Etats-Unis : la FCC rétablit la neutralité du net, voici ce que cela veut dire
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Le régulateur nord américain des télécoms à voté par 3 voix contre 2 pour rétablir les règles garantissant l’égalité de traitement de l’ensemble du trafic internet. Mais cela ne signifie pas que la question est réglée. Explications.
Il y a sept ans, la Commission fédérale des communications (FCC) américaine, sous la houlette du président Donald Trump, mettait fin à la neutralité du net. La FCC, désormais contrôlée par les démocrates, vient de rétablir les règles relatives à la neutralité du réseau par un vote à 3 voix contre 2.
De quoi rétablir les règles garantissant l’égalité de traitement de l’ensemble du trafic internet. Mais cela ne signifie pas que la question est réglée. Cette décision marque un revirement politique important par rapport à la position dérégulatrice de l’administration Trump. Les règles rétablies visent à garantir que l’internet à haut débit reste dépourvu de tout traitement préférentiel ou de toute restriction de la part des fournisseurs d’accès à internet (FAI), c’est à dire les opérateurs télécom.
La neutralité du net est une politique qui vise à garantir que tout le trafic internet est traité de manière égale, sans discrimination. Cette approche signifie que les FAI ne devraient pas être autorisés à accélérer, à ralentir ou à bloquer l’accès à des sites web ou à des services en ligne spécifiques. La neutralité vise à garantir que l’internet reste un terrain de jeu égal pour tous.
Un élément essentiel du fonctionnement de l’internet depuis des décennies
La neutralité du net est un élément essentiel du fonctionnement de l’internet depuis des décennies. En effet, le concept de base selon lequel tous les fournisseurs de services Internet partagent la bande passante de manière égale et équitable remonte aux Etats-Unis au Commercial Internet Exchange (CIX), qui a ouvert la voie à l’internet d’aujourd’hui.
Plus précisément, le retour de la neutralité du net signifie, selon la FCC, que les FAI « seront à nouveau interdits de bloquer, de limiter ou d’accorder une priorité à des contenus contre rémunération ». Il s’agit de garantir que « le service Internet est traité comme un service essentiel ».
Selon la FCC, ces changements signifient également que le régulateur peut désormais jouer un rôle « lorsque les travailleurs ne peuvent pas télétravailler, les étudiants ne peuvent pas étudier, ou les entreprises ne peuvent pas commercialiser leurs produits parce que leur service Internet est indisponible ».
« Prise de pouvoir »
La FCC peut également désormais empêcher les FAI américains de vendre les données personnelles des clients ou de les partager avec des entreprises technologiques pour former des modèles d’intelligence artificielle (IA). Cela ne signifie pas pour autant que la FCC va « contrôler la liberté d’expression en ligne« . Au contraire, la « liberté d’expression sera renforcée, empêchant les fournisseurs de bloquer ou de désavantager tout type d’expression en ligne ».
Un opposant à cette décision, Brendan Carr, commissaire de la FCC, a qualifié ce changement de politique de « prise de pouvoir« . Il n’est pas le seul. Des politiciens républicains, dont le sénateur Ted Cruz, qualifient cela de « prise de pouvoir illégale ». Ils estiment que ce changement soumet le secteur des télécoms à des réglementations lourdes.
D’autres détracteurs du retour de la neutralité de l’internet, comme la Chambre de commerce des États-Unis, sont du même avis. La Chambre a critiqué la décision de la FCC, affirmant qu’elle réimpose un cadre réglementaire désuet, ce qui pourrait entraver les investissements technologiques et l’innovation à l’avenir.
« C’est une grande victoire pour l’intérêt public »
À l’inverse, les défenseurs de l’intérêt public comme Free Press considèrent cette décision comme une victoire décisive pour les clients. De fait, elle permet à la FCC de tenir les principaux fournisseurs d’accès à Internet (FAI) comme AT&T, Comcast et Verizon responsables de toute pratique préjudiciable aux utilisateurs de l’Internet.
« C’est une grande victoire pour l’intérêt public » a déclaré Free Press. « L’agence a maintenant la capacité de protéger l’Internet – et de suivre les pannes de service, de protéger les utilisateurs d’Internet contre les atteintes à la vie privée des FAI, de promouvoir la concurrence et le déploiement du haut débit, et de prendre des mesures contre les frais cachés, les plafonds de données et les escroqueries à la facturation ».
Certaines organisations technologiques, comme la Computer & Communications Industry Association (CCIA), qui regroupe des géants de la technologie tels qu’Amazon, Apple, Alphabet et Meta, ont exprimé leur soutien à cette décision.
La bataille pour la neutralité de l’internet va maintenant se jouer devant les tribunaux et dans les urnes. La question est loin d’être réglée.