat américain.
Comme tous les grands réseaux sociaux, TikTok tire l’essentiel de son chiffre d’affaires de la publicité. Pour Rebecca Long, de l’agence de marketing digital VisualFizz, les derniers développements du dossier TikTok sont «préoccupants» pour les annonceurs.
«TikTok aura toujours un astérisque à côté de son nom et les sociétés qui travailleront avec eux devront toujours garder ça dans un coin de leur tête», renchérit Karen Freberg.
Quant aux utilisateurs, si le coeur de cible de TikTok, à savoir les moins de 25 ans, est assez peu sensible, en moyenne, aux échos du monde politique, les plus âgés «sont très au courant» des questions de collecte de données personnelles et prêts à agir en conséquence, selon Rebecca Long.
Sur TikTok, de nombreuses vidéos circulent déjà sur le sujet. L’influenceuse Natalaya Michele se projette déjà et recommande, en cas d’interdiction, d’en passer par un VPN, un réseau privé virtuel, outil qui masque l’adresse de l’utilisateur et lui permet de se connecter depuis un autre pays.
Quant à BryanBoy (Bryan Grey Yambao de son vrai nom), «vlogueur» à la mode aux 4,1 millions d’abonnés, il est plus fataliste: «Si j’étais vous, je pense qu’il serait temps d’acquérir un nouveau talent».
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C’est intéressant de constater qu’ils se focalisent sur TikTok, alors qu’il existe un autre géant, Tencent, qui au travers de sa présence dans plus de 700 sociétés est un mastodonte dans l’univers de la data et -très- proche du PCC
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Le problème sera simplement déporté. L’article, et c’était déjà le cas sous le gouvernement de Trump, parle de forcer la vente de TikTok a un acteur américain