Sécheresse au Maroc
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Voici une image qu’on ne verra pas avant l’année prochaine, au moins !
La sécheresse a tellement décimé le bétail marocain que le Roi Mohammed VI a appelé la semaine dernière à ne pas faire le sacrifice de Aid Al-Adha, fête religieuse majeure.Cette décision relève du bon sens au vu de l’état catastrophique de l’élevage marocain : depuis 2021, le Maroc a perdu 38% de ses bœufs, moutons et chèvres.
Le nombre d’animaux est donc redescendu à son niveau du début des années 1970 quand la population marocaine était deux fois moins nombreuse.La sécheresse qui dure depuis 2019, avec des déficits pluviométriques entre -20 et -60% selon les années, est la principale coupable de cette catastrophe pour l’agriculture marocaine.
L’élevage, en particulier ovin et caprin, est une source de revenu clé pour les 35% de marocain(e)s qui vivent de l’agriculture familiale. L’élevage est aussi leur forme de sécurité sociale : en cas de difficulté financière, le ménage agricole « décapitalise » / vend un mouton ou une chèvre.Si le cheptel national a toujours fluctué au gré des sécheresses, la situation est aujourd’hui particulièrement critique. L’appel au non-sacrifice lors de l’Aid n’a d’ailleurs été émis qu’à trois autres reprises, en 1963, 1981 et 1996, en contexte de guerre ou de sécheresse.
Pourtant, les politiques agricoles marocaines des vingt dernières années avaient justement pour objectif de rendre l’agriculture marocaine moins vulnérable à la variabilité des pluies caractéristique de notre climat.
Mais c’est bien l’inverse qui s’est produit.
Le levier principal du Plan Maroc Vert (2008-2020) pour diminuer la vulnérabilité de l’agriculture marocaine aux sécheresses était la subvention de l’accès à l’irrigation. Les surfaces irriguées ont alors doublé en 30 ans, essentiellement par l’exploitation des eaux souterraines.
Mais cette irrigation était essentiellement destinée aux cultures d’exportation, dans une logique « d’exporter pour mieux importer ». L’élevage familial et les cultures vivrières qui nourrissent les marocains (blé, orge, fèves) ont reçu très peu de subventions et d’appuis techniques.
Résultat : avec la multiplication de sécheresses, les cultures irriguées comme la tomate ou l’avocat affichent toujours des volumes de production records mais l’élevage et les cultures réellement nourricières se sont écrasées.
Comble de cette précarisation de notre souveraineté alimentaire : le Maroc, qui n’importait jusqu’en 2022 que des quantités marginales de viandes, importe désormais massivement de la viande et des animaux vifs. En janvier 2025 seulement, le Maroc a importé 21 800 bovins et 124 000 ovins.
Alors non la croissance du PIB agricole n’a pas rimé avec l’amélioration de notre souveraineté alimentaire. Et non, le Plan Maroc Vert n’a pas permis d’atténuer l’effet de la sécheresse actuelle sur les agriculteurs et consommateurs marocains, il l’a amplifié.
Source : un post Linkedin